"Il faut casser du bitume" : Pierre Hurmic lance la végétalisation de Bordeaux

La saison 1 de "Bordeaux grandeur nature", sous-titrée par le maire de Bordeaux "Il faut casser du bitume", a officiellement été lancée ce mercredi par Pierre Hurmic. Objectif : planter des micro-forêts urbaines pour réduire la chaleur en ville et développer la biodiversité. Le tout renforcé par d'autres plantations, qu'il s'agisse d'arbres fruitiers ou non.
Le maire (EELV) de Bordeaux Pierre Hurmic, au centre, encadré par Andréa Kiss, vice-présidente (PS) de Bordeaux Métropole, et Didier Jeanjean, son adjoint chargé de la nature en ville et des quartiers apaisés.
Le maire (EELV) de Bordeaux Pierre Hurmic, au centre, encadré par Andréa Kiss, vice-présidente (PS) de Bordeaux Métropole, et Didier Jeanjean, son adjoint chargé de la nature en ville et des quartiers apaisés. (Crédits : Appa/ Eric Barrière)

Pierre Hurmic, le nouveau maire (EELV) de Bordeaux, a lancé ce jeudi 25 novembre, devant l'entrée de l'école communale Pressensé, le programme de végétalisation de la ville baptisé « Bordeaux grandeur nature ». A cette occasion, il était accompagné d'Andréa Kiss, vice-présidente (PS) de Bordeaux Métropole en charge des espaces publics, de la voirie et du Fonds d'intérêt communal de la Métropole, et de Didier Jeanjean, son adjoint chargé de la nature en ville et des quartiers apaisés.

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"Bordeaux grandeur nature répond à un véritable plan, à une stratégie de conquête végétale de la ville. Ce qui n'a rien à voir avec un inventaire à la Prévert, où l'on annoncerait deux arbres ici, quatre autres là-bas, etc. Aligner une véritable stratégie implique d'avoir une méthode. La nôtre repose sur quatre principes fondamentaux.

Protéger l'existant, le patrimoine naturel ; renouveler, puisqu'un arbre ça vit, ça meurt ; planter, et dans ce domaine nous n'avons pas de chiffres à communiquer parce que planter cela ne se décrète pas : il faut une volonté ; et participer, car nous devons faire avec les habitants. C'est pourquoi nous avons choisi de présenter ce programme devant une école... parce que faire adopter les arbres par la population passe par les enfants", a déroulé en substance le maire de Bordeaux.

Des places de parking vont céder la place aux arbres

Et puis Pierre Hurmic a éclairé dans la foulée les premières conséquences de son programme Bordeaux grandeur nature, qui vise à terme la création de cinq micro-forêts urbaines mais aussi l'augmentation du nombre d'arbres dans toute la ville.

"Les gens préfèrent voir un ou deux arbres devant chez eux plutôt qu'une voiture garée à demeure le long du trottoir. C'est un changement sur l'usage de la chaussée. Nous n'allons pas planter des arbres là où il y en a déjà. Notre objectif est de déminéraliser la ville", a poursuivi le maire.

Pas de tromperie sur les prix : la nouvelle majorité, Pierre Hurmic en tête, n'a jamais caché pendant la campagne de l'élection municipale qu'elle s'attaquerait aux places de parking en surface pour y développer de nouveaux usages. Pierre Hurmic a souligné que l'idée de créer des micro-forêts plaît à la population : de nombreux Bordelais n'ayant par exemple pas pu profiter du Jardin public pendant le confinement, à cause de l'interdiction de se déplacer de plus d'un kilomètre. Situé dans un quartier très chic, le Jardin public a ainsi profité à une population déjà favorisée.

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Une compétition végétale brutale aux effets positifs

Pierre Hurmic compte bien offrir un accès facilité aux espaces verts au plus grand nombre avec ces projets de micro-forêts. Une démarche qui date de bien avant le confinement et dont le premier objectif consiste a déminéraliser la ville pour réduire la hausse des températures intra-muros générées par la réflexion de la lumière.

