EDF : la centrale nucléaire du Blayais met le cap sur un grand carénage à quatre réacteurs

EDF Sud-Ouest va être très impliquée pour les prochaines années dans le grand carénage de la centrale nucléaire du Blayais (Gironde), qui va renforcer son niveau de sécurité avec 300 emplois créés dès 2021. Dans le même temps, la branche régionale continue à se développer dans les énergies renouvelables. L'énergéticien national commence aussi a mesurer la force d'impact de la crise sanitaire sur ses clients du Sud-Ouest.
La centrale nucléaire du Blayais est juste au bord de l'estuaire de la Gironde.
La centrale nucléaire du Blayais est juste au bord de l'estuaire de la Gironde. (Crédits : EDF)

Martin Leÿs, délégué régional d'EDF Sud-Ouest, Sèverin Buresi, directeur du centre nucléaire de production d'énergie de Blaye, Philippe Belet, directeur d'EDF Sud-Ouest Renouvelables, et Olivier Roland, directeur EDF commerce Sud-Ouest ont présenté, ce mardi 26 janvier, les grands enjeux régionaux pour l'énergéticien national.

La loi Notre (Nouvelle organisation territoriale de la république), qui a accouché en 2016 de nouvelles collectivités régionales, dont la Nouvelle-Aquitaine, n'a pas  simplifié la vie d'EDF, dont la région Sud-Ouest reste constituée par les ex-régions Aquitaine et Midi-Pyrénées. D'où certains chevauchements des données : EDF emploie ainsi 9.000 salariés en Nouvelle-Aquitaine, dont 5.200 dans l'ex-Aquitaine, et réalise un chiffre d'affaires de près de 2,8 milliards d'euros à l'échelle de sa région opérationnelle du Sud-Ouest.

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EDF Sud-Ouest est venu en aide aux plus fragiles

Lors de cette conférence de presse, Martin Leÿs est revenu sur 2020, une année sombrement atypique qui ne pouvait pas totalement surprendre EDF, qui élabore des scénarios prédictifs pour être capable de faire face aux crises les plus critiques.

"Lors du premier confinement tous les salariés étaient sur le pont 24 heures sur 24 pour maintenir la production de notre électricité, à 96 % bas carbone. Nous avons mobilisé aussi des conseillers solidarité, pour qu'ils viennent en aide aux personnes en difficulté. Par le biais de notre partenariat avec la Fondation Bordeaux Université, nous avons pu fournir 15.000 euros d'aide aux étudiants, mais aussi 1.000 paniers alimentaires aux plus démunis à Bordeaux. Au total, nous avons alloué 310.000 euros à 30 structures associatives. Nous avons également accueilli 470 alternants, recrutés dans toute la Région", a tout d'abord éclairé le délégué régional.

Un grand carénage pour quatre réacteurs

Le délégué régional a rappelé l'importance de réussir le virage de la transition énergétique et souligné qu'EDF, par la main de son PDG Jean-Bernard Lévy, avait signé en juin 2020 un accord dans ce sens avec Alain Rousset, président de la région Nouvelle-Aquitaine. Martin Leÿs a également souligné qu'EDF allait contribuer au plan national de relance en Nouvelle-Aquitaine, et qu'il venait de s'entretenir à ce sujet avec Alain Rousset et Fabienne Buccio, la préfète de la Gironde et de Nouvelle-Aquitaine. Il a également rappelé que la stratégie du groupe national tenait dans sa nouvelle accroche : "Construire un avenir neutre en CO2". EDF reste encore l'opérateur historique clé de la production d'électricité d'origine nucléaire en France, même si le groupe a commencé depuis quelques années à se mettre aussi au vert.

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Et 2021 va marquer une date importante pour les quatre réacteurs de la centrale nucléaire du Blayais (nord Gironde), puisque cette dernière va vivre dix années au rythme d'un grand carénage. Il ne s'agit pas vraiment de mener une opération de maintenance mais bien plutôt de faire évoluer la centrale vers un niveau supérieur de sécurité. Questionné à ce propos, le directeur de la centrale nucléaire a reconnu que, d'ici quinze ans, il ne resterait peut-être plus (pour des raisons politiques -Ndlr) que deux réacteurs sur quatre. Tout en précisant qu'aux vues de la future hausse démographique et économique de la région, EDF avait décidé d'investir sur les quatre réacteurs.

