Contrats financiers avec l'Etat : 10 collectivités de Nouvelle-Aquitaine saisissent Edouard Philippe

Les présidents du conseil régional, de six départements et de trois agglomérations de Nouvelle-Aquitaine - soit un tiers des collectivités concernées dans la région - ont envoyé un courrier commun au Premier ministre pour contester le processus de plafonnement de leurs dépenses. Ils demandent à Edouard Philippe un engagement réciproque de l'Etat et un assouplissement de ce "cadrage budgétaire".
Alain Rousset, le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, a cosigné un courrier adressé au Premier ministre pour demander un aménagement de la procédure de contractualisation financière.

Les collectivités locales de Nouvelle-Aquitaine sont partagées sur l'opportunité de contractualiser leurs relations financières avec l'Etat. Il y a celles qui ont déjà signé (Bordeaux, Bordeaux Métropole et Niort), celles qui vont signer (Pyrénées-Atlantiques, Pau, Brive et Mérignac), celles qui réfléchissent (Creuse et Communauté d'agglomération du Pays basque) et celles, les plus nombreuses, qui refusent de s'engager (Dordogne, Landes et Lot). Parmi ces réfractaires, dix collectivités - Nouvelle-Aquitaine, Charente, Charente-Maritime, Corrèze, Gironde, Haute-Vienne, Lot-et-Garonne, Agen Agglomération, Limoges Métropole et La Rochelle Agglomération - ont même adressé, le 17 mai, un courrier commun au Premier ministre Edouard Philippe pour lui expliquer leur opposition aux contrats financiers.

Mais de quoi parle-t-on exactement ? La loi de programmation des finances publiques du 22 janvier 2018 prévoit que les 322 plus grandes collectivités locales françaises (régions, départements, métropoles, intercommunalités et communes) devront signer avant le 30 juin 2018 un contrat avec l'Etat plafonnant l'évolution de leurs dépenses de fonctionnement à +1,2 % par an en 2018, 2019 et 2020. Un taux qui est modulable de +/- 0,15 % sous certaines conditions. En cas de non respect, les collectivités s'exposent à des pénalités financières qui sont majorées en cas de non signature. 29 collectivités sont concernées en Nouvelle-Aquitaine (*)

"Un cadrage budgétaire plus qu'un contrat"

Six départements de Nouvelle-Aquitaine avaient déjà fait part de leur opposition à cette démarche début mai. A un mois de l'échéance, la fronde prend de l'ampleur dans le Sud-Ouest puisqu'elle concerne désormais plus d'un tiers des collectivités concernées. Ces dernières, réunies à l'initiative d'Alain Rousset, le président du conseil régional, défendent une position claire : pas de signature sans évolution du dispositif ! Dans le courrier commun adressé au Premier ministre le 17 mai dernier, que La Tribune a consulté, les dix élus locaux affirment être attachés à la maîtrise des dépenses publiques mais demandent des ajustements du dispositif prévu par la loi.

"La contractualisation proposée s'avère plus être un cadrage budgétaire qu'un véritable contrat", regrettent les signataires néo-aquitaines qui réclament "des engagements réciproques" de la part de l'Etat et des contrats "lisibles, adaptés aux considérations locales et au contenu réel des politiques" menées sur le terrain. Leur principale crainte est l'aggravation de la fracture territoriale :

"Il y aura d'un côté les collectivités attractives, qui par le simple retour fiscal pourront autofinancer leur politique d'investissement. Et, de l'autre, les collectivités fragiles, souvent rurales, qui ne disposent pas de cette faculté. Le taux de taxe foncière dans les départements côtiers en Nouvelle-Aquitaine est en moyenne de 8 points plus faible que dans les départements plus ruraux."

En Gironde, la menace d'une amende de 31 M€

Les dix élus locaux, qui attendent donc un soutien clair de l'Etat en matière d'investissement, alertent également sur la prise en compte dans ces contrats des "dépenses imposées par l'Etat", telles que les trois allocations individuelles de solidarité (RSA, PCH et APA), la prise en charge des mineurs étrangers non accompagnés et celle des personnes handicapées en structures spécialisées. En Gironde, le Département assure que cela représente 83 M€ par an. Une somme à comparer au montant total du budget de fonctionnement qui a atteint 1,41 Md€ l'an dernier.

Enfin, les signataires souhaitent que le contenu de chaque contrat soit davantage adapté aux réalités sociales, démographiques et géographiques de chaque territoire et qu'un système de bonus soit ajouté sur un modèle miroir au malus déjà prévu en cas de non respect du contrat. Toujours pour la Gironde, ce malus pourrait aboutir l'an prochain, en cas de non respect du plafond d'évolution en 2018, à une amende de 31 M€, soit 2,2 % du budget de fonctionnement.

A noter que la Région Occitanie et le Département de l'Ariège ont également annoncé qu'ils ne signeraient pas de contrat avec l'Etat à l'inverse de Toulouse et Toulouse Métropole qui soutiennent la démarche.

(*) 29 collectivités locales de Nouvelle-Aquitaine sont concernées par la procédure de contractualisation financière avec l'Etat :

  • la Région,
  • les douze départements,
  • Bordeaux, Bordeaux Métropole et Mérignac,
  • Poitiers et le Grand Poitiers,
  • Limoges et Limoges Métropole,
  • Bayonne et la Communauté d'agglomération du Pays basque,
  • Pau et la Communauté d'agglomération Pau Béarn Pyrénées,
  • Agen Agglomération,
  • Angoulême, La Rochelle, Niort et Brive.

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Commentaire 1
à écrit le 06/06/2018 à 16:52
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La méthode est certes moins brutale qu’une baisse des dotations, elle n'en est que plus insidieuse et dangereuse. Au-delà de sa complexité technique et de sa logique comptable qui sont le nouveau parangon de l’action municipale, cette méthode aspire ...

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