GPSO, comment le château de cartes s’est écroulé

La remise à plus tard de la réalisation du tronçon à grande vitesse Dax-Espagne a dynamité la cohérence du Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO), tandis que RFF et la SNCF divergent sur les prévisions de trafic. Voilà deux des éléments qui ont fondé la commission d’enquête à rendre un avis défavorable.
L'arrivée du TGV à Toulouse depuis Bordeaux est actuellement compromise.

La commission d'enquête soulève de nombreux points négatifs justifiant son avis défavorable en préalable à la déclaration d'utilité publique du GPSO, qui consiste aujourd'hui en la création de deux lignes à grande vitesse, Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax, et d'aménagements ferroviaires au sud de Bordeaux (AFSB) et aux nord de Toulouse (AFNT). Un des premiers arguments invalidants soulevés par la commission d'enquête tient à la division en deux parties de la liaison à grande vitesse Bordeaux-Espagne. Depuis "la décision ministérielle du 23 octobre 2013", la première partie du GPSO englobe ainsi la réalisation des lignes Bordeaux-Toulouse (mise en service en 2024) et Bordeaux-Dax (mise en service en 2027), auxquels s'ajoutent les aménagements ferroviaires au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse. Suite aux fortes contestations politiques déclenchées par le projet au Pays basque français, puis ensuite à l'avis du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), la réalisation de la jonction avec le Pays basque espagnol a en effet été remise à 2032.


Toulouse emporté par Dax


Ce déphasage temporel entre la réalisation de Bordeaux-Dax et Dax-Espagne est porteur d'incohérences selon la commission d'enquête. "Tout d'abord, la justification de la ligne nouvelle Bordeaux-Dax repose pour sa plus grande part, sur le débouché sur l'Espagne. L'un des objectifs majeurs, longuement décrit dans le dossier et repris par les élus favorables au projet, consiste bien à relier le réseau français du Sud Ouest au réseau du Pays basque espagnol. Compte tenu du phasage imposé, la commission s'est interdit de présupposer que la ligne Bordeaux-Dax serait obligatoirement prolongée puisque le tronçon Dax-Espagne sera soumis plus tard à une enquête publique séparée" ont ainsi conclu les 21 commissaires enquêteurs. En d'autre terme, la décision du 23 octobre 2013 a fait exploser la logique interne du GPSO, qui devait traiter simultanément des liaisons Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Espagne. Cette cassure en deux du GPSO biaise la démarche initiale, avec des effets délétères. "(...) le fait d'avoir lié dans la même enquête publique, une branche de 222 km de ligne nouvelle permettant de relier deux métropoles importantes du Sud-Ouest et une branche de 160 km de ligne nouvelle reliant Bordeaux à Dax ne laissait à la commission aucune possibilité d'émettre des avis séparés sur ces deux branches" explique ainsi la commission d'enquête, décrivant en quelques mots un des pièges qui menaçaient tout l'édifice. Autant dire que, dans l'analyse de la commission, la liaison Bordeaux-Dax génère peu d'avantages.


Manque de fiabilité


Les commissaires enquêteurs mettent ensuite en relief un second point très invalidant, puisqu'il touche à l'appréciation de la rentabilité socio-économique du projet et du service rendu à la population. Un domaine où les choix annoncés par Réseau ferré de France (RFF), devenu depuis SNCF-Réseau, et par la SNCF n'ont pas convaincu puisque RFF (propriétaires des voies) et la SNCF (transporteur) n'accordent pas leurs violons.

"(...) la fréquence de desserte des gares des lignes nouvelles, telle qu'elle est annoncée dans le dossier est assortie d'une mention indiquant qu'il s'agit des : ''premières hypothèses de desserte possibles, établies par RFF sur la base de ses propres études de trafic (...), il n'engage donc pas les transporteurs''. En outre, la SNCF a bien précisé de son côté, à la commission, qu'elle déterminerait elle-même la desserte des gares sur les deux branches en fonction de critères qui lui sont propres. Enfin, les écarts entre les prévisions de trafic faites par RFF et celles de la SNCF sont importants, notamment sur Bordeaux-Dax. En conséquence, la commission d'enquête estime que l'Etat (tutelle des deux établissements) devrait intervenir en amont de l'enquête publique pour assurer la cohérence et la solidité des données fournies aux élus et au public et ainsi éviter de fortes déconvenues au moment de la mise en service", assène ainsi la commission d'enquête.


Trop d'inconvénients


Au bout de l'analyse bilancielle qu'elle dresse du projet, la commission d'enquête conclut à un déséquilibre de la balance entre avantages et inconvénients au profit de ces derniers, malgré de nombreux points jugés positifs. La commission d'enquête estime ainsi que "L'évaluation socio-économique n'est pas incontestablement favorable et le bilan socio-économique plus qu'incertain. Le projet est coûteux pour des gains de temps assez limités, notamment vers le sud-aquitain. Certes, sa non-réalisation peut avoir des effets négatifs sur la région toulousaine, mais la croissance des métropoles ne semble pas liée au raccordement à la grande vitesse. L'impact sur les activités rurales est très lourd et, faute de disponibilité foncière, difficile à réparer pour les activités viticoles et sylvicoles."


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