Gilets jaunes : les CCI métropolitaines et les transporteurs se préparent au choc

Pas encore de bilan financier mais une tendance économique très négative chez les transporteurs routiers et de nombreux commerçants. Le gouvernement, qui a depuis des mois coupé les ponts avec les corps intermédiaires, fait désormais partie des problèmes pour de nombreux chefs d’entreprise. Le 5 décembre à Paris, les présidents des Métropoles et des CCI métropolitaines vont essayer de débloquer la situation.
Gilets jaunes au péage de Virsac (Gironde) le 18 novembre.
Gilets jaunes au péage de Virsac (Gironde) le 18 novembre. (Crédits : Agence Appa)

Alors que le mouvement des Gilets jaunes semble ne pas faiblir, l'avis des chefs d'entreprise est jusqu'ici consensuel : il est encore trop tôt pour chiffrer l'impact économique de cette fronde sociale. Une autre évidence, qui inquiète depuis déjà des mois et pas seulement les Girondins, est devenue incontournable : c'est la profondeur du vide qui s'est creusé entre le gouvernement et les corps intermédiaires, depuis les syndicats ouvriers jusqu'aux chambres consulaires. Au point que les présidents des chambres de commerce et d'industries (CCI) métropolitaines vont se retrouver ce mercredi 5 décembre à Paris en compagnie des présidents des Métropoles.

"J'ai interpellé CCI France pour voir ce que l'on pouvait faire et ce matin-même, le président de CCI France, Pierre Goguet (précédent président de la CCI de Bordeaux Gironde - Ndlr) rencontrait le ministre de l'Economie et des finances, Bruno Le Maire. L'idée de la réunion de mercredi, à laquelle participera Alain Juppé, c'est de faire passer ensuite un message au ministre de l'Economie et des Finances, et plus largement au gouvernement. Celui de relancer le dialogue social en réactivant les corps intermédiaires, dont les CCI sont l'un des acteurs" dévoile Patrick Seguin, président de la CCI Bordeaux Gironde.

Ce dernier annonce l'ouverture ce lundi soir d'une ligne téléphonique d'urgence et une adresse mail pour les chefs d'entreprise en difficulté (05 56 79 5000 - [email protected]).

Les équipes de la préfecture sur la brèche

Objectif de la CCI Bordeaux Gironde : faciliter le contact des dirigeants d'entreprise avec les services de la Direccte (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi), afin de pouvoir bénéficier de mesures de chômage partiel, d'un moratoire sur le paiement des taxes voire d'accéder à la Médiation du crédit.

Le vendredi 30 novembre la préfecture de la Gironde et de Nouvelle-Aquitaine, qui avait déjà organisé une cellule de crise, a adressé un message aux entreprises pour les informer et tenter de les rassurer.

"...l'Etat se mobilise, soutient les entreprises et reste à leur écoute. Il communique à destination des fédérations professionnelles et des représentants des entreprises pour mieux appréhender les difficultés potentielles de circulation en Nouvelle-Aquitaine. Le préfet de Région a désigné la Direccte pour recueillir les besoins et les difficultés des entreprises et de leurs représentants. Les demandes sont à adresser sur la boîte mail suivante : [email protected]".

Gilets jaunes : un triangle des Bermudes pour camionneurs ?

Cet engagement va sans aucun doute dans le bon sens pour les dirigeants mais son efficacité n'est pas évidente pour de nombreuses entreprises, en particulier dans le transport routier, qui se retrouve en première ligne. Les transporteurs n'ont pas tous porté leurs systèmes de communication à l'étage technologique du dessus et pour peu qu'ils aient des livraisons longue distance à effectuer, le côté erratique des actions menées par les Gilets jaunes et leur durée parfois longue peut transformer ronds-points et péages d'autoroutes en autant de triangles des Bermudes.

"Nous avons du mal à localiser les chauffeurs et comme les actions de blocages sont très éclatées, souvent non déclarées, la Croix rouge ne peut pas aller les ravitailler. La préoccupation de la Fédération est actuellement de savoir où sont les chauffeurs et les véhicules. Parce que ça, globalement, on ne le sait pas. D'autre part quand les barrages des Gilets jaunes sont levés, les pouvoirs publics nous bloquent à nouveau, dans des zones de stockage. C'est la double peine. La semaine dernière des camions ont ainsi été stockés pendant quatre ou cinq jours. Cette semaine ces stockages ont été moins nombreux mais c'est quand même dur" déroule Jérôme Bessière, secrétaire général de la Fédération nationale du transport routier (FNTR) d'Aquitaine.

