Altica, basé à la Teste-de-Buch, est un groupe hôtelier composé de 10 hôtels deux étoiles, présent sur l'ensemble de la Nouvelle Aquitaine, de La Rochelle à Pau en passant par Bordeaux et la Côte Basque. Pas du genre à manifester dans les rues comme elle l'explique dans un courrier adressé à Guillaume Pepy, PDG de la SNCF :
"Nous, professionnels de l'industrie hôtelière, n'ayant pas l'habitude des manifestations, piquets de grèves et blocages en tout genre, en profitons pour travailler et vous écrire ces quelques lignes ... un comble en ce mois de jours fériés et de repos à l'occasion des ponts de l'Ascension et la Pentecôte."
Dans sa missive, sur un ton mi-humoristique mi-sarcastique, le groupe hôtelier ne tourne pas autour du pot :
"Qui mieux que la SNCF pour apporter une solution à ce problème que vous connaissez ô combien, celui de la grève des cheminots, qui n'en finit plus... ! Pourquoi nous adresser à vous me direz-vous ? Eh bien... on s'est dit qu'un petit geste de votre part serait le bienvenu, donnant une image plus positive de votre communication. Car, à défaut de communiquer (navrés mais on ne vous entend pas beaucoup), pourquoi ne pas mettre la main au porte-monnaie ? Comme un matelot pris dans la tempête, nous naviguons à vue et l'incertitude de la durée de cette grève nous oblige à nous tourner vers vous. Nous avons également envisagé de faire grève/ ne pas venir travailler/ ne pas payer nos fournisseurs mais... rapidement la réalité nous a rattrapé et on a abandonné l'idée ! C'est incroyable comme il existe en France des secteurs d'activités privilégiés, vous ne trouvez pas ?"
Altica sort la calculette
Le groupe hôtelier se dit "philosophe et optimiste : nous souhaitons une issue glorieuse et profitable à ce mouvement syndical". Mais il déroule aussi les pertes occasionnées par le mouvement :
"Nous concernant, nous avons perdu un tiers de notre chiffre d'affaire à période égale (vs avril 2017). Nous avons donc pensé, vu le choc économique, à vous adresser la facture. Une grande entreprise comme la vôtre doit assurer un service public de qualité et ses dégâts collatéraux, lorsqu'il y en a. Vos collaborateurs ont engagé la responsabilité de la SNCF dans ce suicide économique qui va coûter très cher à votre entreprise, à l'économie française et aux chefs d'entreprises des PME/PMI dont nous faisons partie. Sept de nos hôtels (Bordeaux Mérignac, Bordeaux Floirac, Bordeaux Villenave-d'Ornon, port d'Arcachon, La Teste Sud, Anglet et La Rochelle) [...] ont été très sévèrement touchés par cette grève, étant stratégiquement situés sur l'axe et la ligne SNCF que vous connaissez parfaitement : Paris - Bordeaux - Hendaye."
Altica dit avoir fait plancher ses services comptables et contrôle de gestion, qui ont "déterminé avec précision l'impact financier du coût de la grève qui dure depuis le 3 avril et semble ne pas vouloir se terminer". Il s'élève à 52 816.61 euros TTC. La facture correspondante a été envoyée directement à Guillaume Pepy, à qui Altica demande de s'en acquitter "dès réception, faute de quoi, nous nous verrions dans l'obligation d'appliquer des pénalités de retard avec taux d'intérêt légal en vigueur. Celle de juin suivra et bien sûr juillet si cette grève devait se prolonger." Suit un message d'alerte :
"Les hôteliers, restaurateurs et acteurs du tourisme n'ont pas pour réputation d'être très vindicatifs contrairement à d'autres, mais les conséquences dramatiques de vos grévistes pourraient peut-être les réveiller et éveiller les consciences."
Coup de com, pour alerter sur les difficultés du monde hôtelier, mais pas coup de bluff : Altica précise que le courrier sera bien acheminé jusqu'à Guillaume Pepy. Il espère d'ailleurs une réponse. Même s'il est peu probable que Guillaume Pepy intervienne en sa faveur...