LA TRIBUNE - Pourquoi n'avoir pas voulu associer votre mandat de maire de Poitiers à celui de présidente du Grand Poitiers, comme cela aurait dû être le cas : c'était trop tôt ou non souhaitable ?
LEONORE MONCOND'HUY, maire EELV de Poitiers - Le projet sur la base duquel j'ai été élue reposait sur la promesse de renouveler les pratiques politiques, vers une gouvernance plus partagée. Cela se reflète dans l'état d'esprit et le fonctionnement de la municipalité de Poitiers. Mais cela devait aussi se décliner à l'échelle de Grand Poitiers : pour ces 40 communes urbaines, périurbaines, rurales il ne devait pas être considéré comme naturel que la maire de la ville-centre soit également présidente de la Communauté urbaine. Soutenir une autre candidature tout en gardant une place équilibrée pour Poitiers dans l'exécutif était donc un signe de cohérence de notre projet politique, qui entraîne aujourd'hui, peu à peu, un changement de culture politique.
Vous avez également très vite marqué votre sensibilité, en annonçant par exemple l'organisation de voyages d'été pour les jeunes adultes défavorisés. Comment comptez-vous faire évoluer cette inclusion des représentants des classes sociales défavorisées dans cadre de l'action municipale ?
Pour sa première édition, comme pour l'édition 2021, le projet "Vacances Pour Tous" est un vrai succès ! Et j'en suis ravie. C'est une politique importante à mes yeux, très symbolique. Elle manifeste le fait que les politiques sociales ne sont pas simplement celles de l'accompagnement à l'insertion professionnelle, mais aussi des politiques d'égalité dans l'accès au temps libre, aux loisirs, à la culture, aux vacances. L'engagement pour la justice sociale à l'échelle de Poitiers se manifeste de multiples manières : il y a l'urgence, pour laquelle nous nous sommes largement engagés cette année (aide alimentaire, halte répit permettant un hébergement d'urgence inconditionnel...), mais le plus important restent les mesures structurelles.
Je pense au renforcement du service public, qui doit garantir l'égalité d'accès aux droits pour toutes et tous, et qui, pour ce faire, doit de toute urgence s'adapter aux enjeux numériques. Je pense au logement, avec la mobilisation du patrimoine municipal pour offrir des capacités d'hébergement aux plus fragiles (migrants, familles précaires...), à l'accélération de la rénovation des logements sociaux. Je pense à l'aide à l'emploi, bien sûr. Avec un objectif spécifique pour l'emploi de la jeunesse et en particulier celle des quartiers dits "Politique de la ville" : organisation de "flash jobs" permettant une mobilisation directe auprès des demandeurs d'emploi des employeurs du territoire ; relocalisation dans ces quartiers de viviers d'emplois... Et de manière générale, accompagnement au développement de filières porteuses d'emplois d'avenir, comme celles de la transition énergétique ou de l'économie circulaire.
Le pays est confronté à la crise sanitaire due à la pandémie de Covid-19. Avec quels instruments votre mairie est-elle intervenue pour appuyer les professionnels, l'activité économique de la ville : ceux proposés par la Région, des dispositifs mis en place par le Grand Poitiers ?
Nous avons combiné des dispositifs d'aides directe et indirecte en soutien de l'économie de proximité. Des aides à la trésorerie, des aides "Rebond", pour les entreprises mais aussi les associations ou structures de l'économie sociale et solidaire. En termes de dispositifs indirects nos actions se sont surtout centrées sur le soutien à la vie commerciale locale : gratuité des terrasses, forte politique d'animation du centre-ville commerçant, expérimentation de la gratuité des bus et des parkings pour certaines périodes-clé...
Nous avons aussi lancé des projets visant à préserver plus structurellement les emplois : le projet "transitions collectives" par exemple associe Grand Poitiers et son voisin Grand Châtellerault, ainsi que les réseaux d'entreprises du territoire autour de l'évolution des emplois industriels menacés par la crise sanitaire, économique, mais aussi écologique. Il s'agit de conduire une gestion prévisionnelle territorialisée de l'emploi et des compétences pour accompagner les emplois aujourd'hui fragilisés dans leur évolution vers l'économie durable de demain. Enfin, l'importance du numérique pour l'économie et en particulier le commerce s'est révélée pendant la crise. Nous avons lancé une plateforme de valorisation des commerces en ligne, et surtout proposé des formations gratuites à la maîtrise des outils numériques pour les commerçants.
Sur quels axes principaux allez-vous centrer la poursuite de votre première année de mandat : l'action sociale, environnementale, économique ?
Nous allons poursuivre, accélérer l'action engagée depuis un an autour de nos quatre piliers : l'écologie, la justice sociale, la démocratie et la confiance en l'économie locale. Cela passe par l'avancée de chantiers structurants comme la réhabilitation totale du Quartier de la gare, porte d'entrée de notre territoire ; ou celle du Palais des Ducs d'Aquitaine, qui est un joyau patrimonial au cœur de l'histoire de la Nouvelle-Aquitaine. Cela passe aussi par l'innovation, avec par exemple la co-construction d'un tiers-lieu phare au cœur de la ville (la Caserne) dédié à l'innovation sociale et économique, ou encore la création d'un lieu d'éducation nature immersif en plein cœur de la forêt, aux portes de Poitiers. Mais les compétences d'une ville sont avant tout celles du quotidien : pour l'éducation, avec la réhabilitation d'écoles et la végétalisation des cours ; pour l'éducation populaire aussi, avec la montée en puissance de la politique "Vacances pour tous", et la réhabilitation de maisons de quartier. Toujours, dans chacune de ces actions, en ayant une forte exigence d'exemplarité écologique de la municipalité.
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