Keenat réunit 3,5 millions d'euros pour recycler mégots, masques et chewing-gums en Europe

Keenat vient de signer une levée de 3,5 millions d'euros pour déployer dans six pays européens ses circuits de recyclage des mégots, masques et chewing-gums. L'activité de cette entreprise bordelaise de l'économie circulaire double chaque année. Elle détient une solution brevetée et s'appuie, pour la collecte, sur un réseau de 50 acteurs de l'insertion. De quoi viser sereinement la position de leader en Europe ?
Avec 5.500 mégots recylés, Keenat fabrique cette plaque permettant de valoriser l'action de la ville de Bordeaux.
Avec 5.500 mégots recylés, Keenat fabrique cette plaque permettant de valoriser l'action de la ville de Bordeaux. (Crédits : Keenat)

Plus de 100 tonnes de mégots ont déjà été collectés en France par Keenat depuis 2019 pour en faire des plaques de plastiques ou alimenter les fours de cimenteries. Ces 588 millions de mégots ne sont qu'une goutte d'eau dans un océan de pollution de 7,7 milliards de mégots jetés chaque année en France dans l'espace public. Mais cet océan donne aussi une idée de la taille du marché auquel s'adresse l'entreprise bordelaise de l'économie circulaire. D'autant qu'en plus des mégots, qui pèsent 90 % de son activité, elle traite également les masques usagés et, à partir de janvier 2023, les chewing-gums, avant de cibler également des vêtements de protection individuelle tels que les blouses, charlottes et autres chasubles. Keenat compte déjà plus d'un millier de clients en France, collectivités locales et entreprises.

"Avec Ecomegot et R'mask, nous sommes les seuls à maîtriser toutes les étapes de la chaîne : la sensibilisation, la collecte et le recyclage de ces déchets non valorisés. Pour cela nous avons une technique brevetée au niveau européen qui permet de transformer masques et mégots en matière plastique pour réaliser des plaques murales. L'idée derrière ces plaques c'est, qu'une fois recyclé, le plastique des mégôts ne se retrouve pas à nouveau par terre", décrit à La Tribune Sandrine Poilpré, la directrice générale et cofondatrice avec Erwin Faure et Edouard Vergé.

Une activité qui assure à la fois la rentabilité du modèle économique et une forte croissance puisque Keenat, qui affiche 1,5 million d'euros de chiffre d'affaires sur 2022, compte bien continuer à doubler son activité chaque année. L'entreprise qui emploie trente personnes vise ainsi 45 salariés d'ici un an puis 70 à l'horizon 2025/2026.

Des emplois en insertion

Pour assurer le ramassage des masques et des mégots dans les collecteurs prévus à cet effet, Keenat, qui est labellisée Esus (entreprise solidaire d'utilité sociale), a noué des partenariats partout en France avec une cinquantaine d'acteurs de l'insertion par l'emploi et du travail des personnes handicapées. "C'est un élément très important de notre modèle de combiner un impact environnemental et un impact social en travaillant avec les acteurs de l'insertion pour créer des emplois locaux", appuie Sandrine Poilpré.

3,5 millions d'euros en Série A

Et pour financer cette croissance qui passera par l'Europe, les trois dirigeants ont signé une levée de fonds de 3,5 millions d'euros auprès du fonds Asterion Ventures avec Impact Business Angels, Aquiti Gestion et Newfund associés à des financements de Bpifrance, France Active, MIROVA et la Banque des Territoires (1). Il s'agit d'une série A après les 500.000 euros levés en amorçage en 2019.

"L'objectif de ces 3,5 millions d'euros c'est d'une part de consolider notre cœur de métier sur le marché français des mégots pour devenir le référent, l'acteur principal du marché. Nous avons déjà des équipes à Bordeaux, Paris, Lyon et Lille et nous allons continuer à mailler le territoire. Et, d'autre part, nous sommes déjà présent en Espagne et en Allemagne et nous allons ouvrir l'Italie et le Benelux", dessine Sandrine Poilpré.

Sandrine Poilpré

Lors de l'évènement "Transformons la France !", organisé par La Tribune, Régions de France et la Région Nouvelle-Aquitaine, le 7 décembre 2022 à Bordeaux, Sandrine Poilpré, pour Keenat, a reçu le Prix "Impact", remis par Ludovic Renaud, membre du directoire de la Caisse d'épargne Aquitaine Poitou Charente (crédits : Agence APPA).

"Un no man's land" en Europe

Et la dirigeante de Keenat n'hésite pas à viser la position de leader européen du recyclage de ces déchets non valorisés dans les toutes prochaines années. Les clefs ? Sa solution brevetée et un marché encore vierge ou presque, comme elle l'explique : "Être leader en Europe, c'est un objectif complètement réaliste car il y a encore très peu d'acteurs en France, et aucun qui opèrent à 360° sur ces trois produits. Et dans le reste de l'Europe c'est un no man's land ! Alors que même que tous les Etats vont devoir appliquer la réglementation européenne croissante sur la REP, la responsabilité élargie du producteur. Il y a donc clairement une place à prendre."

Dans une série de secteurs, la REP, qui s'inspire du principe du pollueur-payeur, impose aux entreprises responsables de la mise sur le marché de certains produits de financer ou d'organiser la prévention et la gestion des déchets issus de ces produits, notamment par le biais d'éco-organismes. Pour la gestion des mégots, il s'agit d'Alcome, un éco-organisme créé en 2021 et dont l'entreprise bordelaise est partie prenante aux côtés notamment des cigarettiers et buralistes.

(1) Il s'agit de 1,6 million d'euros investis dans le capital de l'entreprise et de 1,9 million d'euros de financements non dilutifs (prêts et subventions).

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.