Une conjoncture correcte mais sans plus au 2e semestre 2018 en Nouvelle-Aquitaine

Le 2e semestre 2018 a été correct mais sans flamboyance, selon le baromètre économique publié par la Chambre de commerce et d'industrie Nouvelle-Aquitaine. Son président Jean-François Clédel détaille les chiffres et évoque également la future réorganisation des CCI, dont les contours devraient être mieux connus dans quelques semaines sur fond de baisse des ressources fiscales.
Jean-François Clédel, président de la CCI Nouvelle-Aquitaine

Chaque mois, la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) Nouvelle-Aquitaine sonde un large panel d'entreprises. La dernière mouture, réalisée entre le 7 et le 18 janvier, a sollicité 3.812 chefs d'entreprises et porte sur le 2 semestre 2018. Bilan : la croissance est moins soutenue que les semestres précédents, évoquant "un essoufflement bien réel" mais aucun département n'enregistre d'indicateurs de chiffre d'affaires en baisse. "En revanche ils déclinent pour la trésorerie et les marges, et tous les secteurs sont touchés", synthétise Jean-François Clédel, président de la chambre consulaire régionale.

Si les dirigeants étaient 35 % à avoir investi au 2e semestre 2018, ils ne devraient être que 27 % au 1er semestre 2019, signe d'une prudence notable. Dans le détail, la construction et l'industrie se portent bien. Dans le commerce, le bilan est très contrasté avec des fragilités repérées sur les marges et la trésorerie. Dans les services, le climat des affaires est moins favorable, même si cette tendance paraît épargner les services aux entreprises, mais les perspectives sont en hausse pour le 1er semestre 2019. Quant au tourisme, il a vécu un 2e semestre 2018 globalement décevant.

L'impact du mouvement des Gilets jaunes se fait ressentir

S'il demande à être étayé par des chiffres précis, l'impact du mouvement des gilets jaunes se fait déjà ressentir selon les chefs d'entreprise. "Près d'un dirigeant sur deux évoque un impact sur l'activité de son entreprise, notamment des retards dans les expéditions et les livraisons. Un tiers d'entre eux estiment que leur chiffre d'affaires est impacté", développe Jean-François Clédel. Le paradoxe systématiquement constaté lors de ce sondage est toujours présent, mais plus marqué : "Les chefs d'entreprise ont confiance dans les perspectives de leur entreprise (à 74 %) mais beaucoup moins dans celles de l'économie nationale (à 32 %) : cet indicateur perd 20 points par rapport au semestre précédent." Un dirigeant sur dix a déjà mis ou pensent bientôt mettre en place des mesures tels que du chômage partiel. C'est le commerce de détail non alimentaire qui semble être globalement le plus touché, à 60 %. Et les premiers indicateurs semblent montrer que la Corrèze aurait été le département le plus impacté de Nouvelle-Aquitaine.

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Concernant le Grand Débat voulu par Emmanuel Macron, "les CCI territoriales se mobilisent à leur niveau. Certaines organisent des débats, d'autres optent pour un questionnaire en ligne, séparément des organisations professionnelles ou patronales sauf en Corrèze. Dans le cadre de ce Grand Débat, 3 millions de chefs d'entreprise pourraient faire entendre leur voix", ajoute Jean-François Clédel. Qui déplore au passage que "beaucoup de choses résultent de l'inculture économique" des Français, comme la contribution réelle des entreprises à l'économie française.

Réorganisation en vue

Ce que l'élu consulaire calcule également, c'est l'ampleur de la baisse des ressources fiscales qui impacte les CCI. Après une hausse sensible de leurs moyens au cours des années 2000, les CCI sont en effet mises à une diète stricte depuis 2012 avec la baisse de la taxe qui lui est affectée, assise sur la CVAE et la CFE acquittées par les entreprises. D'ici 2022, une baisse de ces crédits de 375 à 400 M€ serait ainsi imposée aux chambres consulaires françaises. Pour les CCI de Nouvelle-Aquitaine, la taxe pèse en moyenne 50 % du budget des chambres.

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"On sera amené à diminuer les effectifs des CCI si l'on voit le sujet avec une approche arithmétique, poursuit Jean-François Clédel. Si l'on adopte une approche dynamique, la perspective est différente." Aujourd'hui les CCI poursuivent plusieurs missions : "L'appui aux entreprises, la formation, la représentation des entreprises notamment auprès des pouvoirs publics, l'appui au territoire et la gestion d'équipements structurants", énumère Jean-François Clédel. Qui fait bien comprendre qu'un recentrage semble inéluctable et que "le modèle économique des CCI doit être repensé ainsi que nos façons de travailler". Ce que, du reste, demande précisément le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire... Progressivement, les chambres consulaires vont devoir basculer vers un nouveau modèle où leurs services seront facturés aux bénéficiaires. Toutes les CCI confondues de Nouvelle-Aquitaine emploient 1.500 personnes. S'il évoque des départs à la retraite non remplacés, Jean-François Clédel ne chiffre pas pour le moment la baisse des effectifs envisagée. Plusieurs groupes de travail planchent actuellement sur les différents paramètres. Un plan de réorganisation devrait être présenté à l'occasion de la prochaine assemblée générale de la CCI Nouvelle-Aquitaine, début mars. Objectif : "Repenser l'organisation mais préserver de la proximité".

Infrastructures et formation

Les chambres consulaires suivent de près le devenir des grands acteurs structurants de la région, a fortiori quand elles en sont actionnaires comme c'est le cas avec l'aéroport de Bordeaux-Mérignac pour la CCI Bordeaux Gironde. Concernant le port de Bordeaux, en grande difficulté, Jean-François Clédel appelle à la mise en place d'une véritable réflexion sur six mois pour définir une politique régionale en la matière. L'Etat et la Région discutent en effet d'un transfert des compétences du premier au second. "Nous avons besoin de tous nous mettre autour de la table pour bâtir un projet pendant six mois dans un contexte régional", poursuit Jean-François Clédel, qui juge prioritaire "le fait de relancer le terminal à conteneurs du Verdon. Ce qui suppose un franchissement pour rejoindre facilement l'A10, pas obligatoirement un pont mais peut-être une barge dans un premier temps." L'élu consulaire estime qu'il faut également "convaincre les chargeurs, les exportateurs, en faisant vibrer la fibre territoriale" alors que des départs de conteneurs, de vin par exemple, se font parfois hors de France, échappant aux ports français et notablement celui de Bordeaux.

Le président de la CCI Nouvelle-Aquitaine rappelle également que les chambres de commerce et d'industrie sont impliquées dans la formation, alors qu'il s'agit de la dernière année où elles collecteront la taxe professionnelle. "Nos écoles de commerce sont, en matière de recherche, à la remorque des universités. Elles devraient pourtant être capables d'avoir dans leurs rangs des Jean Tirole (prix Nobel d'économie, NDLR). Elles aussi vont devoir repenser leur modèle économique", estime Jean-François Clédel.

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