"Quelles sont les mesures pas trop difficiles et relativement rapides à mettre en œuvre pour fluidifier la rocade bordelaise ?", résume Alain Anziani, le président de Bordeaux Métropole. C'est à cette épineuse question qu'a dû répondre le groupe de travail lancé il y a un an conjointement par Bordeaux Métropole et par l'Etat, le propriétaire de l'infrastructure. Copiloté par deux élus métropolitains, Claude Mellier (majorité, PCF) et Thomas Cazenave (opposition, LREM), il a présenté ses arbitrages, ce mardi 27 septembre, en assumant de jouer autant sur les usages que sur l'infrastructure elle-même mais sans renverser la table non plus.
"La problématique de la rocade est majeure pour les habitants et les entreprises. Ce n'est pas un sujet nouveau mais la situation s'aggrave sans doute avec le temps. Nous actons des mesures mais il n'y a rien d'extrêmement spectaculaire parce qu'il n'y pas de grand soir de la mobilité ni de baguette magique", a ainsi cadré d'entrée Christophe Noël du Peyrat, le secrétaire général de la préfecture.
Dans le détail, les mesures annoncées s'articulent sur deux horizons : dès 2023 et l'après 2025.
Les changements attendus en 2023
Alors que la mise à 2x3 voies de toute la rocade s'achèvera en juin 2023 après 15 ans de travaux, d'autres évolutions interviendront d'ici là. La plus emblématique sera l'interdiction de doubler pour tous les poids-lourds de plus de 3,5 tonnes dans les deux sens sur les deux-tiers Nord-ouest (entre les échangeurs 1, Lormont, et 15, A63). Cette expérimentation d'au moins un an devrait débuter dès janvier 2023.
La synthèse des mesures retenues par l'Etat et Bordeaux Métropole. Cliquez sur l'image pour l'agrandir (crédits : Préfecture de Gironde).
Un mois plus tard, le 1er février 2023, une modulation horaire du prix des péages de l'A63 sera introduite pour les poids-lourds roulant en direction de Bordeaux. L'idée étant d'augmenter le tarif aux heures de pointe et de le diminuer lorsque le trafic est plus fluide. Le tout dans une fourchette maximale de +/- 30 %, soit entre 10 et 15 euros de plus ou de moins par trajet. "Nous discutons avec les transporteurs et les entreprises pour arriver à un surcoût à la fois abordable et dissuasif", note Alain Anziani. "Je ne crois pas à l'efficacité de cette mesure, une hausse de 30 % c'est insuffisant", répond aussitôt Patrick Bobet, son prédécesseur, aujourd'hui chef de file de l'opposition de droite.
Quant à la possibilité, souvent discutée, d'interdire la circulation des poids lourds à certaines heures en les retenant en amont de l'agglomération, elle a été retoquée. "Pour des raisons juridiques, financières et, surtout, opérationnelles, cette solution n'est pas praticable", ferme la préfecture de Gironde. Même verdict pour l'hypothèse d'un passage à 2x4 voies de la rocade en contrepartie d'un abaissement de la vitesse à 70 km/h. Enfin, une voie sera ajoutée entre les échangeurs 17 et 18 au niveau de Villenave-d'Ornon pour fluidifier les entrecroisements. Sa mise en service est prévue au printemps 2024.
Les changements attendus après 2025
Dans l'immédiat, il faudra donc se contenter de ces mesures ciblant les poids-lourds. Mais une autre série de mesures est annoncée pour l'après 2025 en raison des temps incompressibles d'études et de travaux. Il s'agit d'abord de faire circuler les transports en commun (bus et car métropolitains et régionaux) sur la bande d'arrêt d'urgence à l'Ouest entre les échangeurs 4A (State Matmut Atlantique) et 19 (A62) avec une limite de vitesse de 70 km/h et une priorité aux échangeurs. "Cela nécessite quelques années d'études et au moins deux ans de travaux et 20 millions d'euros, notamment pour le passage des ponts et pour équiper les échangeurs de feux d'accès", précise la préfecture. Rendez-vous en 2026/2027 donc.
Cette mesure fera écho au projet de voie réservée au covoiturage sur l'A10 au nord de Bordeaux. Discuté avec le concessionnaire Vinci Autoroutes, il devrait se déployer sur la voie de gauche et aboutir un peu plus tôt, a priori en 2025. Une expérimentation similaire est également à l'étude sur l'A62 en provenance de Toulouse. Objectif : assurer des gains de temps aux covoitureurs pour lutter contre le fléau de l'autosolisme alors que sur l'A10 Vinci compte en moyenne seulement 1,1 passager par véhicule.
Enfin, une passerelle cyclable sera ajoutée au pont François Mitterrand sur 700 mètres de long et 3 mètres de large au printemps 2026 tandis que l'échangeur 26 vers l'A10 devrait être réorganisé après 2027.
Un contournement autoroutier très discuté
Si l'antique projet de grand contournement autoroutier de l'agglomération bordelaise par l'Ouest ou par l'Est semble bel et bien enterré, une version alternative moins ambitieuse et moins nuisible est toujours dans les cartons.
"Je ne suis pas opposé à un barreau autoroutier entre Langon [sur l'A62] et Mussidan [sur l'A89] sur environ 80 km. Est-ce que c'est dans l'air du temps ? Je ne sais pas et cela pose beaucoup de questions environnementales mais on pourrait, par exemple, le réserver exclusivement aux poids-lourds", juge ainsi le socialiste Alain Anziani.
Un tel projet, ou au moins une étude sur sa faisabilité, serait soutenu par l'opposition de droite et du centre mais n'a pas les faveurs des alliés politiques du président qu'ils soient écologistes ou communistes. Tous deux préférant le développement du fret ferroviaire.
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