Ukraine : les coopératives agricoles Euralis et Maïsadour dans le cyclone russe

Les groupes coopératifs Euralis et Maïsadour ont vu leurs activités en Ukraine et Russie littéralement disparaître sous le manteau de la guerre déclenchée par Moscou. Maïsadour précise néanmoins que son activité vient de partiellement redémarrer. Ces plaines agricoles à la terre d'une richesse inégalée pour les céréales étaient un relais de croissance majeur depuis les années 2000 pour ces deux groupes du Sud-Ouest. (Réactualisé 25/03/2022 à 14h26 : MAS Seeds relance une activité partielle).
Depuis 2018, le groupe Maïsadour avait installé sa nouvelle filiale MAS Seeds près de l'aéroport de Kiev cible des bombardements russes depuis un mois.
Depuis 2018, le groupe Maïsadour avait installé sa nouvelle filiale MAS Seeds près de l'aéroport de Kiev cible des bombardements russes depuis un mois. (Crédits : GLEB GARANICH)

Nouvel eldorado pour le développement et la vente de semences depuis la moitié des années 2000, l'Ukraine et la Russie sont désormais plongées dans un cauchemar apparemment sans issue. Les deux pays, qui se partagent le plus grand bassin céréalier du monde, principalement situé dans l'est ukrainien, mais aussi au sud-ouest de la Russie, représentent notamment 30 % de la production mondiale de blé, mais produisent aussi beaucoup d'orge, de maïs et de tournesol. Cette région à la terre noire ultra productive ne pouvait qu'attirer de grands opérateurs français.

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Parmi eux : deux solides groupes agricoles coopératifs de l'ex-Aquitaine que sont Euralis, à Pau, et Maïsadour, à Haut-Mauco (Landes). Producteurs de semences, mais aussi de céréales pour l'alimentation de leurs élevages de canards, poulets et oies, Euralis et Maïsadour, qui génèrent respectivement 1,4 et 1,2 milliard d'euros de chiffre d'affaires, avec près de 5.000 salariés chacun, ont investi dans cette Europe orientale qui vient de s'embraser.

D'importants investissements dans une zone agricole majeure

Aucun des deux groupes ne souhaite communiquer directement sur la situation actuelle mais Maïsadour a accepté de lever un petit coin du voile sur les premiers effets de l'invasion russe. Présent en Ukraine depuis 2007, Maïsadour a investi une vingtaine de millions d'euros dans ce pays dans les années 2000 pour y développer la production de semences, en particulier de maïs et de tournesol. Le groupe a réalisé une grande implantation agricole à Dniepropetrovsk -rebaptisé depuis du nom ukrainien de Dnipro- à 400 kilomètres au sud-est de Kiev. Un secteur récemment bombardé (le 15 mars) par Moscou qui a détruit l'aéroport civil de la ville.

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En 2018, Maïsadour avait inauguré les nouveaux locaux de sa nouvelle filiale MAS Seeds (ex-Maïsadour Semences), dans une zone agricole proche de l'aéroport de Kiev. Jusqu'à récemment, la filiale semences du groupe coopératif en Ukraine réalisait près de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires. Dans ce pays, MAS Seeds disposait jusqu'ici d'un centre de recherche et développement consacré à la création de semences hybrides (maïs...) offrant des rendements élevés ainsi qu'une forte résistance au stress hydrique.

Des installations noyées dans le brouillard de la guerre

"A la suite de l'entrée en guerre de la Russie contre l'Ukraine, la situation est très critique pour les filières agricoles et plus particulièrement à court terme pour les filières semences, opérateurs et producteur français et européens. MAS Seeds, la filiale semences du groupe coopératif Maïsadour est présente historiquement en Ukraine et en Russie depuis 15 ans, où elle emploie 250 salariés. Maïsadour a mis en place une cellule de crise qui travaille au quotidien avec les équipes sur place pour ajuster ses plans en fonction de l'évolution du contexte", faisait savoir il y a quelques jours la direction du groupe.

MAS Seeds emploie 180 salariés en Ukraine et donc 70 en Russie. Sa plus grande implantation est ukrainienne. Elle compte, en plus du centre de recherche et développement, une unité de production industrielle, une autre de production en plein champs (à Dnipro) et des structures commerciales, qui rayonnent localement puisque la production locale est revendue en Ukraine, Russie voire Moldavie.

Avec l'extension des hostilités, l'usine de MAS Seeds en Ukraine a dans un premier temps été mise à l'arrêt et ses salariés expatriés ramenés en France avec leurs familles. Le groupe coopératif landais tient néanmoins à préciser qu'il a relancé depuis trois jours (22 mars) une activité partielle en Ukraine pour assurer un minimum de production céréalières alors que les semis de printemps vont se faire dans moins d'un mois.

"Un dispositif d'accueil pour les salariés et leurs familles qui souhaitent quitter l'Ukraine se met en place" précise par ailleurs le groupe coopératif landais présidé par Michel Prugue.

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Une filière avicole qui n'en finit plus de souffrir

La nouvelle crise géopolitique secoue toute l'Europe et au-delà et il est compréhensible que les groupes coopératifs agricoles de l'ex-Aquitaine aient du mal à s'exprimer. Car ils appartiennent à un pôle économique ultra exposé. Depuis 2020 ils ont dû encaisser la crise due à la pandémie de Covid-19, avec la fermeture des restaurants, puis le choc de reprise en sortie de confinement, avec le renchérissement des prix des matières premières, qui a été suivi en janvier et février dernier par un nouvel épisode dévastateur d'épizootie aviaire.

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A peine sortis de ce nouveau choc, les voilà mis sous les feux de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, avec la mise sous très forte pression de leurs marchés et outils de production en Europe orientale. Le choc est tellement intense et si étendu dans les filières que la Confédération française de l'aviculture (CFA) a, le 15 mars dernier, à nouveau tiré la sonnette d'alarme pour mobiliser le gouvernement sur la question.

"Le prix des matières premières en constante augmentation entraine une hausse du coût de l'alimentation des animaux depuis maintenant dix-sept mois consécutifs. Ce poste à lui seul représente déjà 65 % du coût de production d'une volaille. Sur cette période, l'aliment a pris en moyenne 40 %. Les autres charges se sont aussi envolées : l'électricité, le gaz, le GNR (gazole non routier), mais aussi les engrais, ainsi que le coût des bâtiments et de la main d'oeuvre", prévient en substance la CFA.

La confédération estime qu'avec l'impact de la guerre en Ukraine le renchérissement du coût de l'aliment pour les animaux d'élevage devrait être de +44,7 % d'ici le mois de juin.

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Commentaire 1
à écrit le 26/03/2022 à 10:36
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Maîsadour c'est celui qui profite des abattages en masse des canards et autres du fait de grippe aviaire bien souvent imaginaire obligeant les petits exploitants qui font bien souvent de la meilleure qualité à mettre la clé sous la porte. Plus diffic...

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