A Talence, Nobatek/INEF4 articule ville intelligente et patrimoine historique

Le centre de recherche dans le bâtiment, Nobatek/INEF4, installé à Talence, travaille avec des partenaires européens sur le pilotage par la donnée des centres historiques touristiques. Ou comment utiliser les outils de la smart city pour préserver le patrimoine tout en le valorisant d'un point de vue touristique. Une initiative qui pourrait essaimer à Saint-Emilion et Bayonne. Parallèlement, Nobatek/INEF4 envisage une dizaine de recrutements en 2018 à Anglet, Talence, Rennes et Paris.
La vieille ville espagnole d'Ávila, en Castille-et-León, est classée au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1985.
La vieille ville espagnole d'Ávila, en Castille-et-León, est classée au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1985. (Crédits : FLickr CC by Santiago Lopez-Pastor)

"Smart heritage city" : c'est le nom de ce projet européen qui vise à connecter les centres villes historiques pour en faciliter la gestion et la préservation... tout en accompagnant leur développement touristique. Deux objectifs pas forcément compatibles à première vue. L'institut national pour la transition énergétique et environnementale du bâtiment (Nobatek/INEF4), installé à Anglet (Pyrénées-Atlantiques) et sur le campus universitaire de Talence (lire ci-dessous), est l'une des parties prenantes de cette expérimentation menée en Espagne (*).

230 capteurs en secteur Unesco

La vieille ville d'Avila, en Castille, est ceinte d'une muraille de plus de 2,5 km de long bâtie entre le XIe et XIVe siècle et dotée de neuf portes d'entrée et 88 tours. 230 capteurs connectés ont été installés dans ce secteur classé au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1985. L'objectif est de faire remonter des informations sur l'état des bâtiments historiques tels que les églises, les musées, les palais et la muraille elle-même. "Cela doit permettre d'en faciliter la gestion en termes de dégradations naturelles ou volontaires, d'affluence touristique et de consommation énergétique", détaille Aurélien Henon, qui pilote le projet chez Nobatek/INEF4.

L'autre volet de cette expérimentation concerne la fréquentation touristique de ces sites classés. "Nous développons une application sous Android pour proposer aux visiteurs des informations en temps réel sur les horaires, l'affluence et le taux de remplissage, les temps d'attentes, les bâtiments à ne pas manquer, etc. De quoi permettre d'optimiser les flux de déplacements", poursuit le chef de projet.

Définir une grille de lecture

Concrètement, il s'agit de capteurs d'ambiance (température, humidité, etc.), de détecteurs de présence, de détecteurs de xylophages pour les structures en bois, de fissuromètres pour les éléments en pierre, de capteurs météo, etc. De quoi faire remontée des quantités massives de données,. C'est sur le traitement de ce "big data" qu'est intervenue l'équipe de Talence, comme l'explique Aurélien Henon :

"Notre plus-value concerne le choix du matériel, la stratégie de mesure, l'exploitation des données et la définition d'indicateurs intelligents et compréhensibles par les gestionnaires, qui ne sont pas des experts. Nous créons la grille de lecture qui permettra d'assurer l'interface entre les données brutes et les choix des décideurs."

En tant que seul partenaire français du sujet, Nobatek/INEF4 compte aussi sensibiliser des collectivités locales tricolores, notamment dans le Sud-Ouest. Les communes de Saint-Emilion (Gironde) et de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), qui possèdent un patrimoine classé à l'Unesco, sont ainsi associées au projet et pourraient se porter candidates pour déployer le dispositif sur leur territoire.

Une logique open source

L'objectif final de ce programme européen - doté de 1,2 M€ sur la période 2016-2019 - est en effet de mettre à disposition en open source une architecture facilement duplicable sur n'importe quel centre historique, rejoignant ainsi la logique de Nobatek/INEF4 qui a vocation à rapprocher les initiatives de R&D d'une mise sur le marché. "Les villes à fort patrimoine culturel ont en général beaucoup de bâti à entretenir et donc à surveiller. Tout cela a un coût. Les capteurs permettent d'anticiper certaines dégradations, d'ajuster au mieux la consommation énergétique et donc d'économiser. L'idée est vraiment de donner aux gestionnaires de ces sites une aide à la décision pour permettre un pilotage efficace", insiste Aurélien Henon. Les modélisations économiques pour définir un prix de commercialisation seront menées cette année mais l'idée sera de proposer un retour sur investissement compétitif.

Après un premier programme Smart Heritage Building mené autour du musée basque, à Bayonne, de 2012 à 2015, le programme Smart Heritage City pourrait laisser place en 2019 à une troisième étape élargie à une échelle régionale ou départementale pour gérer un patrimoine historique diffus. Les tissus d'églises en Espagne, en Italie et dans le Sud de la France constitueraient un terrain d'expérimentation idéal.

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Nobatek/INEF4, une SCIC sans but lucratif

C'est un peu le fameux chaînon manquant entre le monde de la recherche et celui des entreprises. Créé en 2004 sous la forme d'une association loi 1901, Nobatek/INEF4 a adopté fin 2016 le statut de société anonyme, sous la forme originale de société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) à but non lucratif. Un statut qui a permis à 32 des 60 salariés d'entrer au capital en tant qu'associés aux côtés des autres partenaires (startups, PME, ETI, grands groupes, universités et centre de recherche, personnes physiques et organismes publics). Dominique Thomasson, le président de Coveris, entreprise spécialisée dans les façades vitrées à forte technicité, préside la SCIC depuis janvier 2017 pour un mandat de six ans. Les bénéfices dégagés ne sont pas versés à des actionnaires mais réinvestis en interne. Un fonctionnement cohérent avec la raison d'être de Nobatek/INEF4 qui se positionne comme le lien entre la recherche appliquée et les applications commerciales du marché, dans une logique d'innovation ouverte et collaborative.

En 2016, Nobatek/INEF4 a enregistré un chiffres d'affaires de 3,6 M€. Cette année, l'ouverture de deux bureaux est prévue à Rennes et à Paris. Un déploiement national qui s'accompagnera a minima d'une dizaine de recrutements tout au long de l'année. Les quatre sites et tous les métiers de Nobatek/INEF4 sont concernés.

(*) Piloté par la fondation Santa Maria del Patrimonio Historico, le projet Smart Heritage City s'inscrit dans le programme européen Interreg Sudoe et associe différents partenaires publics et privés espagnols, portugais et français.

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