Europlasma autorisé à exporter ses corps creux pour fabriquer des obus de 155 mm

Emporté par les effets de la guerre de haute intensité que livrent les Russes aux Ukrainiens, le groupe Europlasma a reçu ce mardi l'autorisation du ministère de la Défense d'exporter, conformément aux attentes de l'Otan, des grands corps creux fabriqués par sa filiale les Forges de Tarbes et qui vont servir à fabriquer des obus de gros calibre. Le groupe a par ailleurs relancé l'activité d'Inertam, un temps stoppée à cause de la montée des prix de l'électricité.
Une coulée de déchets d'amiante traités par Inertam.
Une coulée de déchets d'amiante traités par Inertam. (Crédits : Agence Appa/Eric Barrière)

Ce mardi 14 février le groupe Europlasma, à Morcenx (Landes), spécialisé dans la dépollution utilisant la torche à plasma, annonce que sa filiale les Forges de Tarbes, à Tarbes, vient de recevoir l'agrément du ministère de la Défense pour exporter des corps creux de gros calibre destinés à la fabrication d'obus de 155 millimètres. Impossible de savoir dans l'immédiat combien de ces grands corps creux seront vendus à l'étranger et à l'armée française ni combien ils devraient générer de chiffre d'affaires. Le groupe landais, qui emploie près de 200 salariés, annonce qu'il va investir 7 millions d'euros dans sa filiale tarbaise au cours des trois prochaines années pour porter sa production annuelle de grands corps creux de 40.000 pièces aujourd'hui à 95.000 en 2024, et 120.000 en 2025.

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« Le marché de la fabrication de grands corps creux destinés à la production d'obus est en plein retournement. C'est très frappant. Nous passons d'un marché de la demande à un marché de l'offre : celui qui est en capacité de saturer ses capacités de production est sûr de vendre. Car il y a désormais très peu de producteurs, dotés de capacités de production minuscules, alors que la demande est devenue énorme, du niveau des besoins de l'Otan [Organisation du traité de l'Atlantique Nord, ndlr] il y a plus de trente ans » recadre Jérôme Garnache-Creuillot pour La Tribune.

Trouver des minutions : au centre des préoccupations de l'Otan

Après une trentaine d'années de politique de désarmement, suite à la chute de l'URSS, les capacités industrielles de production militaires ont lourdement chuté dans la plupart des domaines, en particulier dans les pays d'Europe de l'Ouest. Et la production d'obus devrait selon le patron d'Europlasma rapidement passer dans les pays européens de l'Otan de quelques dizaines de milliers de pièces par an à plusieurs millions. Et il n'y a sûrement pas de hasard si le ministère de la Défense a décidé d'annoncer ce mardi 14 février l'autorisation donnée à Europlasma d'exporter des grands corps creux pour fabriquer des obus de gros calibre. Puisque c'est précisément ce même mardi que les ministres de la Défense des pays membres de l'Otan ont décidé de se retrouver, jusqu'à demain 15 février à Bruxelles, dans le cadre du Conseil de l'Atlantique Nord.

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Leur premier objectif : arriver à accélérer la fourniture d'armements et de munitions à l'Ukraine, qui fait face à la très violente guerre d'invasion déclenchée sur son sol par la Russie. Sachant que selon Jens Stoltenberg, secrétaire général de l'Otan, les forces ukrainiennes consomment une quantité de munitions largement supérieure à la production actuelle des alliés de l'Otan, qui doivent impérativement augmenter leurs capacités de fabrication. Selon une source militaire anonyme contactée par Radio France International (RFI), les Russes auraient tiré jusqu'à 50.000 obus par jour en juillet dernier et les Ukrainiens jusqu'à 6.000.

 Des torches à plasma et des obus

« Nous avons investi dans les Forges de Tarbes pour augmenter la qualité de la production, en faisant chuter le taux de rebuts, pour stabiliser le niveau de production et pour augmenter les capacités de production. Ce qui va nous permettre d'augmenter tout d'abord la production de grands corps creux destinés à la fabrication d'obus à 40.000 pièces par an » rembobine le PDG d'Europlasma.

Europlasma n'a pas racheté les Forges de Tarbes pour fabriquer des obus mais des torches à plasma. Ces dernières étant à la base des technologies de dépollution développées par le groupe landais. Puisque les déchets les plus toxiques sont vitrifiés sous l'effet des très hautes températures générées par l'état plasma. Opération qui permet notamment de réduire à néant toute source de pollution et ensuite de recycler des matériaux traités.

Les commandes d'Inertam à la hausse

Première société créée dans le périmètre immédiat du groupe landais, Inertam reste une locomotive pour l'activité du groupe. Spécialisée dans l'inertage à titre définitif des matériaux amiantés, grâce au traitement à très haute température, Inertam est en train de voir son carnet de commande bien se remplir. Ce qui n'empêche pas le groupe de connaitre des difficultés puisque pour générer l'état plasma, avec des températures autour de 1.500 degrés, il faut consommer beaucoup d'électricité.

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« En 2022, avec la crise énergétique, Inertam a fonctionné pendant six mois. Nous avons la capacité de traiter 7.000 à 8.000 tonnes de déchets amiantés par an. Mais en 2022 nous avons procédé à des arrêts et traité de l'ordre de 3.000 à 3.500 tonnes. Le prix de l'électricité est monté beaucoup trop haut, autour de 800 à 900 euros le mégawatt heure. Comme nous négocions nos contrats pour une durée d'un an il valait mieux fermer Inertam, le temps que les cours redescendent » rembobine le PDG.

C'est ainsi qu'Inertam a également fermé en novembre et décembre. Depuis, le cours de l'électricité a sérieusement baissé et Jérôme Garnache-Creuillot explique avoir signé un nouveau contrat annuel à 80 euros le mégawat heure. Europlasma a fortement investi pour remettre l'outil industriel d'Inertam à niveau et le PDG souligne qu'aujourd'hui l'entreprise consomme dans le même temps deux fois moins d'énergie qu'auparavant et traite deux fois plus de déchets ! De nouvelles commandes venues d'Italie, pour 2.500 tonnes de déchets amiantés, mais aussi de Suisse, pour 500 tonnes minimum en 2023 ont été signées courant 2022.

Une opération de désendettement à hauteur de 1,5 million d'euros

Le groupe landais a réduit drastiquement le nombre de ses actions cotées à raison d'un échange d'une action nouvelle contre dix milles anciennes, Par ailleurs Europlasma vient de se désendetter à hauteur de 1,5 million d'euros auprès du fonds de dette EPF (Environmental Performance Financing) détenu par Alpha Blue Ocean (ABO) - fonds d'investissement londonien grâce auquel Europlasma a pu éviter le dépôt de bilan et la liquidation en 2019. Cette opération dilutive annoncée le 6 février dernier permet à Europlasma de solder 1,5 million de dette sur un total de 3,9 millions d'euros (avec un plafond à 14,4 millions d'euros) contractés auprès d'EPF par le biais d'une compensation de créance en actions.

Enfin Europlasma a annoncé ce 9 février être entré en négociations exclusives pour procéder au rachat de la société Terbis, qui dispose notamment d'outils spécifiques pour traiter les terres polluées par plusieurs types de substances, comme l'arsenic, les hydrocarbures ou mercure, associés, et c'est une capacité sans équivalent selon le PDG d'Europlasma, à l'amiante.

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