Prix du vin trop bas ? Un viticulteur bordelais attaque des négociants au tribunal, une première

Un viticulteur bordelais assigne devant le tribunal de commerce, jeudi 11 janvier, deux gros négociants de la région qu'il accuse d'avoir violé la loi Egalim sur les prix agricoles en lui achetant du vin en vrac à un tarif « abusivement bas ». Une affaire qui intervient alors que le plan d'arrachage de 8.000 hectares de vignes doit débuter prochainement.
(Crédits : CC Pixabay by phideg)

Rémi Lacombe, exploitant à Civrac, dans le Médoc, a vendu près de 8.500 hectolitres aux sociétés Cordier et Maison Ginestet en 2021 et 2022, aux prix de 1.150 ou 1.200 euros le tonneau (900 litres), selon les millésimes. Soit environ un euro la bouteille, tarif que le producteur juge « abusivement bas » car très inférieur à ses coûts de revient. Selon le Centre de gestion agricole et rural d'Aquitaine, ils ont atteint en moyenne 2.000 à 2.500 euros le tonneau sur la période 2019-2021. Ceux du vigneron concerné, oscillant entre 1.500 et 2.000 euros, sont inférieurs mais restent supérieurs aux prix d'achat des deux négociants. Face à la baisse des prix, le CIVB (Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux) avait même décidé fin 2022 de suspendre la cotation des cours des vins de Bordeaux vendus en vrac.

En ce qui concerne le dossier de Rémi Lacombe, son avocat, maître Louis Lacamp, espère soulever une violation de la loi Egalim adoptée en 2018 pour équilibrer les relations commerciales entre producteurs et acheteurs dans le secteur alimentaire, endiguer « la course aux prix bas » et assurer aux agriculteurs un revenu qui leur permette de vivre de leur travail. Il reproche notamment aux négociants « d'avoir violé leur obligation » de laisser le vendeur formuler une première proposition de prix, « un des piliers » de la loi.

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Sur le fondement de l'article L442-7 du Code de commerce tel que modifié par la loi Egalim, obligeant un acheteur de produits agricoles ou de denrées alimentaires à « réparer le préjudice causé » par le fait « de faire pratiquer par son fournisseur un prix de cession abusivement bas », le viticulteur réclame ainsi plusieurs centaines de milliers d'euros aux mis en cause.

« Cette affaire révèle qu'en pratique, un certain nombre d'acheteurs du secteur viti-vinicole n'ont aucunement modifié leurs pratiques suite à l'entrée en vigueur de la loi Egalim », estime l'avocat qui espère « un signal fort » du tribunal, premier à statuer, selon lui, sur l'application de l'article L442-7. La situation de son client « qui n'a d'autre choix que d'accepter ces prix non-rémunérateurs » s'il veut vendre son vin, « est celle de très nombreux vignerons du Médoc » et d'autres secteurs du vignoble bordelais en crise, qui n'oseraient pas agir en justice par crainte de représailles, assure-t-il.

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Sollicités par l'AFP avant l'audience pour des commentaires, les avocats des négociants, dont le chiffre d'affaire a avoisiné 100 millions d'euros en 2022, n'ont pas donné suite.

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Commentaires 2
à écrit le 11/01/2024 à 6:19
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Je ne sais qui se gave mais le vin est devenu trop cher et de moins en moins de bonne qualité. Les foires aux vins sont devenues la valse des prix. On trouve plus de piquette que de bon vin. Pour ma part le bordelais ne fait plus gustatif trop publi...

à écrit le 10/01/2024 à 23:13
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L'erreur, c'est d'inclure le vin dans la loi Egalim. Le vin n'est pas un élément essentiel de l'alimentation...tout comme le Coca cola...ou l"eau en bouteille.

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