Thomas Cazenave : "Il faut agir très vite et très fort pour gagner la bataille de l'emploi ! "

"Il faut orchestrer au niveau métropolitain un choc de relance de la demande pour assumer pleinement le rôle contra-cyclique de la collectivité", affirme Thomas Cazenave, la tête de liste de Renouveau Bordeaux qualifiée pour le second tour de l'élection municipale prévu le 28 juin. Alors que "l'emploi doit désormais être au sommet des priorités", le candidat LREM présente à La Tribune les grandes lignes de son plan de relance par une hausse de l'investissement public, y compris en fonds propres, un chèque de 50 € pour tous les ménages et une accélération de la transition numérique et écologique.
Thomas Cazenave, ici lors d'un débat organisé par la Tribune le 4 mars, est arrivé en 3e position lors du 1er tour de l'élection municipale à Bordeaux.
Thomas Cazenave, ici lors d'un débat organisé par la Tribune le 4 mars, est arrivé en 3e position lors du 1er tour de l'élection municipale à Bordeaux. (Crédits : Agence APPA)

LA TRIBUNE - Comment analysez-vous, avec le recul, les résultats obtenus par votre liste le 15 mars dernier ?

THOMAS CAZENAVE - On s'est retrouvé au soir du 1er tour avec un résultat pour Renouveau Bordeaux [12,7 %] qu'on aurait évidemment souhaité meilleur dans un contexte très frappant et très compliqué de très faible participation [36,9 %]. On a suspendu la campagne immédiatement mais on a continué à travailler au sein de notre équipe pendant le confinement pour formuler des propositions sur la gestion de la crise sanitaire et la relance économique.

Alors que le 2nd tour est désormais fixé au 28 juin, quel est votre état d'esprit pour cette campagne inédite ?

C'est une campagne qui va être objectivement inédite parce qu'il n'y aura pas de porte-à-porte ni de meeting et même les tractages sur les marchés me semblent compliqués. Je considère que la crise et les enjeux de la sortie de crise confirment nos deux principales convictions : d'un côté, un besoin de plus de proximité à l'échelle de seize quartiers à Bordeaux et, de l'autre, la nécessité de renforcer les prérogatives de la Métropole. Je continuerai donc à défendre cette vision et ce projet lors du second tour puis au sein du conseil municipal.

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Comment jugez-vous la gestion de la crise par l'équipe municipale ?

Elle s'est inscrite dans la stratégie gouvernementale pour la gestion du confinement et du déconfinement. J'ai participé à trois reprises à des réunions avec l'ensemble des forces politiques locales pour formuler des propositions dont certaines ont été retenues dont l'aide directe aux familles modestes n'ayant plus accès la cantine scolaire. En revanche, je pense qu'il aurait fallu aller plus loin dans la proximité en contactant chaque ménage bordelais pour faire le point sur les éventuels problèmes d'école, de mobilité, etc. Ou en déployant davantage de transport à la demande face aux contraintes des transports en commune par exemple.

Alors que le déconfinement entre dans sa troisième semaine, que proposez-vous en matière de soutien à l'économie face à cette crise d'une ampleur inédite ?

La crise sanitaire va maintenant se transformer en crise économique et sociale profonde. Il y a donc désormais une nouvelle certitude indiscutable : la question de l'emploi doit désormais être au sommet de nos priorités. La Métropole doit agir très vite et très fort pour gagner la bataille de l'emploi ! Il faut enclencher sans attendre des mesures extrêmement fortes à l'échelle métropolitaine pour prendre le relais des dispositifs de transition déployés par l'Etat sur les prêts bancaires et le chômage partiel. Aujourd'hui, beaucoup d'entrepreneurs parlent de licenciements, il faut leur redonner de la visibilité et de la confiance pour éviter cela

Mais, soyons clair, le risque qui est devant nous est celui d'un chômage très important. Si on applique les prévisions du FMI et de l'Insee, on parle potentiellement de 20.000 à 30.000 demandeurs d'emplois de plus en quelques mois à Bordeaux Métropole ! [En décembre 2019, 77.000 demandeurs d'emplois (catégories A,B et C) étaient comptabilisés par Pôle emploi à Bordeaux Métropole. NDLR]. J'ajoute que l'agglomération bordelaise est particulièrement vulnérable face à cette crise puisqu'elle cumule trois secteurs d'activité frappés de plein fouet par la crise : le tourisme-hôtellerie-restauration, l'aéronautique et le vin.

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Qu'entendez-vous par "mesures extrêmement fortes" ?

Le risque aujourd'hui est de voir beaucoup de petites et très petites entreprises disparaître purement et simplement. Il faut donc, d'une part, orchestrer au niveau métropolitain un choc de relance de la demande pour assumer pleinement le rôle contra-cyclique de la collectivité. Je propose donc d'octroyer à chaque ménage de Bordeaux Métropole un chèque de 50 € en moyenne à dépenser dans les commerces et restaurants indépendants de la métropole pour jouer la solidarité locale et inciter les ménages à revenir dans ces commerces et restaurants. Cela représente quasiment 20 M€ mais il faut être conscient que le coût économique et social de la crise si nous ne faisons rien sera nettement supérieur !

