ALPC : comment Rousset effacera l’ardoise de Poitou-Charentes

Président de la Région Aquitaine Limousin Poitou-Charentes, Alain Rousset répondait ce matin aux questions de la rédaction de La Tribune à Bordeaux. On en sait plus sur ses ambitions en matière de soutien à l’économie, d’investissement, et sur les impacts des mauvaises surprises financières de Poitou-Charentes.
Alain Rousset, interviewé ce matin par Mikaël Lozano, rédacteur en chef de La Tribune à Bordeaux, et Jean-Philippe Déjean, journaliste à La Tribune à Bordeaux

Invité du mois du Petit Déjeuner interactif de La Tribune organisé au Mercure Cité mondiale de Bordeaux, en collaboration avec Crédit agricole Aquitaine, Alain Rousset, président PS de la plus grande région de France, s'est prêté au jeu des questions-réponses avec les journalistes de La Tribune à Bordeaux.
Réélu en décembre 2015 pour son troisième mandat Alain Rousset se présente en homme libre :

"J'appartiens à un camp, mais je n'ai jamais eu de certitudes. Il faut savoir douter en politique..."

Ce sur quoi il ne doute pas en revanche, c'est sur sa stratégie économique.

"L'arrêt des investissements en temps de crise ? Terrible erreur !"

"Dans les périodes de difficultés, l'esprit du moment c'est l'arrêt des investissements. C'est une terrible erreur à mon avis."

Et de citer l'exemple de la volonté de certains d'arbitrer entre la rénovation des TER et la réalisation du GPSO, Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest (l'extension des lignes LGV de Bordeaux vers Toulouse et de Bordeaux vers l'Espagne).

"Nous, on continue de faire les acquisitions foncières... la mobilité dont ont besoin nos concitoyens c'est la liberté et c'est  la paix ! Je ne comprends pas les résistances des écologistes qui refusent le doublement des lignes ferrées existantes... si l'on ne le fait pas, l'automobile, voire l'avion seront utilisés par des populations qui ont besoin de bouger, de se rencontrer, de se comprendre..."

Sur le plan du soutien à l'innovation également, l'expérience aquitaine lui donne des certitudes.

"Si la région Aquitaine est une des plus attractives de France avec l'Ile-de-France et Rhône-Alpes, et qu'elle est capable de se réindustrialiser, c'est parce qu'on a su booster les capacités de ses entreprises à innover. Nous allons uniformiser, dans les ex-régions Poitou-Charentes et Limousin, un système d'accompagnement et de soutien à l'innovation qui a fait ses preuves en Aquitaine."

Pourquoi un fonds d'investissement régional ?

Frustré de n'avoir pas "réussi à régionaliser Bpi", Alain Rousset entend voir la grande Région ALPC réussir à créer un fonds d'investissement doté de 200 à 300 M€... contre 30 M€ actuellement portés par ACI (Aquitaine Création investissement). Citant les exemples de Fermentalg (société spécialisée dans la production de micro-algues pour les industries agroalimentaires, l'énergie, les cosmétiques... basée à Libourne en Gironde) ou encore du dossier de laminoir du groupe espagnol Celsa à Bayonne (le président de Région et celui du Département des Landes, Henri Emmanuelli, tentent de lever 5 M€ pour créer le laminoir), le président PS de la Région estime que ce fonds régional d'investissement "doit permettre à nos créateurs de ne pas être obligés de se vendre à des fonds US ! Je préfère mobiliser l'épargne de la veuve de Bazas sur les pépites locales, qui fera sa fierté et sans doute l'avenir de ses petits-enfants !".
Avec ce fonds régional Alain Rousset assure que la Région pourra intervenir avec du prêt d'honneur, à la levée du premier million d'euros.

"Surtout, je ne veux plus être dépendant de Paris et des fonds spéculatifs pour prendre la défense de l'économie de la région ! Si nous avions eu un tel fonds, nous aurions été plus vite dans le sauvetage de Gascogne, qui représente 2.000 emplois directs, et autant d'emplois indirects."

Pour constituer ce fonds, Alain Rousset s'est entouré d'un groupe de chefs d'entreprise. Ensemble ils se lancent à l'assaut des investisseurs institutionnels, des banques, des grands groupes...

