LGV au sud de Bordeaux : le Conseil d'Etat confirme la déclaration d'utilité publique

Par Pierre Cheminade  |   |  760  mots
Le Conseil d'Etat a rejeté les recours contre la déclaration d'utilité publique des lignes à grande vitesse au sud de Bordeaux vers Toulouse et Dax.
Le Conseil d'Etat a rejeté, mercredi 11 avril, les recours déposés contre la déclaration d'utilité publique des lignes à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax. Une décision saluée par la mairie de Bordeaux et qui sonne comme une défaite pour les opposants au projet, dont les écologistes. Le lancement des travaux n'est cependant pas pour demain.

C'est une validation claire et nette, sur la forme comme sur le fond. Dans une décision rendue ce mercredi, le Conseil d'Etat a suivi la position du rapporteur public en rejetant les recours déposés contre le décret du 2 juin 2016 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de réalisation des lignes ferroviaires à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax. Ces recours avaient été déposés à l'été 2016 par 52 riverains de ces deux projets ferroviaires dont 13 communes, 3 intercommunalités, 16 associations de défense de l'environnement, 15 syndicats professionnels viticoles et 5 particuliers. Les requérants critiquaient notamment l'incertitude financière et la faiblesse de l'évaluation économique et sociale du projet et de son étude d'impact, en particulier sur les sites Natura 2000, les zones humides et les terres agricoles et viticoles

"Un projet d'intérêt public pour l'aménagement du territoire"

Des arguments qui n'ont pas été retenus par la justice administrative. En effet, le Conseil "juge que la procédure suivie a été régulière et écarte notamment les critiques fondées sur l'insuffisance de l'évaluation économique et sociale du projet ainsi que sur celle de l'étude d'impact." Il ajoute que l'enquête publique "s'est déroulée dans des conditions régulières".

En outre, sur le fond, la décision "écarte les critiques mettant en cause l'utilité publique du projet de LGV" et réaffirme "l'intérêt public de ce projet pour l'aménagement du territoire". Par conséquent, les expropriations envisagées, les coûts et les atteintes à la propriété privée sont jugés "nécessaires". Enfin, les propositions alternatives à ces deux LGV, fondées sur une rénovation des lignes existantes, sont également écartées par le Conseil d'Etat qui considère qu'elles "ne présentent pas des avantages comparables aux lignes projetées".

Deux poids, deux mesures ?

C'est donc une défaite sur toute la ligne pour les opposants à ces deux projets, au premier rang desquels figurent les groupes écologistes EELV à Bordeaux Métropole et au conseil régional de Nouvelle-Aquitaine. En décembre dernier, ces derniers se montraient pourtant confiants quant à l'issue de la procédure. Ils avaient d'ailleurs gagné une première manche en juin 2017 quand le tribunal administratif de Bordeaux avait annulé la déclaration d'utilité publique des aménagements devant être réalisés au sud de Bordeaux. Il faut dire que le Conseil d'Etat a pris, sur la question du financement du projet, l'exact contre-pied de sa précédente décision sur la ligne Poitiers-Limoges d'avril 2016 laissant planer un sentiment de deux poids, deux mesures. "C'est une décision décevante parce qu'il y a une contradiction évidente dans la décision du Conseil d'Etat. Mais les enjeux ne sont pas de même ampleur et le lobbying politique non plus", réagit Pierre Hurmic, le leader bordelais des Verts. "Cependant nous restons optimiste, il ne s'agit que d'un feu vert formel qui ne déclenche pas le démarrage du chantier."

A l'inverse, Alain Juppé, le maire de Bordeaux et président de la Métropole, n'a pas tardé à se féliciter de la décision du Conseil d'Etat. "La Haute juridiction a ainsi reconnu non seulement la régularité de la procédure, mais également la validité de l'évaluation socio-économique du projet et son importance pour le développement du grand Sud-Ouest", a salué la mairie de Bordeaux. La Région Nouvelle-Aquitaine s'est aussi réjouit de cette décision "qui reconnaît l'importance du grand projet ferroviaire du Sud-Ouest" et estime que "plus rien ne s'oppose désormais à la réalisation des lignes nouvelles". De même, les élus socialistes des Landes se félicitent également que "le Conseil d'Etat légitime la LGV au sud de Bordeaux" et demandent au gouvernement "d'inscrire prioritairement cette LGV dans la prochaine loi d'orientation des mobilités en maintenant sa réalisation en 2027".

Une réalisation qui reste incertaine

Car en effet, malgré le rejet de ces recours, la réalisation de ces deux nouvelles infrastructures, très coûteuses, reste loin d'être acquise. En février dernier, le rapport Duron, qui servira de base à la future loi de programmation des mobilités, a bien retenu la LGV Bordeaux-Toulouse - avec un phasage Toulouse-Agen pour 2028-2032 puis Bordeaux-Agen pour 2033-2037 - mais a repoussé la réalisation éventuelle de l'axe Bordeaux-Dax à l'après 2038. Les élus du Sud-Ouest étaient aussitôt montés à Paris protester auprès du Premier ministre qui rendra ses arbitrages dans les prochaines semaines.