Ford Aquitaine Industries : tout est fini, Ford refuse la reprise de l'usine

Par Mikaël Lozano et Jean-Philippe Déjean  |   |  760  mots
La mobilisation des syndicats n'aura pas suffi à faire plier Ford Motor Company (Crédits : Agence Appa)
Ce jeudi 13 décembre était l'une des dates possibles pour la réponse du groupe Ford au projet de reprise de l'usine de Ford Aquitaine Industries (FAI) à Blanquefort (Gironde). Comme le craignaient de nombreux syndicalistes et comme, semble-t-il, le constructeur automobile l'avait laissé entendre ces derniers jours : pas question pour lui d'accepter une reprise de l'usine girondine. Il a éconduit le seul repreneur en lice, le groupe belge Punch. L'arrêt de la production du site (plus de 800 emplois) est programmée pour fin août 2019.

Cela ressemble fort à l'épilogue d'une longue bataille. Ford a annoncé en comité d'entreprise, ce jeudi après-midi, repousser le dossier de reprise du groupe belge Punch pour sa filiale Ford Aquitaine Industries de Blanquefort (plus de 800 salariés), qui fabrique des boîtes de vitesses automatiques. Décision confirmée dans un communiqué :

"Ford Aquitaine Industries (FAI) a informé, ce jour, son comité d'entreprise avoir décidé de ne pas donner de suite favorable à la vente du site de FAI à l'acquéreur potentiel ayant manifesté le plus grand intérêt pour la reprise. Malgré les discussions rigoureuses et approfondies des neuf derniers mois, et les meilleurs efforts fournis par chacune des parties, le plan proposé par le repreneur potentiel présente des risques significatifs. Nous ne croyons pas que les plans de l'acquéreur potentiel offrent le niveau de sécurité et de protection, ou limitent le risque de possibles pertes d'emploi futures, que nous souhaitons pour les salariés de FAI."

Plus loin, le groupe américain précise :

"L'arrêt de production sur le site est prévu fin Août 2019 et FAI s'est engagée à ne prononcer aucun départ contraint avant Septembre 2019. Cela permet aux salariés de FAI d'analyser leurs options tout en bénéficiant d'une sécurité financière. FAI a présenté un plan social complet qui comprend notamment un congé de reclassement d'une durée étendue à compter d'octobre 2019, un plan de cessation anticipée d'activité très favorable, un redéploiement chez GFT (l'usine voisine de FAI, NDLR), ainsi que d'autres mesures destinées à aider les salariés à se tourner vers d'autres employeurs ou à poursuivre d'autres opportunités de carrière, qu'il s'agisse de créations d'entreprise ou de formations de reconversion."

Cette décision condamne de fait le site girondin au plan social et condamne l'usine. Le coup de massue est terrible. L'intersyndicale, Punch et l'Etat avaient pourtant réussi à trouver un accord, mardi 11 décembre. Tous avaient fait des concessions : les représentants de l'intersyndicale en acceptant un gel des salaires pendant trois ans, la perte de trois jours de RTT (réduction du temps de travail), ainsi que trois mois de modulation du temps de travail. Et Punch, avec l'interdiction de faire remonter des dividendes pendant les cinq premières années d'activité et jusqu'à ce que la société soit à l'équilibre, et aucun licenciement économique pendant les cinq premières années également.

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Cet accord de principe, Ford Motor Compagny, qui a réalisé un bénéfice net de 7,6 milliards de dollars l'an dernier, l'a donc balayé aujourd'hui. Depuis le début, Ford semble avoir privilégié l'option d'un plan de sauvegarde de l'emploi en cohérence avec sa volonté de fermer l'usine d'ici septembre 2019. PSE déjà lancé. Mais officiellement, le groupe de Detroit cherchait en parallèle un repreneur. Le groupe Punch Powerglide, spécialiste de la fabrication de boîtes de vitesses automatiques pour l'automobile, s'était manifesté. Il proposait de reprendre 400 salariés sur l'effectif actuel. Comme de nombreux salariés peuvent prétendre partir en pré-retraite, cette solution convenait à l'intersyndicale.

"Nous sommes engagés depuis plusieurs mois dans des discussions rigoureuses et détaillées avec un acquéreur potentiel qui a agi de bonne foi et de façon constructive pendant tout le cours de ces discussions, avec le soutien du gouvernement français. Néanmoins, comparé à un plan social Ford très complet, nous ne pensons pas que le plan de l'acquéreur potentiel offre le niveau de sécurité et de protection requis ou limite le risque futur de suppression d'emplois", avait officiellement réagi le 18 octobre Ford Motor Company, laissant déjà planer peu d'espoir.

En cas de reprise, le groupe américain aurait dû payer les départs en pré-retraite mais également abonder un fonds pour financer la reprise de l'usine et s'engager à accompagner le repreneur. Sachant que l'Etat et les collectivités avaient décidé d'apporter de leur côté 15 M€.

"Depuis que nous avons initié le processus d'information consultation en juin 2018, notre priorité a été de trouver un repreneur fiable pour le site de FAI et nous sommes également déçus de ne pas y être parvenu", indique également Ford dans son communiqué. "Déçu" : pas sûr que les 400 salariés qui ne peuvent pas bénéficier d'un départ en pré-retraite utilisent le même terme.