"Nous allons prochainement rencontrer les mutuelles à Niort et tenter de les convaincre que tout le monde a intérêt à ce que ce fonds voit le jour. En Allemagne, les Länder aident 5 fois plus les PME et ETI locales. Chez nous, les grands groupes qui font du lobbying en permanence à Bercy sont aidés, mais les PME, les ETI, elles n'ont pas le temps de le faire... Or ce sont elles qui créent de l'emploi, pas les grands groupes. Pour le moment, l'incapacité des Régions à pouvoir accompagner massivement les PME est un frein à l'industrialisation. En clair : les Régions ne sont pas prises au sérieux par Paris quand il s'agit de s'occuper d'économie. Pourtant, nous sommes les seuls à avoir créé un club des ETI, c'est nous qui avons inventé le concept d'Usine du futur, avec ce qui a été fait chez Turbomeca sur l'usine Eole. Notre région concentre d'ailleurs à elle seule 50 % des projets d'Usine du futur. Nous participons à la réinvention de l'usine lieu de vie où l'humain est au centre du projet."

Deux ans pour rééquilibrer financièrement Poitou-Charentes

Autre chantier important du président de la Région ALPC : l'ardoise financière de Poitou-Charentes.

"Attention, j'ai toujours épargné Ségolène Royal, je ne charge personne, je critique seulement les résultats, ce qui a dérapé. Je dis juste qu'entre 2014 et 2015,  l'impact de mesures qui étaient toutes, séparément, intéressantes ont fait flamber les finances, faute d'arbitrages dans les dépenses et dispositifs d'aides.

Par contre, j'ai été impitoyable avec ceux qui ont caché des notes de service qui vraisemblablement ne sont jamais arrivées au président Macaire. Quand l'équipe de la haute direction est partie, nous avons pu soulever le couvercle et le travail d'EY, cabinet d'audit avec lequel nous continuons de travailler, a confirmé nos craintes. Poitou-Charentes avait 128 M€ d'impayés et 69 M€ de sous budgétisation. Il me faut trouver 200 M€ pour, c'est une règle républicaine, tenir les engagements de la Région.

Le budget primitif de la nouvelle Région sera de 2,4 Md€. Nous allons économiser 93 M€ sur nos dépenses avec ce rapprochement. Cependant, il nous faudra débourser 100 M€ pour renégocier les prêts structurés contractés par Poitou-Charentes, cela n'est pas encore réglé. Quoi qu'il en soit, nous estimons que nous allons rééquilibrer les comptes d'ici deux ans. Nous avons pris des décisions fortes, dures parfois."

Des décisions tombent donc depuis le début de l'année. Finie la politique de guichet de la Région Poitou-Charentes.

"Nous harmonisons les aides, nous ne financerons plus les salles communales, les candélabres des passages piéton, les ronds-points, les arbres de Noël... C'est dur à comprendre pour certains élus, mais le meilleur service à leur rendre c'est quand même le soutien des usines qui sont sur leur territoire, des entreprises qui innovent et créent de l'emploi chez eux !"

Nouveau nom de la région : « J'aurais aimé Guyenne et Gascogne..."

"Chez eux" désormais, c'est une nouvelle région, la plus grande de France qui se cherche un nom actuellement. Ce futur nom de la région ALPC sera voté par l'assemblée en juin. La consultation citoyenne qui s'est achevée le 5 mai a enregistré 41.000 contributions (les chiffres sont en cours de consolidation selon nos informations). 35 % des propositions incluent le mot Aquitaine, 25 % Sud-Ouest, 23 % Atlantique... 5 % Alienor.

"Il m'est impossible de dire, aujourd'hui, quelle est ma préférence. Il y a eu la consultation, un remarquable travail réalisé, sur l'ensemble du territoire par une équipe autour d'Anne-Marie Cocula. Par déontologie, je veux attendre les résultats de son périple et son ressenti issu directement des territoires traversés avant de m'exprimer et avancer une proposition à l'assemblée...  J'avoue que j'aurais bien aimé Guyenne & Gascogne... mais c'est une marque de supermarché !"

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Commentaire 1
à écrit le 13/05/2016 à 8:50
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Il ne dit rien sur la politique d'investissements catastrophiques de Ségolène dans le Poitou Charentes. Tout comme son ex l'a fait dans une autre région (Tulle), elle a saigné la région Poitou Chtes en voulant sauver des canards boiteux : financemen...

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