Il souligne bien qu'il n'est pas question de juger l'action de l'Etat et que les fonctionnaires des préfectures "sont sur la brèche" et n'exclut pas que certains chauffeurs puissent éventuellement disparaître ponctuellement chez les Gilets jaunes...

GT en souffrance jaune dans le Nord, la Normandie et en Paca

A l'inverse de beaucoup de transporteurs routiers traditionnels, la société girondine GT Location (groupe bordelais GT), à Bassens près de Bordeaux, spécialisée dans la location de véhicules avec chauffeurs (1.800 salariés, 144 M€ de chiffre d'affaires l'an dernier), sait exactement où se trouvent ses 1.704 poids lourds, qui disposent tous d'un système informatique embarqué qui permet notamment de les géolocaliser en temps réel et d'avoir un contact direct avec les chauffeurs. Mis au service d'entreprises de secteurs aussi différents que l'industrie agroalimentaire, la livraison de produits industriels sensibles ou le béton prêt à l'emploi, les camions de GT Location sont présents dans toute la France.

"Bien sûr la situation actuelle nous impacte mais nous n'avons pas encore de chiffres à donner. La situation est d'abord très pénible pour les chauffeurs. Nous avons par exemple une tournée d'approvisionnement du magasin Auchan au centre de Bordeaux qui prend entre 1 heure 30 et 2 heures au départ de notre entrepôt de Bassens. Eh bien samedi 24 novembre, suite à l'action des Gilets jaunes, le chauffeur a été bloqué pendant huit heures sur cette tournée. Nous devons faire à des situations très compliquées, en particulier dans le Nord, en Normandie et Provence-Côte-d'Azur. Pour le moment cela se passe bien en Ile-de-France" décrit Michel Sarrat, PDG de GT Location et codirigeant avec son frère Eric du groupe GT.

L'UIMM teste son propre système d'alerte

Déjà très mobilisée sur les problèmes de circulation générés par les 1.400 chantiers recensés à Bordeaux intra-muros, l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) Gironde-Landes a créé sa propre cellule de crise pour venir en aide à ses ressortissants.

"Nous avons créé un système d'alerte en interne pour faciliter la remontée d'informations et leur diffusion. Je ne suis pas sûr que la préfecture ait bien compris notre démarche mais nous travaillons prioritairement avec la Direccte. Nous souhaitons être informés des blocages au fil de l'eau et pour cela nous ne pouvons que compter pour le moment que sur nos adhérents, qui nous disent où l'on trouve des barrages. Une fois que nous avons vérifié les faits, nous diffusons l'information. Bien entendu ce système fonctionne en fonction des déplacements de nos adhérents. Le mouvement des Gilets jaunes a jusqu'ici impacté de façon manifeste 48 de nos adhérents, avec des sociétés qui vont de la très petite entreprise industrielle de 8 personnes à des établissements de 1.400 personnes" éclaire Xavier Esturgies, vice-président délégué général de l'UIMM Gironde-Landes.

Qui souligne qu'aucune entreprise métallurgique n'a été dégradée dans la région. Chez les transporteurs, on se prépare au choc. Selon la FNTR 80 % des moyens roulants de certaines petites entreprises sont bloqués sur la route et pour elles le futur risque rapidement de se conjuguer au passé.

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Commentaires 3
à écrit le 03/12/2018 à 18:23
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Mars 2014, Kiev, Maidan, personnage public philosophique et philosophique Bernard-Henri Levy: Les gens de Maidan! Vous avez presque à mains nues obligé de battre en retraite "Golden Eagle". Vous avez presque à tour de rôle transformé Ianoukovitch ...

à écrit le 03/12/2018 à 17:24
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"La préoccupation de la Fédération est actuellement de savoir où sont les chauffeurs et les véhicules. Parce que ça, globalement, on ne le sait pas" A l'époque du téléphone portable on croit rêver maintenant en effet il y a les chauffeurs au raba...

à écrit le 03/12/2018 à 15:51
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Chacun à le droit de se défendre quand il s'estime en danger, pour le moment les commerçant subissent en silence, il faudrait qu'ils pensent à régir, je ne peux pas décrire toutes les solutions mais il y en a d'efficaces.

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