Bourse : « Il y a un attrait marqué pour les petites et moyennes valeurs plutôt que celles du CAC 40 » (Axel Champeil)

INTERVIEW. La Tribune revient avec Axel Champeil, PDG de la société financière bordelaise Champeil, également installée à Paris, sur le fort rebond des entrées d'entreprises en bourse en 2021. Même si elle se limite aux introductions d'HDF Energy et Berkem, l’année boursière restera très positive en Nouvelle-Aquitaine. Alors qu’une troisième introduction est en préparation, notre région représente seulement 5,2 % des 38 introductions en bourse totalisées en France en 2021. Ceci sur un total de 212 à Euronext, qui fédère en plus de Paris les bourses d’Amsterdam, Bruxelles, Dublin, Lisbonne, Milan et Oslo.
Les nouveaux investisseurs particulier sont très intéressés par les entreprises innovantes, technologiques. Parce qu'ils pensent que la technologie c'est l'avenir, souligne Axel Champeil.
"Les nouveaux investisseurs particulier sont très intéressés par les entreprises innovantes, technologiques. Parce qu'ils pensent que la technologie c'est l'avenir", souligne Axel Champeil. (Crédits : Société Champeil)

LA TRIBUNE - Après HDF Energy et Groupe Berkem l'an dernier, Aelis Farma se tourne à son tour vers Euronext. Comment expliquez-vous cette remontée en grâce de la bourse auprès des entreprises ?

Axel CHAMPEIL - Cette évolution est tout d'abord liée au retour des investisseurs particuliers en bourse. Leur nombre a augmenté de 40 % au cours des trois dernières années ! Il y a eu un point d'inflexion majeur dans ce domaine en 2019 avec le succès de l'introduction en bourse de la Française des Jeux, la FDJ. Arrivée sur le marché boursier qui a provoqué une forte accélération du retour des investisseurs individuels.

Un phénomène qui n'a fait que s'accélérer avec les périodes de confinement. Les particuliers ont alors investi davantage d'argent en bourse et particulièrement sur les petites et moyennes valeurs. Ce qui a rendu ce marché très liquide. Liquidité qui a fini par attirer l'attention des investisseurs institutionnels, qui se sont à leur tour penchés sur ces petites et moyennes valeurs. Ce qui est un phénomène assez nouveau.

Lire aussi 2 mnLa société financière Champeil prend le contrôle d'Aelian Finance

Dans quelle mesure le contexte économique général joue-t-il sur ce retour en grâce de la bourse auprès des particuliers ?

La faiblesse des taux d'intérêt conduit les investisseurs individuels à rechercher des rendements supplémentaires. Ce qui explique cet attrait marqué pour les petites et moyennes valeurs, plutôt que les entreprises du CAC 40. Les particuliers trouvent ces entreprises de taille moyenne plus proches d'eux. Etant prêts à prendre des risques, il s'éloignent des valeurs de fonds de portefeuille comme Total ou Air Liquide, qui relèvent d'une vision boursière « à la papa ». Ces particuliers recherchent des rendements élevés.

Vous parlez de placements boursiers « à la papa », y a-t-il un phénomène générationnel chez ces nouveaux investisseurs individuels ?

Oui, il est clair que ce sont des jeunes, qui n'entendent pas faire comme les plus anciens. Ils ont davantage tendance à passer par des courtiers ou des néo-courtiers que par les banques. Et ils sont très intéressés par les entreprises innovantes, technologiques. Parce qu'ils pensent que la technologie c'est l'avenir. C'est ce qui explique dans notre région le succès de l'introduction en bourse en 2021 de deux entreprises de ce type, installées à Blanquefort (Bordeaux Métropole). HDF Energy, qui veut devenir un grand acteur du marché de l'hydrogène. Et Berkem, entreprise innovante de taille intermédiaire centrée sur la chimie végétale, en croissance, qui a un fort potentiel de développement à l'international.

Lire aussi 7 mnPourquoi le premier candidat médicament d'Aelis Farma vaut près de 470 millions de dollars

Comment analysez-vous l'annonce de la prochaine entrée en bourse de la startup bordelaise Aelis Farma, qui développe des candidats médicaments pour soigner des maladies du cerveau ?

C'est un excellente nouvelle pour la Région et pour l'avancée de la science. Aelis Farma, qui dispose d'une équipe de scientifiques de très haut niveau, a de grandes ambitions dans la découverte de traitements des troubles cognitifs (trisomie 21) et l'argent levé dans le cadre de son entrée en bourse devrait l'aider à accélérer ses programmes de recherche.

Doit-on penser que la technologie et la santé sont l'avenir de la bourse ?

Comme je vous l'ai dit, plus il y a de liquidités en bourse, plus les investisseurs institutionnels sont intéressés et plus il y a de nouvelles sociétés qui entrent sur le marché boursier. Parce que la bourse reste un moyen pour les entreprises de trouver des liquidités. Le seul problème avec les entreprises technologiques, c'est que beaucoup d'entre elles ont un fort niveau de risque quant à la réussite de leur plan de développement, ce qui leur confère un profil spéculatif.

Lire aussi 4 mnChimie verte : avec son entrée en bourse à 45,9 millions d'euros Berkem passe à l'offensive

Cette équation du risque boursier technologique se retrouve-t-elle aussi en Nouvelle-Aquitaine, région où l'innovation reste très dynamique ?

Effectivement, la cote régionale est composée en majorité d'entreprises technologiques et de R&D, avec une forte volatilité de leur cours de bourse. Nous pouvons ainsi souligner d'excellentes performances boursières en 2021 à l'instar d'Immersion (185 %), à Bordeaux, ou Fermentalg (+114%), à Libourne (Gironde), qui ont entamé une tendance de revalorisation, après avoir connu de fortes sanctions boursières dans les premières années de cotation, ayant pris du retard sur leur plan de développement et la stabilisation de leur stratégie. A l'inverse, Implanet, à Martillac (Gironde) et Europlasma, à Morcenx (Landes) sont les lanternes rouges, impactées par le recours à des mécanismes de financement dilutifs pour les actionnaires, malgré la multiplication de bonnes nouvelles sur le plan de leur activité et de leurs projets.

Lire aussi 9 mnHydrogène de France vise 100 millions d'euros pour son entrée en Bourse

2022 c'est une nouvelle année qui démarre avec à la fois une dynamique économique post-confinement et des menaces de crise, notamment inflationniste. Vous êtes inquiet ?

Nous sommes globalement dans une tendance positive. Nous avons une économie en croissance, de l'investissement et de l'argent. La bourse devrait ainsi continuer à bénéficier d'afflux de liquidités. Les nouvelles provenant des entreprises devraient être de bonne facture bénéficiant de la croissance économique et des programmes d'investissements. Mais effectivement, ensuite il y a des risques. Sans parler de la montée des tensions géopolitiques entre la Russie, l'Europe occidentale et les Etats-Unis, la hausse des taux et le retour de l'inflation en font partie. N'oublions pas que début 2020 tous les indicateurs étaient au vert, et puis il y a eu le Covid... Nous sommes toujours à la merci de facteurs exogènes. Mais le pire n'est jamais sûr et ce n'est pas pour autant qu'il va y avoir de rupture avec la tendance telle qu'elle s'exprime en ce début d'année. Nous connaissons aujourd'hui une période de croissance comme nous n'en avons pas vu depuis des années. Il faut en profiter...

Lire aussi 3 mnEuroplasma, l'action cotée en bourse qui valait un millième d'euro

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.