Coop & Bat se dote d'un siège social en paille et matériaux de récupération

Construire un bâtiment à ossature bois et isolation avec bottes de paille en matériaux de récupération, c'est le défi que s'est lancée la coopérative d'activité et d'emploi Coop & Bat, à Bassens (Bordeaux Métropole). Intervenant dans le Bâtiment, cette dernière mène cette expérience grandeur nature sur les matériaux de récupération avec de nombreux partenaires, qui vont de la Métropole au bailleur social Domofrance.
Vue d'artiste du futur siège de Coop et Bat par Claverie Architecture.
Vue d'artiste du futur siège de Coop et Bat par Claverie Architecture. (Crédits : Claverie Architecture)

Coop & Bat, coopérative d'activité et d'emploi installée à Bassens (Bordeaux Métropole), vient de se lancer dans la construction de son nouveau siège social à partir de matériels de récupération. Un pari encore avant-gardiste dans l'univers du Bâtiment, même si plusieurs techniques mises en œuvre ont depuis des années fait la preuve de leur efficacité.

"Nous voulons que ce bâtiment qui sera construit en bois et isolé avec des bottes de paille soit exemplaire. Le projet repose sur le réemploi de matériaux. Cela se fait déjà dans le bâtiment avec la récupération de certains éléments, comme les fenêtres, des poutres en bois, etc. Même l'isolation avec des bottes de paille est assez ancienne puisqu'elle remonte au XIX° siècle", éclaire pour La Tribune Frédéric Rabiller, coordinateur réemploi à Coop & Bat.

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Ce dernier évoque le cas de la célèbre Maison Feuillette, à Montargis (Loiret), construite en 1923 par l'ingénieur Emile Feuillette, en ossature bois avec une isolation en bottes de paille. La restauration en 2013 de cette maison par les adhérents du Réseau français de la construction paille (RFCP) rappelle que le savoir-faire des maisons de paille ne s'est pas perdu et s'étend désormais aussi aux problématiques d'isolation thermique.

Impossible de travailler en flux tendu

"La construction des maisons de paille repose sur un modèle de développement différent du tout-pétrole, ce qui explique qu'elle ne soit pas portée par des industriels mais par des volontaires", complète Frédéric Rabiller.

La rupture fondamentale du projet de Coop & Bat ne tient donc pas dans la technique de construction proprement dite, mais bien dans l'usage généralisé de matériaux de seconde main. Coop & Bat développe son projet, porté par l'agence d'architecture Claverie architecture, à Baliros (Pyrénées-Atlantiques), spécialisée en conception bioclimatique, en partenariat notamment avec le bailleur social Domofrance, à Bordeaux, mais aussi la mairie de Bassens, le Grand projet des villes (GPV) de la Rive droite (Bassens, Cenon, Floirac, Lormont), Bordeaux Métropole et la Région Nouvelle-Aquitaine.

"Dans le cadre de ce partenariat nous étions à la recherche de matériaux et d'un local de stockage. Parce que dans un processus de démolition-construction on ne peut pas être en flux tendu : il faut récupérer, stocker et ensuite construire. Grâce à Domofrance nous pouvons récupérer du bois, des garde-corps... A Bassens, nous avons pu récupérer la totalité des sanitaires de l'école Frédéric Chopin. De la même façon nous avons récupéré 40 vitrages de la part des architectes qui ont déconstruit une tour d'habitation à Pau. Nous faisons bien du réemploi. C'est-à-dire que nous récupérons des matériaux qui seront réutilisés à l'identique. Ce qui est très différent d'une réutilisation, où les matériaux récupérés sont utilisés pour une autre destination que celle qui était la leur au départ", décortique Frédéric Rabiller.

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Comment fonctionne Coop & Bat

Ce projet immobilier, qui représente environ 1 million euros d'investissement, a obtenu son permis de construire en juin 2021 et doit être livré en 2023. Il est appuyé par les collectivités à hauteur de près de 40 %. Coopérative d'activité et d'emploi, Coop & Bat permet à des entrepreneurs de se lancer plus facilement dans le secteur du BTP en leur apportant un certain nombre d'aides liées à la mutualisation des moyens.

"Actuellement, nous sommes une centaine d'entrepreneurs. Pour créer une entreprise à part entière en passant par Coop & Bat il y a trois phases. Le créateur doit tout d'abord se familiariser avec le fait de devenir un chef d'entreprise à part entière, même si la coopérative prend en charge les démarches administratives. Leur rémunération dépend de leur activité et, dès que ça marche, ils passent en contrat à durée indéterminée. Ensuite ces entrepreneurs vont vivre trois années de test. Si leur activité est toujours rentable à l'issue de cette phase, alors ils deviennent associés de la coopérative. Sinon ils partent", précise Frédéric Rabiller.

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Le nouveau siège avec un atelier tournant

C'est pour répondre aux contraintes matérielles actuellement subies par les entrepreneurs de la coopérative, qui ne dispose que d'un atelier tournant à Arcachon, que la construction du nouveau siège social a été pensée.

"Jusqu'ici nous étions en location dans un immeuble tertiaire à Lormont. C'est pourquoi le nouveau siège social de Coop & Bat va développer 600 m2 de bureaux et d'atelier, et 120 m2 de stockage. Nous faisons le pari de regrouper trois à quatre entrepreneurs dans le même petit atelier, de façon tournante. Celui que nous avons à Arcachon fonctionne bien", décrypte Frédéric Rabiller.

En 2020, Coop et Bat, qui a été fondée en 2011 et dont Yannick Puisset est le gérant, fédérait 110 entrepreneurs, parmi lesquels 55 associés, pour un chiffre d'affaires total de 4,2 millions d'euros.

Evaluer la performance des matériaux récupérés

Avec la construction de ce siège social Coop & Bat défriche à Bassens un terrain presque vierge où les questions ne manquent pas.

"Un des problèmes concerne le manque de traçabilité. Quand j'achète du matériel d'occasion qu'est-ce que j'ai acquis ? Ce besoin est en train de provoquer l'émergence d'intermédiaires spécialisés. Ce type de construction à partir de matériaux récupérés relève encore d'un choix volontariste, d'une approche expérimentale. Actuellement ce n'est pas rentable, nous testons pour voir. Nous avons envie de récupérer tout ce qui est possible pour construire notre nouveau siège social mais nous avons besoin de connaître les performances réelles de ces produits de récupération", évalue Frédéric Rabiller.

D'autant plus qu'il faut intégrer des éléments de calcul règlementaire dans cette équation circulaire.

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