Pas de smart city sans smart country !

Comment éviter l'opposition entre smart cities et stupid villages ? A la veille du 4e Forum Smart City Bordeaux, organisé par La Tribune en partenariat avec Bordeaux Métropole et Live in @ living city, Mylène Villanove, conseillère métropolitaine en charge des coopérations territoriales et conseillère municipale déléguée auprès du maire de Bordeaux pour les relations institutionnelles avec les territoires, et Martin Vanier, géographe et professeur à l'Université de Grenoble-I et à l'Ecole d'urbanisme de Paris, signent une tribune commune pour défendre la vision d'un "faire ensemble" pour éviter les fractures entre la métropole et les territoires qui l'entourent.
La métropole bordelaise smart, et le reste de la Gironde déconnectée ? C'est ce que combattent Mylène Villanove, élue à Bordeaux, et Martin Vanier, géographe.
La métropole bordelaise smart, et le reste de la Gironde déconnectée ? C'est ce que combattent Mylène Villanove, élue à Bordeaux, et Martin Vanier, géographe. (Crédits : Thomas Sanson - Mairie de Bordeaux / Martin Vanier)

"Smart city versus stupid village ?", titrait de façon judicieusement provocatrice un récent rapport de la Caisse des Dépôts [1]. L'intelligence n'a pas de frontière. Elle a beau être invoquée aujourd'hui au nom du territoire, il faut veiller à ce qu'elle ne s'y enferme pas. En raison du refus des fractures, de la justice territoriale, donc de la cohésion, c'est aussi en raison de l'efficacité globale [2] du système de l'intelligence, que les smart cities visent à activer, ce qu'elles ne réussiront pas sans les smart countries.

Réjouissons-nous : Bordeaux Métropole est en pointe dans la mutation dite des smart cities. C'est bon pour son économie numérique et ses startups, c'est bon pour la qualité de ses services urbains (transports, déchets, éclairage, eau et assainissement, sécurité, etc.) et ses capacités à en exporter les modèles dans le monde (avec un marché global estimé entre 400 et 1 600 milliards de dollars !), c'est potentiellement bon pour l'implication citoyenne et la façon de gouverner la ville en tenant compte des usages, c'est une belle promesse de faire émerger de nouvelles solutions collectives dans la société, pour mieux éduquer, soigner, s'alimenter, se déplacer, etc.

Au-delà de l'engouement technophile pour la ville à l'heure de l'intelligence artificielle, chacun est conscient du risque évident de divergence donc de fracture entre le "in" et le "out", qu'il s'agisse de personnes, de territoires ou d'organisations [33]. Le Baromètre 2016 de l'ARCEP signale que 56 % de Français sont soit incapables d'effectuer une démarche administrative en ligne (16 %), soit inquiets à l'idée de devoir le faire (40 %). L'inclusion n'est donc pas qu'une question de fibre optique et de couverture 4G, même si elles sont des conditions sine qua non.

Tout comme l'intelligence et l'innovation, la métropole ne s'arrête pas à des frontières administratives. La question n'est pas seulement de veiller à ce qu'au-delà du périmètre métropolitain on ait aussi la fibre, des services numériques et l'accès à la data. C'est de faire ensemble, parce que l'interdépendance des territoires l'exige, et parfois en profondeur dans les territoires qu'on estime un peu trop vite "purement ruraux".

Faire ensemble l'offre de mobilité qui évitera que la smart city soit chaque jour victime de l'embolie automobile (fut-elle propre !) dont les sources sont parfois dans les campagnes très loin de la métropole. Faire ensemble la transition énergétique qui ne peut relever que d'une entente et d'une transaction énergétique juste entre zones denses consommatrices et zones peu denses productrices. Faire ensemble la nouvelle politique alimentaire territoriale à laquelle la société aspire, et ainsi de suite sur tous les sujets.

Un "faire ensemble" qui donne au "smart" toutes ses dimensions : l'intelligence, c'est, certes, le savoir, la science, la donnée, l'information, et toutes les technologies qui augmentent les capacités humaines ; mais c'est d'abord, et avant tout, la compréhension du contexte dans lequel on agit, et l'éthique politique qu'il exige. Dans un système de villes et campagnes comme celui qui englobe Bordeaux Métropole, il n'y a somme toute qu'une façon d'être vraiment intelligent : ensemble.

Bordeaux Métropole y travaille par ses protocoles de coopération interterritoriale, déjà signés avec Angoulême (2016), la Communauté d'agglomération du libournais (2017), et demain avec d'autres territoires (Val de Garonne, Saintes...).

[1] Cédric Verpeaux, Smart city versus stupid village ?, CdC, ADCF, APVF, septembre 2016.

[2] Pierre Muller, La société de l'efficacité globale, PUF, 2015.

[3] Luc Belot, De la smart city au territoire d'intelligence(s), Rapport au Premier Ministre, avril 2017.

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La Tribune organise le 4 avril au Palais de la Bourse, à partir de 8h30, le Forum Smart City Bordeaux, en partenariat avec Bordeaux Métropole et Live in @ living city. Au programme de cette journée de débats et d'échanges figure une séquence consacrée aux métropoles et aux territoires.

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