D'autre part, il faut appuyer sur l'investissement public en réalisant en l'espace de trois ou quatre mois ce que la Métropole fait d'ordinaire en un an. Sur deux ans, on est capable de déployer un plan d'investissement d'un milliard d'euros mais le plus important est de le réaliser très vite pour redonner de la visibilité rapidement aux entreprises et éviter au maximum les suppressions d'emplois dans les prochains mois. Le secteur du BTP a besoin de commandes tout de suite pour passer le creux de la vague. Il faut déclencher très vite des plans de rénovation de nos écoles, de rénovation thermique des logements, de réalisation d'axes de circulation cyclables, de plateformes de logistique urbaine, etc. C'est possible si nos administrations au sein de la métropole et de l'Etat arrivent à se mobiliser et à s'adapter à la situation pour accélérer et je sais qu'elles en sont capables comme elle l'ont montré ces derniers mois. Il faudra aussi être extrêmement vigilant pour que les PME et TPE locales bénéficient de ces commandes publiques.

Que signifie concrètement "agir très vite" ?

Il faut envisager deux échéances : des actions d'urgence dans moins de trois mois et d'autres d'ici huit mois. C'est-à-dire se mettre au travail au lendemain du 2nd tour pour déployer le plan de relance massif dont je viens de parler dès le mois de septembre ! L'accompagnement des entreprises dans les transitions économiques doivent s'envisager sur du plus long terme.

Qu'entendez-vous par mesures d'accompagnement ?

D'abord, il y a une nécessité de rompre avec l'isolement des chefs d'entreprise en déployant, comme je le souhaitais dans mon programme, des référents et des interlocuteurs dédiés aux problématiques des entreprises. Ensuite, il faut accélérer sur la transition numérique tout particulièrement dans le secteur du commerce. Les commerçants qui avaient déjà passé le cap du numérique ont bien mieux passé la crise que les autres. Il faut donc que la Métropole fasse en sorte que tous les commerçants qui ne l'ont pas encore fait puissent se doter d'une offre numérique et de vente à distance parce qu'on ne sait pas combien de temps vont durer les mesures de distanciation sociale.

Souhaitez-vous développer, comme à Nantes, Nice ou Tours, une place de marché métropolitaine réunissant les commerces locaux ?

Je pense qu'il faut d'abord que chaque commerce dispose de son propre site et s'approprie ses propres outils. On doit leur offrir la possibilité de se doter d'un site internet. Si ensuite certains veulent mutualiser leur offre au sein d'une plateforme locale, c'est une bonne idée. Trop de commerçants aujourd'hui sont encore pénalisés par leur absence totale en ligne.

Que proposez-vous le reste du tissu économique local ?

Il faut porter une diversification de notre tissu économique local. Les entreprises et fournisseurs de l'aéronautique traversent une crise qui risque de durer plusieurs années. Ils doivent donc diversifier leur activité dans les domaines de la santé, de l'industrie, notamment au travers de la relocalisation de certaines activités, et de la transition écologique. Il faut structurer un écosystème autour de ces métiers de la transition écologique pour s'émanciper de cette dépendance au trio tourisme, aéronautique et vin.

Enfin, il faut assumer de nouveaux outils plus offensifs notamment en matière d'investissement temporaire en fonds propres. La Métropole ne doit pas hésiter à entrer au capital de certaines entreprises locales jugées stratégiques pour le territoire. Il faut se doter de nouvelles capacités d'investissement avec un outil propre piloté par des acteurs professionnels en lien avec la Région et Bpifrance. La Métropole doit assumer pleinement sa compétence en matière économique.

Vous affirmiez il y a quelques mois "on ne peut pas tout promettre", en visant notamment l'exhaustivité du programme de Nicolas Florian. Qu'en est-il aujourd'hui de cette contrainte budgétaire dans ce contexte de crise ?

Il faut d'abord revoir les priorités de la programmation budgétaire de la métropole. Oui, il faut financer un plan de relance par l'investissement mais est-ce qu'on doit avoir les mêmes priorités ? Pas forcément. Prolonger telle ou telle ligne de tramways ne me semblent pas prioritaire. D'autre part, la collectivité a naturellement un rôle contracyclique à jouer quitte à s'endetter. C'est précisément dans ces moments là qu'on peut justifier un endettement pour financer de l'investissement, c'est parfaitement légitime.

L'avenir de la navette Air France entre les aéroports de Bordeaux-Mérignac est d'Orly s'invite dans la campagne. Faut-il la maintenir ou la supprimer ?

On a besoin à Bordeaux d'un aéroport de premier plan et compétitif pour garantir notre activité économique et des connexions nationales et internationales. Notre territoire a des entreprises qui peuvent participer pleinement à la transition écologique du secteur aérien et on doit y mettre toute notre force. Ensuite, s'agissant de la navette vers Orly, avec la LGV qui relie Bordeaux à Paris en 2 heures, on a objectivement une alternative efficace et on peut donc diminuer le nombre d'aller-retour tout en maintenant une desserte de Roissy pour les connexions internationales. A un moment donné, il faut savoir passer des paroles aux actes !

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