Vues respectivement 2,4 et 1,8 millions de fois sur YouTube et Facebook, les images de mauvais traitement faits aux animaux au moment de leur abattage publiées par l'association lyonnaise L214 sur les abattoirs d'Alès, en octobre, et du Vigan (Gard), le mois dernier, ont entraîné leur fermeture provisoire.
Autant dire que les images rendues publiques aujourd'hui et qui concernent, cette fois, l'abattoir du Pays de Soule, situé à Mauléon-Licharre dans les Pyrénées-Atlantiques, risquent, elles aussi, de battre des records d'audience, même si elles sont fortement déconseillées aux âmes sensibles... ou pas. Une audience qui aura vraisemblablement les mêmes conséquences... voire plus.

"Tournées au mois de mars 2016 juste avant Pâques, ces images révèlent les pratiques de mise à mort des agneaux de lait ainsi que l'abattage de veaux et de bovins, dans un abattoir certifié bio et qui met en avant Label Rouge et l'IGP", précise l'association.

Contacté par Le Monde, le directeur de l'abattoir, propriété de la coopérative Axuria (Société coopérative créée en 1983 et qui regroupe 162 éleveurs basques), qui transforme 50.000 agneaux et 1.000 vaches et veaux par an, ne cachait pas sa colère après le visionnage des images.

Son directeur : "On est cuits"

Une colère qu'il dirige contre certains des 37 employés de l'abattoir basque.

"Je suis effondré, catastrophé, écrit-il sur le site du Monde. Je suis très souvent dans mon abattoir, j'ai essayé d'améliorer les conditions d'abattage depuis des années, et là, on tourne le dos, et des employés frappent les bêtes. On est cuits", lâche-t-il, sous-entendant que l'abattoir, qui réalise 4,5 M€ de chiffre d'affaires annuel, ne se remettra pas d'une fermeture provisoire.

Quelques heures plus tard, le maire de Mauléon-Licharre prononçait la fermeture de l'abattoir :

"Prenant à l'instant connaissance d'une vidéo ayant été tournée dans les abattoirs de la commune, je prononce la fermeture de l'abattoir pour une durée indéterminée, à titre conservatoire, le temps de faire l'enquête  qui devra faire la lumière sur les pratiques visibles sur cette vidéo.
Je demande à la direction de l'abattoir de prendre sur le champ toutes les mesures et sanctions adéquates envers les auteurs de ces actes,  sans préjuger des sanctions ou mesures plus importantes à venir , suite aux résultats qui résulteront de l'enquête réalisée.
Notre abattoir est réputé pour la qualité de son travail auprès de ses clients et dans son environnement, et ne saurait accepter de telles pratiques sous aucun prétexte bien évidemment."

Dépôt de plainte et demande de transparence

Si le directeur de l'abattoir assure que les salariés en cause seront licenciés, l'association L214 annonce que ces pratiques vont entraîner de sa part une plainte contre l'abattoir auprès du Tribunal de grande instance de Pau et que, d'ici la fin de cette semaine, elle déposera également un référé expertise qui vise à caractériser les défaillances des services vétérinaires dans leur mission de contrôles de cet abattoir, mais aussi ceux d'Alès et du Vigan.

Par ailleurs, dans une pétition adressée au Premier ministre Manuel Valls, l'association demande une transparence effective des abattoirs via : la mise à disposition publique des rapports d'inspection et des mises en demeure rédigées par les services vétérinaires à l'encontre des abattoirs ; un accès libre et inopiné des abattoirs aux associations de défense des animaux ; la pose de caméras sur les postes de déchargement, d'attente, d'amenée et d'abattage des animaux avec accès libre des associations aux images ; la liberté de diffuser les informations ainsi obtenues.

Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt, a réagi en milieu d'après-midi en annonçant des inspections dans tous les abattoirs d'ici un mois.