À Bordeaux, Mon courtier Énergie prépare son entrée en bourse

Fondée dans le sillage de la dérégulation européenne du marché de l'énergie, Mon courtier en énergie a enregistré une croissance de près de 100 % en 2022 ! La PME bordelaise, qui vient de mettre un pied en Espagne et vise l'Italie, se prépare aujourd'hui à faire son entrée sur le marché boursier. Retour sur une entreprise atypique.
Les bureaux de Mon courtier en énergie à Bordeaux, quai de Bacalan.
Les bureaux de Mon courtier en énergie à Bordeaux, quai de Bacalan. (Crédits : Mon courtier en énergie)

Charlie Evrard a créé la société Mon courtier en énergie en 2017 à Bordeaux. La base de son métier : faire le tour des fournisseurs de gaz et d'électricité pour proposer ensuite la meilleure offre à ses clients, qu'ils soient commerçants ou chefs d'entreprises, et ce à l'exception des particuliers.

« Dans la majorité des cas ce sont les fournisseurs d'énergie qui nous paient. Nous travaillons en BtoB (business to business) et donc uniquement avec des clients professionnels. Notre première activité c'est de trouver l'énergie au meilleur prix pour nos clients. À cela se rajoute une deuxième prestation : l'optimisation des coûts d'acheminement de l'énergie et des taxes liées à sa consommation. Enfin nous accompagnons nos clients pour leur fourniture en énergie renouvelable, comme l'éolien ou le solaire, dans le cadre de la transition énergétique », déroule pour La Tribune Charlie Evrard.

Lire aussiSelectra reprend Jechange.fr et les trois quarts de ses salariés à la barre du tribunal de commerce

De nombreux secteurs et tailles d'entreprises

Si le profil de ses clients est très variable, ce sont aussi bien des commerçants - par exemple des boulangers - que des agriculteurs, des syndics et gestionnaires de copropriétés, des entreprises du BTP, des maisons de retraite ou des industriels. Mais il n'a pas dans son carnet les entreprises les plus énergivores du pays (parmi lesquelles les cimenteries), qui ont depuis longtemps internalisé ce poste énergie.

« Grosso modo nos clients paient en moyenne 50.000 euros en énergie par an. C'est un marché très financiarisé, avec des contrats à court, moyen et long terme qui courent en moyenne sur deux ou trois ans. Quand il y a un contrat on peut travailler. Nous avons créé un schéma d'alerte sur les entreprises engagées qui se déclenche à un an voire un an et demi de la fin de leurs contrats énergie. Ce qui nous permet d'aller les revoir au bon moment pour refaire le point sur leurs besoins. Les fournisseurs en énergie nous les mettons en concurrence pour obtenir le meilleur prix, les meilleures conditions », souligne Charlie Evrard.

Lire aussiPrix de l'énergie : cette attestation obligatoire pour les aides aux artisans, commerçants et TPE

Une année 2022 « en mode pompier »

Diplômé en management d'entreprise mais aussi en finances, le patron de Mon courtier en énergie s'est très vite retrouvé chez des énergéticiens, travaillant en particulier pour Altergaz et le géant italien Eni. Avec la crise énergétique explosive de 2022, Charlie Evrard relève que la plupart des dirigeants d'entreprises ont d'un seul coup pris conscience de l'importance du poste énergie dans leur bilan.

« Avec cette crise, l'énergie est devenue un sujet. Alors qu'avant, cela n'en était pas un pour beaucoup. Lorsque ce poste de dépense ne représente pas plus de 1 % de votre chiffre d'affaires, ce n'est pas très préoccupant. Mais quand il passe à 7 ou 8 % en quelques semaines ça devient un sujet. L'an dernier quand nos clients se retrouvaient à faire « fois sept » avec leurs dépenses d'énergie, nous étions là pour essayer de ramener avec leurs fournisseurs la hausse à « fois quatre ». Nous étions en mode pompier », retrace Charlie Evrard.

Lire aussiFlambée des prix : les boulangers sont dans le pétrin

La bourse pour renforcer l'image et faire participer les salariés

Au milieu de cette tourmente, qui va vu exploser les prix du gaz et de l'électricité, le courtier bordelais ne manquait pas de grain à moudre puisqu'il a pointé en 2022 des écarts de prix entre fournisseurs jusqu'à 30 % et plus ! Autant dire que les chiffres montrent que l'entreprise bordelaise n'a pas raté le coche de cette flambée des prix. Le chiffre d'affaires de Mon courtier en énergie est ainsi passé de 9,8 millions d'euros en 2021 à 19,2 millions d'euros en 2022, soit +95,9 % !

Une dérégulation du marché de l'énergie lancée depuis 1996

La libéralisation du marché de l'énergie dans l'Union européenne a commencé à devenir plus concrète à partir de 1996 avec la première directive sur l'ouverture du marché de l'électricité.  Suivie par celle sur l'ouverture du marché du gaz en 1998. Puis de 1999 à 2004, les nouvelles directives ont ciblé les entreprises européennes utilisatrices d'énergie par tranches de puissance jusqu'à ce qu'elles soient toutes concernées. Depuis 2016, les tarifs réglementés de l'énergie pour les particuliers sont fixés par la Commission de régulation de l'énergie (CRE). En 2021, les tarifs réglementés de l'électricité pour les entreprises sont supprimés à l'exception des microentreprises. Supprimés en 2020 pour les professionnels, les tarifs réglementés du gaz seront à leur tour dérégulés pour les particuliers à compter du 30 juin prochain. Une libéralisation des marchés de l'énergie qui ne rend pas vraiment plus facile la vie des citoyens des États membres de l'Union depuis le début de la crise énergétique.

« Notre résultat net est passé de 593.487 euros en 2021 à 1,8 million d'euros en 2022.... Ce qui est un peu atypique. Nous sommes un « special case » parce que nous sommes rentables. C'est une des raisons qui m'a poussé à aller en bourse. Nous aurions pu faire une opération en « private equity » [financement privé/hors banque - ndlr], mais le marché boursier va renforcer notre image, en nous apportant une plus grande visibilité », résume le dirigeant, qui voit là le moyen pour son entreprise encore très peu connue de montrer son sérieux, pour inspirer davantage confiance, et aussi de faire participer les salariés au capital.

23 agences en France

Charlie Evrard travaille pour plus de 24.000 entreprises et seulement 5 % des entreprises françaises font appel à des courtiers pour leurs achats d'énergie, contre par exemple 35 % en Belgique. L'entreprise de courtage compte 40 salariés à son siège mais aligne déjà 23 agences dans toute la France pour une centaine de courtiers qui ne travaillent pas en franchise mais en contrat de licence de marque, ce qui leur permet d'avoir plusieurs agences et de rayonner éventuellement dans la région au-delà de leur département, si aucune autre agence n'est déjà implantée.

« Nous avons aussi une dizaine de personnes en Espagne et l'entrée en bourse doit nous permettre de nous renforcer sur ce marché, et de nous attaquer à l'Italie », complète Charlie Evrard.

Mon courtier en énergie vient de voir son document d'enregistrement approuvé par l'Autorité des marchés financiers (AMF). Un premier pas vers l'introduction en bourse qui sera suivi par plusieurs autres points de passage réglementaires pour pouvoir arriver sur le marché Euronext Growth Paris.

Lire aussiLe coût de l'énergie contraint Celsa France à réduire sa production d'acier

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.