Bordeaux Métropole : quand le RER métropolitain dérape sur le grand contournement

Lors du dernier conseil de Bordeaux Métropole le projet de télécabine au-dessus de la Garonne, qui vient de faire l'objet d'une consultation publique, a été passé au feu de la critique politique des élus de l'opposition de droite et du centre. La surprise est venue d'un dossier consensuel, celui du RER Métropolitain, quand Alain Anziani, président de la Métropole, a réincorporé l'idée d'un grand contournement routier dans sa recette anti-bouchons. Suggestion qui a provoqué la colère de son allié écologiste, le maire de Bordeaux Pierre Hurmic.
Alain Anziani, le président (PS) de Bordeaux Métropole.
Alain Anziani, le président (PS) de Bordeaux Métropole. (Crédits : Agence Appa)

Le bilan de la concertation sur la création d'une nouvelle ligne de transport en commun par télécabine (ou téléphérique...) entre les rives gauche et droite de Bordeaux Métropole a provoqué toute une série d'accrochages entre forces de droite et de gauche lors du dernier conseil de Bordeaux Métropole, ce vendredi 31 mars. D'autant plus, semble-t-il, que cette concertation, qui a eu lieu du 28 novembre 2022 au 13 février dernier, a suscité l'intérêt du public.

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Maire de Lormont, vice-président de la Métropole en charge de la valorisation du fleuve, des franchissements et du rééquilibrage de la rive droite, Jean Touzeau, promoteur de ce projet, a souligné qu'en fonction des technologies utilisées il existe plus de 80 villes dans le monde qui utilisent ce type de transport afin « de surmonter les coupures urbaines ». Ces projets utilisant l'électricité sont jugés par la majorité faciles à déployer, fiables quant au temps de transport annoncé et très économes en matière de foncier, étant donné leur emprise réduite au sol.

Une concertation qui a eu du succès

L'élu s'est félicité de la présentation des tracés de ce projet, qui devrait -s'il va à son terme- relier d'ici 2028 les communes de Lormont ou Cenon (rive droite) au quartier Bacalan de Bordeaux Nord. Une télécabine qui devrait permettre de traverser la Garonne en sept à dix minutes, en fonction de la longueur des trajets étudiés, entre Lormont ou Cenon et le quartier Bacalan au nord de Bordeaux, et transporter 9.000 à 10.000 personnes par jour. Le tout pour un investissement de 50 à 80 millions d'euros (en fonction de la longueur du circuit retenu), jugé très raisonnable par Jean Touzeau. Mais la facture pourrait s'annoncer bien plus élevée.

Placé sous le contrôle de Marianne Azario, garante désignée par la CNDP (Commission nationale du débat public), qui assure en particulier que toutes les parties présentes ont exprimé leurs avis dans de bonnes conditions, cette commission a intéressé les habitants. C'est ainsi que 396 personnes se sont rendues aux réunions publiques et forums et que 2.588 contributions écrites ont été recueillies, dont 1.803 réponses au questionnaire en ligne. Une exposition présentant deux modèles de cabines a été visitée par plus de 17.000 personnes.

L'opposition juge que le projet n'est pas à la hauteur

Ce qui n'a pas empêché Christophe Duprat, maire de Saint-Aubin-du-Médoc, conseiller métropolitain d'opposition et ancien patron des transports collectifs de la Métropole, de tirer à boulets rouges sur la télécabine de Jean Touzeau. L'élu de la rive gauche a estimé que ce projet n'est pas à la hauteur des besoins de connexions entre rives gauche et droite, et que 50 à 80 millions d'euros ce ne sont pas de petites sommes. Comme d'autres élus, Christophe Duprat est favorable au développement d'une solution lourde pour traverser la Garonne, autrement dit un nouveau passage pour le tramway par le pont Chaban-Delmas.

Le fait que le pont doive se lever et stopper le trafic n'impressionne pas cet élu d'opposition : « ce ne sera pas pire qu'avec le téléphérique » a-t-il lâché. Ce besoin d'une nouvelle liaison lourde par tramway entre les deux rives a été mis en avant par plusieurs élus. Le pont de pierre, par où se font actuellement les liaisons tramway entre les deux rives, ayant des fragilités qui vont demander de plus en plus de maintenance. Des préoccupations qui conduisent à s'intéresser au potentiel du pont Chaban-Delmas.

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Le retour du grand contournement dans le RER Métropolitain

Le projet de RER Métropolitain poursuit lui son développement sans vrai problème. Pourtant la validation de sa feuille de route a provoqué un sérieux incident entre le président Anziani et son vice-président écologiste, le maire de Bordeaux Pierre Hurmic. Même si les impressions sont trompeuses, le dérapage a eu lieu au terme de ce qui ressemblait à ces échanges à bâtons rompus où une idée en amène une autre. Le RER Métropolitain va reformater le schéma des mobilités bien au-delà de la Métropole, puisque de nouvelles lignes au cadencement spécifique vont relier Bordeaux au Verdon-sur-Mer, mais aussi à Arcachon ou Libourne.

Et dans ce cadre, Alain Anziani a remis en avant la création de barreaux autoroutiers à l'est de la Métropole. S'il n'a pas parlé de grand contournement il l'a montré, soulignant que ces déviations étaient attendues aussi bien par les Périgourdins, les Corréziens que les Lot-et-Garonnais, sans parler des Girondins. Car même avec des moteurs électriques dans tous les véhicules, les bouchons ne disparaitront pas d'un coup de baguette magique a-t-il laissé entendre.

« L'État doit engager des études pour y voir clair », a insisté le président qui a soutenu le projet conjointement avec le maire de Libourne, Philippe Buisson, il y a quelques jours.

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Des barreaux autoroutiers toujours explosifs

Ce à quoi Pierre Hurmic a répondu, quelques minutes plus tard, que le RER Métropolitain est une vraie réponse pour en finir avec l'engorgement de la rocade. Mais il a ensuite fustigé l'idée de tout retour vers une stratégie de contournement routier de la Métropole, soulignant que l'État les a tous retoqués en France, parce qu'il a été condamné deux fois pour inaction climatique et qu'il n'a plus le choix. Pierre Hurmic a enfoncé le clou en disant que défendre cette idée de barreaux routiers est une position d'arrière-garde.

Son opinion étant que les camions présents sur l'autoroute entre Bordeaux et Biriatou, à la frontière espagnole, transportent essentiellement des produits alimentaires et que s'il y en a tant, c'est que la Métropole n'est pas suffisamment autonome. Qu'elle n'en produit pas assez pour éviter d'avoir à en faire transporter beaucoup. Mettant ainsi entre parenthèse le déferlement de la production espagnole de fruits et légumes après l'arrivée de ce pays le 1er janvier 1986 dans la Communauté économique européenne. De la  même façon, le maire de Bordeaux a pointé de l'index le transport par les camions espagnols de pièces automobiles...

« Ne soyons pas démagogue, le grand contournement ne se fera pas ! », a-t-il finalement lancé, exprimant une divergence de plus entre les partenaires socialistes et écologistes de la majorité après les dossiers des Girondins de Bordeaux, du stade Matmut Atlantique ou encore du développement de l'aéroport.

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