![Régaz Bordeaux a basculé à la semaine de quatre jours depuis 1996.](https://static.latribune.fr/full_width/2241864/regaz-bordeaux.jpg)
Après le développement accéléré du télétravail depuis la pandémie de Covid 19, les entreprises s'intéressent désormais à la semaine de quatre jours. L'entreprise bordelaise U'rself, spécialisée dans la publicité sur lieux de vente, s'est ainsi lancée début septembre. Son directeur général et fondateur, Alexandre de Roumefort, dit avoir été inspiré par d'autres entreprises tout en étant déterminé à favoriser le bien-être des équipes. La réduction de l'empreinte carbone est aussi un argument qui pèse désormais en faveur de la semaine à quatre jours, en limitant les trajets domicile-travail.
Regaz, sur 4 jours à 35h depuis 1996
Loin de la réflexion sur la décarbonation, Régaz Bordeaux fait figure de précurseur quand elle se lance dès 1996 !
« À l'époque, l'initiative est portée par le maire de Bordeaux, Alain Juppé, dont nous dépendions, qui est aussi alors Premier ministre. La proposition de tester la semaine de quatre jours intervient dans le contexte de la loi Robien qui donne la possibilité aux entreprises de réduire le temps de travail, deux ans avant la loi Aubry qui fixe la durée légale du travail à 35 heures. Il est probable que cette expérimentation ait constitué une vitrine politique », avance Magalie Poinsu, directrice de la RSE, de la communication et des relations extérieurs chez Régaz qui gère la distribution publique de gaz naturel sur 46 communes en Gironde.
Il reste que l'entreprise n'est jamais revenue en arrière. En pratique, l'entreprise a opté pour la mise en place d'un jour « off » tournant de manière à assurer un service continu. L'embauche se fait plus tôt le matin et la pause méridienne est raccourcie. « L'organisation de type industrielle facilite la mise en place de la semaine à quatre jours », reconnait Magalie Poinsu.
Bilan ? « Le dispositif a fait ses preuves. Les collaborateurs ont du temps pour s'investir dans des associations, du sport. Pour les jeunes, cela fait désormais partie des critères de choix à l'embauche. Enfin, il semble que cela joue sur la baisse des demandes de temps partiel. Sur près de 270 salariés, nous n'avons qu'un temps partiel », avance Magalie Poinsu. Ce changement n'a en revanche pas eu d'effet sur la réduction du temps de travail. Les collaborateurs de Régaz travaillent 35 heures par semaine mais concentrées sur 4 jours.
Voltaire baisse le temps de travail en maintenant la productivité
A contrario, Voltaire Group, à Bidart dans les Pyrénées Atlantiques, est passé à la semaine de quatre jours tout en réduisant le temps de travail à 32h.
« Si nous étions restés à 35 heures, il n'y aurait pas eu de réflexion sur la productivité et la performance. Cela aurait simplement été un changement organisationnel. En ce qui nous concerne, le challenge consistait à réaliser des gains de productivité sur une période assez courte, en l'occurrence six mois de tests », explique Brice Goguet, dirigeant et fondateur du groupe Voltaire, spécialisé dans la fabrication de selles pour chevaux.
C'est Brice Goguet lui-même qui a lancé l'idée en juin 2022 tout en fixant un cadre :
« 4 / 100 / 100 pour 4 jours de travail, 100 % de salaires et 100 % de résultat. L'objectif était aussi que nos clients ne voient pas la différence. »
Avant de tester le dispositif en janvier 2023, une préparation de quatre mois a servi à définir, par équipe, le 100 % de résultat et à mettre au point des indicateurs de suivi pour être capable de mesurer la performance. Il y a aussi eu un gros travail sur les sujets perte de temps. « Nous organisons moins de réunions, les réunions sont moins longues et mieux structurées avec des minuteurs qui annoncent la fin. Les collaborateurs dressent par ailleurs des drapeaux quand ils ne souhaitent pas être dérangés. Il n'y a pas moins de pause café, les collaborateurs ne sont pas plus stressés. Simplement on arrête de perdre du temps sur certains sujets », explique Brice Goguet. À titre d'exemple, beaucoup d'étapes ont par ailleurs été automatisées au sein du service client tandis que dans l'atelier, l'ergonomie a été redessinée, les flux réorganisés. « En production, les résultats n'ont pas été atteints dès le premier mois, mais ils ont ensuite été atteints et dépassés. »
« Pour se lancer dans un tel projet, la volonté du dirigeant est nécessaire mais pas suffisante. Il faut impliquer tout le monde comme toute conduite du changement. Il faut aussi une certaine exigence. Sans résultat nous n'aurions pas poursuivi », reconnait Brice Goguet. La semaine à quatre jours est désormais actée et sera progressivement proposée à l'ensemble du groupe qui compte 200 personnes.
Wikicampers se réorganise en deux temps
Non loin de là, à Bidart, Wikicampers spécialisée dans la location de camping-cars, vans et fourgons aménagés entre particuliers a également franchi le pas, mais en deux temps. Cette entreprise qui emploie 37 collaborateurs est d'abord passée à la semaine de 4,5 jours sur 35 heures de janvier à mars 2023. « C'était assez simple à réaliser mais cela nous a permis de voir les bénéfices au sein de l'équipe avec plus de temps personnel et une première amélioration de l'équilibre vie pro vie personnelle », explique Eloïse Mourat, responsable RH chez Wikicampers.
Puis dès avril, Wikicampers a basculé à quatre jours pour 32 heures de travail sans toucher au salaire avec un double enjeu de bien-être et de maintien de la productivité. Une commission interne de suivi a été créée pour proposer des améliorations et faire en sorte que cela fonctionne. Une formation élaborée en interne est notamment dispensée aux salariés par petits groupes. Bilan, après six mois d'expérimentation, la direction a annoncé, le 18 septembre, l'officialisation de la semaine à quatre jours avec un système de rotation du jour chômé.
« Les résultats sont positifs selon les enquêtes que nous menons auprès de nos salariés : +24 % pour le bien-être en général, + 21% pour l'énergie au travail. Notre niveau d'activité a augmenté et nous avons dépassé nos objectifs ! Nous n'avons pas sacrifié les moments en équipe. En revanche nous sommes très friands d'outils digitaux qui nous font gagner du temps », souligne Eloïse Mourat.
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