Drones : le promoteur Laurent Mathiolon veut créer les premiers tarmacs urbains à Bordeaux

Fondateur et dirigeant du promoteur immobilier Aqprim, à Bordeaux, Laurent Mathiolon a décidé de diversifier son activité par l'innovation en développant Airnova, un concept d'immeuble permettant l'atterrissage et le décollage de drones volants en zone urbaine. Projet pour lequel il veut lever 3 millions d'euros d'ici fin mars. Un projet avant-gardiste mais sans doute pas aussi farfelu qu'il pourrait sembler au premier coup d’œil puisque les premiers travaux pratiques pourraient débuter prochainement en Gironde.
Vue d'artiste d'un vertiport d'Airnova
Vue d'artiste d'un vertiport d'Airnova (Crédits : Leclercq Associés & Tibo Cat Lion)

Anticipant un développement de la mobilité aérienne urbaine, Laurent Mathiolon, fondateur et dirigeant de la société de promotion immobilière bordelaise Aqprim, a créé en septembre 2022 la société Airnova dans le port de la Lune. Il confirme le lancement d'une levée de fonds à 3 millions d'euros, qu'il espère boucler d'ici fin mars. Airnova est aussi une marque commerciale et un concept architectural avec « vertiport Airnova » : immeuble de grande hauteur disposant d'un toit capable de recevoir de façon sécurisée des taxis aériens et des drones volants de livraison voire même de transport de passagers. Ce concept avant-gardiste a été développé pour Aqprim par l'agence d'architecture parisienne Leclercq Associés. Innovation qui a fait l'objet d'un dépôt de brevet courant 2022.

« Dans une métropole type de la taille de Bordeaux Métropole, il y a environ une dizaine de sites où il serait possible d'implanter un Vertiport en terrasse ou bien au sol, que ce soit à proximité d'un aéroport, d'une gare, d'une zone d'activité sportive ou encore d'un hôpital. Actuellement nous avons une dizaine de sites à l'étude dont cinq en Gironde. En plus des métropoles il est possible d'aller aussi dans des villes d'une certaine taille implantées en secteur rural », cadre Laurent Mathiolon pour La Tribune.

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Volocopter et Airbus sont aussi sur le coup

La mobilité aérienne en milieu urbain pourrait passer pour une idée farfelue mais, avec le développement continu des moteurs électriques, force est de constater qu'une nouvelle sensibilité se développe dans cette direction, comme le montre le développement par la firme allemande Volocopter, à Karlsruhe, d'un hélicoptère à 18 moteurs électriques pilotable par joystick. Un appareil biplace baptisé Volocity, surmonté d'une sorte de toile d'araignée criblé de petites hélices installées à la verticale, qui a décollé pour la première fois en octobre 2020 de l'aérodrome de Pontoise et qui dispose pour le moment d'une autonomie de vol de 20 minutes.

Un projet qui fait écho à Vahana, du nom du démonstrateur de drone volant autonome monoplace à propulsion électrique (doté de huit hélices) développé depuis 2015 par Airbus. Car les constructeurs d'aéronefs sont convaincus que les drones volants seront à la base de la prochaine révolution aéronautique. En particulier parce que ces derniers semblent estimer -à tort ou à raison- que la gestion du trafic routier dans les métropoles ne sera jamais pleinement satisfaisante. C'est en tout cas l'accroche commerciale jouée par la firme de Karlsruhe.

« Nous sommes aux portes de l'homologation »

« Que proposons-nous ? Un moyen d'éviter les embouteillages et d'atteindre votre destination avec encore du temps de libre disponible », avance ainsi en substance Volocopter.

Ses dirigeants, qui veulent mettre en service des drones capables de transporter des marchandises ou des passagers, estiment qu'ils pourront lancer leurs premiers vols commerciaux à Paris et Singapour d'ici deux à trois ans... Auraient-ils attrapé la berlue ? Rien n'est moins sûr. Car si le survol d'agglomérations par des aéronefs est très réglementé, le cadre légal pour ce type de déplacement pourrait évoluer plus vite que prévu. D'autant qu'aucun opérateur potentiel n'aurait l'idée saugrenue de défendre  la mise en service de vols de drones autonomes, au moins à court terme

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« Les drones électriques volants s'inscrivent dans une mobilité décarbonée. Le premier palier de ce virage sera le transport de matériel médical d'urgence d'un hôpital à un autre. Et même de blessés. Il faut envisager deux tailles de drones représentants des capacités d'emport de quelques kilos et jusqu'à 500 kilos. Les drones transporteurs de personnes cela n'existe pas encore, mais nous sommes aux portes de l'homologation », veut croire le promoteur immobilier bordelais, qui souligne que les plateformes d'atterrissage développées dans le cadre de « vertiport Airnova » seront équipées de bras articulés pour récupérer les colis transportés par les drones.

Drones for life DFL

Des drones transporteurs de petits colis sont déjà en activité, sans compter les derniers drones militaires qui peuvent emporter plus d'une tonne de charge.

La création des premiers couloirs aériens à l'étude

A cause du danger qu'il représente, le transport aérien en milieu urbain est très règlementé, quand il n'est pas tout simplement interdit, et Laurent Mathiolon ne cache pas qu'Airnova s'attache actuellement au traitement de cet aspect crucial des enjeux.

« Nous travaillons avec la DGAC (Direction générale de l'aviation civile) à la construction entre deux points en Gironde des premiers espaces aériens pour permettre aux drones de pouvoir voler. Nous ne sommes pas dans un scénario de science-fiction et il y aura un pilote dans les drones transportant du personnel pour assurer la sécurité, alors que ces derniers seront téléopérés. Même si la technologie est prête, il n'y aura pas de vols de drones autonomes. Si aujourd'hui la question des drones en milieu urbain se pose avec une nouvelle acuité c'est qu'elle est liée à la propulsion électrique, qui connait une forte accélération grâce aux progrès de la technologie des batteries », cadre Laurent Mathiolon.

Les applications civiles sont potentiellement innombrables et susceptibles d'intégrer la création de drones taxis ou de nouvelles unités volantes de lutte contre l'incendie.

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Appliquer des normes qui servent déjà pour les hélicoptères

Comme dans bien des cas, une partie de la solution pourrait venir des applications militaires. Les derniers drones de combat développés par les forces aériennes des Etats-Unis, les modèles Reaper et Mojave, ont ainsi des capacités d'emport d'armes supérieures à une tonne... Conçus pour des théâtres d'opération, ces drones militaires téléopérés sont de grande taille avec des envergures de 20 mètres et plus. Panoplie qui, telle quelle, n'est pas vraiment compatible avec des interventions civiles en milieu urbain.

Laurent Mathiolon souligne que la plateforme d'atterrissage n'est pas le point central de son projet puisqu'il existe déjà des normes très précises rendant possible l'atterrissage des hélicoptères sur les toitures et ces dernières entrent dans le cahier des charges de « vertiport Airnova ».

« C'est de l'infrastructure à construire, des bâtiments ad hoc. Mais nous aurons aussi des plateformes au sol. Nous serons naturellement beaucoup plus présents en périphérie qu'en centre-ville », confirme le patron d'Aqprim.

L'instruction nécessaire à l'adoption par la DGAC des premiers couloirs aériens dédiés aux drones volants en Gironde va démarrer ce mois de janvier et pourrait durer entre six mois et un peu plus d'un an. Les trois millions d'euros que veut lever Airnova d'ici mars prochain doivent notamment servir notamment à financer les recrutements et les investissements nécessaires à l'installation des premiers sites opérationnels.

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