Getrag Ford Transmissions (GFT) : l’horizon de la coentreprise de Ford et Magna se voile

Coentreprise commune aux groupes Ford et Magna, Getrag Ford Transmissions (GFT), qui dispose d’une usine à Blanquefort (Gironde), n’est pas la joint-venture la plus rentable de ces deux entités. Au point que Magna a déprécié pour 59 M$ d'actifs dans cette filiale l’an dernier. En Gironde GFT appuie son activité sur un projet encore récent, la fabrication de boîtes de vitesses MX65. (Réactualisé 15/03/2019 -extrait du rapport joint)
Entrée de Getrag à Blanquefort.

Minoritaire dans cette entreprise de Blanquefort, la CGT ne pourra pas, comme elle le souhaitait, déclencher un droit d'alerte à Getrag Ford Transmissions (GFT), qui est spécialisée dans la fabrication de boîtes de vitesses manuelles. GFT emploie au total (tous statuts confondus) près de 1.220 salariés, chiffre qui peut varier d'un mois sur l'autre. Cette filiale du groupe Getrag, à Cologne, est depuis 2015 une coentreprise commune aux groupes Magna (Canada), arrivé cette année-là, et Ford, qui était déjà au capital.

Alors qu'à Blanquefort Ford Aquitaine Industries (FAI), à quelques centaines de mètres, spécialisée dans le fabrication de boîtes de vitesses automatiques, va fermer en août, GFT a décroché fin 2014 la fabrication de la boîte de vitesses manuelles MX65 (pour les Ford Fiesta), lancée au printemps 2017. Avec le départ annoncé de FAI, l'inquiétude des salariés de GFT a pourtant fait un bond en avant. Et elle continue de monter crescendo. C'est ainsi que le syndicat CGT de GFT veut alerter sur la dégradation de la situation financière de Getrag Ford Transmissions.

Un équipementier auto super lourd

Contrairement à Ford Aquitaine Industries, le site blanquefortais de Getrag Ford Transmissions n'est juridiquement qu'une succursale de droit allemand, qui ne déclare aucun chiffre d'affaires, ni résultat net. Les informations établissant la mauvaise santé financière de GFT en 2017 divulguées par le syndicat CGT viennent donc du siège du groupe à Cologne, dans un secteur d'activité dominé par le puissant syndicat allemand IG Metal.

Ces observations sont corroborées de façon partielle mais significative par le rapport d'activité 2018 du groupe Magna, qui est coté en bourse et dont le siège se trouve à Aurora (Ontario). Equipementier automobile leader au plan mondial, Magna pèse très lourd, avec un chiffre d'affaires de 40,8 Md$ en 2018, à +12 %, un résultat net de 2,3 Md$ (+4,3 %) et 168.000 salariés. Dans son rapport annuel 2018, Magna, qui analyse son chiffre d'affaires de façon transversale, par segment d'activité, annonce ainsi une dépréciation d'actifs (1) d'un montant de 59 M$ au titre de l'exercice, concernant sa participation consolidée au capital de Getrag Ford Transmissions.

Magna dubitatif sur les boîtes manuelles

Vu la taille de Magna, cette dépréciation de GFT peut paraître anecdotique. Mais il faut la ramener à son contexte initial, à son marché, pour mieux comprendre les enjeux. Et, sur ce plan, l'analyse du groupe canadien est sans ambiguïté. Selon Magna, cette dépréciation reflète en substance le déclin attendu des volumes de production pour les transmissions manuelles dans l'industrie automobile, qui représente l'essentiel des productions de la coentreprise Getrag Ford Transmissions. Cette coentreprise s'étend sur une vingtaine de sites, dont certains en Chine. Dans son communiqué en forme de sonnette d'alarme, le syndicat CGT de GFT Blanquefort cite plusieurs chiffres chocs.

"Accumulation de pertes financières lourdes : 54 M€ en 2017, soit plus de la moitié du capital social (95 M€), 28 M€ attendus pour 2018, soit en cumul quelque 82 M€ de pertes sur deux exercices, venant consommer 86 % du capital social. Usine mono client : 100 % de notre production vendue à Ford (...) Discussions entre Magna et Ford au sujet du groupe GFT : Magna rachèterait Bordeaux et Kechnec, Ford garderait Halewood et Cologne", égrène notamment le communiqué.

Les cégétistes de GFT veulent être rassurés

Il semble désormais acquis que le groupe Ford rétrocède contre 1 euro symbolique le foncier de FAI aux collectivités. Dans l'hypothèse où le site girondin de GFT Bordeaux serait racheté par Magna, Ford cèderait les terrains restants (ceux de Getrag et ceux compris entre FAI et Getrag), ainsi que les installations communes (traitement des eaux, etc.) à Magna. Comme cela a déjà été évoqué par ailleurs, la CGT souligne que le groupe Punch, repreneur déclaré mais malchanceux de l'usine FAI, serait aussi sur les rangs pour reprendre le site de GFT. Sachant que, toujours selon la CGT, Magna aurait averti que si cette usine girondine ne fait pas de bénéfices d'ici 2021 soit elle sera fermée, soit elle sera vendue.

Les changements "brutaux" de managers, avec en particulier le surprenant départ de Christophe Baptiste, directeur de l'usine à l'origine de l'obtention de la fabrication de la boîte de vitesses MX65, donnent selon ce syndicat le ton.

"Nous avons alerté les élus et les responsables, de la mairie de Blanquefort jusqu'au ministère de l'Economie et des Finances, mais jusqu'ici personne ne nous a répondu. Tout ce que nous voulons c'est avoir des informations. Si tout va bien et qu'il n'y a pas besoin d'une procédure d'alerte, alors tant mieux !", déroule l'élu CGT Vincent Teyssoneau.

Nul doute que ce dossier va évoluer dans les prochaines semaines, sous l'influence du départ de Ford.

(1) Extrait du rapport de Magna. "During the fourth quarter of 2018, we recorded an impairment charge of $60 million ($59 million after tax) on our equity-accounted investment in Getrag Ford Transmission GmbH in Power & Vision. The impairment reflects the expected further industry volume decline in manual transmissions, which make up substantially all of the volume production in the joint venture."

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