Vu d'avion, le concept de la micro-forêt urbaine pourrait passer pour la projection d'une conception ultra-libérale sur le monde naturel. Quand il a présenté la première saison de Bordeaux grandeur nature, une série verte qui devrait en compter six, a-t-il précisé, Didier Jeanjean a fait le show. Dressant en accéléré le portrait de ces micro-forêts où les arbres sont entassés à trois voire cinq sur un seul mètre carré. Ce qui porte la concurrence entre eux à un point maximal et accélère de façon spectaculaire leur pousse. Ces micro-forêts atteignant la maturité en seulement dix ans.

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Micro-forêts : des  unités de choc écologiques conçues au Japon

Cette méthode ne relève pas pour autant d'un nouveau théâtre de la cruauté appliqué à l'élevage des arbres. Si elle peut paraître brutale, elle est parfaitement adaptée aux conditions extrêmes. Domaine dans lequel les Japonais en connaissent un rayon. La micro-forêt est ainsi un concept japonais développé par le botaniste Akira Miyawaki, qui a théorisé cette plantation d'arbres ultra-dense après de nombreuses expériences.

Non seulement les arbres poussent dix fois plus vite, mais ils arrivent à coopérer entre eux. Et cette très haute densité d'arbres fait des micro-forêts des espaces impénétrables à l'espèce humaine, où peuvent donc se développer de robustes écosystèmes. Akira Miyawaki a pu démontrer que presque rien ne résiste à ces forêts miniatures qui s'accommodent de sols urbains très dégradés, fortement pollués qu'elles peuvent ramener à la vie.

En plus des micro-forêts, des arbres fruitiers ou pas

"Nous sommes dans le développement d'une stratégie de lutte contre le réchauffement climatique et pour le développement de la biodiversité, a rappelé Didier Jeanjean. Bordeaux grandeur nature s'inscrit dans ce cadre, tout comme les plans « végétalisons ensemble » et « canicule », ce dernier étant centré sur les fontaines et les jeux d'eau. Les 45 hectares d'espaces naturels de la Jallère sont sanctuarisés, aucun programme immobilier n'y verra le jour et nous allons réviser le plan local d'urbanisme", a annoncé en substance l'adjoint au maire.

Didier Jeanjean a ensuite précisé que les cinq micro-forêts urbaines annoncées faisaient partie de la 1ère saison de Bordeaux grandeur nature. Une saison qui ne va pas se limiter à ces mini-forêts, puisqu'un programme distinct de plantation d'arbres fruitiers est aussi à l'ordre du jour.

"Nous allons planter 100 arbres fruitiers, qui auront une fonction nourricière. Le budget municipal consacré aux plantations d'arbres va tripler pour atteindre 300.000 euros", a éclairé Didier Jeanjean.

Sachant qu'en plus des arbres fruitiers, de nombreuses autres variétés non fructifères seront également mises en terre.

Un fonds métropolitain disponible de 7 millions d'euros à réorienter

Andréa Kiss a précisé de son côté que le budget du Fonds d'intérêt communal géré par la Métropole, qui s'élève à 7 millions d'euros par an, et qui finance des opérations de proximité, serait davantage fléché vers des projets plus vertueux. L'un des critères étant la végétalisation. Cette élue d'origine hongroise s'est amusée du fait que les routes de Hongrie sont bordées d'arbres fruitiers, pour faciliter la fabrication d'alcool par tout un chacun.

"Il paraît qu'avoir de la nature près de chez soi procure un bonheur du même niveau qu'un mariage", a-t-elle poursuivie, évoquant une étude réalisée à ce sujet. Regrettant un peu d'avoir à s'occuper de la voirie à la Métropole, "qui a une connotation très bitumée", a-t-elle estimée.

Il semble qu'à l'époque du règne de Cléopâtre les Egyptiens estimaient de leur côté que l'odeur du bitume, qui existe aussi à l'état naturel, était celle des dieux. Les temps ont bien changé.

Du côté de l'opposition, le groupe Renouveau Bordeaux (LREM), présidé par Thomas Cazenave, "salue l'engagement d'un plan de végétalisation mais demande d'aller plus loin pour répondre à l'urgence climatique et améliorer la qualité de l'air par une sortie progressive des véhicules les plus polluants de la circulation à Bordeaux". Enfin, le groupe Bordeaux Ensemble, de l'ancien maire Nicolas Florian, regrette une politique pas suffisamment ambitieuse.

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