La centrale du Blayais disposait d'un Plan pandémie

Après la terrible catastrophe nucléaire de Fukushima, au Japon en 2011, déclenchée par un séisme et un tsunami d'une violence exceptionnelle, l'Autorité de sécurité nucléaire (ASN) a demandé l'année suivante à EDF de renforcer ses marges de sécurité, pour mettre les centrales nucléaires françaises à l'abri d'une catastrophe naturelle d'intensité comparable. De fait ce très coûteux renforcement de la sécurité du parc nucléaire, globalement évalué à près de 50 milliards d'euros, a pris du retard. C'est dans cette perspective que s'inscrit le grand carénage de la centrale nucléaire du Blayais même si Sèverin Buresi, le directeur du site, qui a tout d'abord rembobiné la situation jusqu'au début de l'année 2020, n'a jamais fait référence à l'accident japonais.

"Dès le début de la pandémie, avant même le confinement, nous avons commencé à changer nos habitudes, en évitant par exemple de nous serrer les mains. Et quand le confinement a commencé, nous avons tout de suite appliqué le plan destiné à faire face à une pandémie, élaboré depuis dix ans. Objectif : maintenir opérationnelles les fonctions vitales de la centrale nucléaire. Nous ne pouvions pas tout prévoir à l'avance, mais ce plan pandémie nous a permis d'avoir une base solide et de rester efficaces. Nous avons pu réduire l'effectif présent à la centrale de 1.800 salariés à 400 en un temps record, et de faire passer près de 900 personnes en télétravail dans la foulée", déroule Sèverin Buresi.

La centrale du Blayais à l'heure du grand carénage

La centrale du Blayais emploie 2.000 salariés, dont 700 prestataires. Elle dispose de quatre réacteurs de 900 MW chacun et produit 60 % de l'électricité annuellement consommée en Nouvelle-Aquitaine. Son fonctionnement se solde ordinairement par 50 millions d'euros de commandes passées auprès des entreprises de la région. Avec le grand carénage, le montant de ces commandes va grimper à 300 millions d'euros et la centrale va devoir faire appel à 600 emplois nouveaux, qui seront créés par ses partenaires, dont 300 dès 2021. Un pic de 3.500 salariés sur site est attendu en 2023.

La digue de la centrale rehaussée de 8,50 mètres

Cerise sur le gâteau, la centrale a été rapidement capable de produire son propre gel hydroalcoolique, grâce à ses chimistes, puis de commencer à fabriquer des masques de protection. Même si ce deuxième volet a pris du temps et que la centrale a redémarré fin avril sans que personne n'en ait sur le visage. Les mesures prises se sont avérées efficaces puisque aucun foyer infectieux n'a été détecté dans l'enceinte de la centrale et que, comme le souligne le directeur, le niveau de sécurité n'a pas varié d'un iota.

"Nous devions être au rendez-vous pour pouvoir répondre aux pics de consommation hivernaux. Avec le froid cela tombe bien, depuis trois à quatre semaines nos quatre réacteurs tournent à plein régime", observe Sèverin Buresi.

La digue de la centrale, qui avait failli être submergée lors de la tempête de 1999, va être rehaussée de 8,50 mètres dans le cadre du grand carénage. De la même façon, pour pouvoir refroidir la centrale "en toutes circonstances" de nouvelles piscines seront mises en service, la centrale va être dotée d'un dispositif permettant de récupérer le corium (magma de métal et de minerai radioactif -Ndlr) en cas de percement des cuves du réacteur, et la sécurité de ses unités diesel énormément renforcée.

Des énergies solaire et éolienne appelées à grandir vite

Longtemps uniquement associé à l'énergie nucléaire, EDF poursuit sa diversification dans les énergies renouvelables et Philippe Belet, directeur EDF Sud-Ouest Renouvelables, a fait le point sur cette activité en plein développement chez l'électricien.

"2020 a été une année difficile, mais il y a eu aussi beaucoup d'éléments positifs, puisqu'il y a eu une véritable prise de conscience collective sur l'importance de pouvoir s'appuyer aussi sur les énergies renouvelables pour atteindre les objectifs de la transition énergétique. D'autre part, le prix des énergies renouvelables est devenu encore plus compétitif. Les programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE/créées par la loi de Transition énergétique pour la croissance verte -Ndlr) prévoient que d'ici 2028 la production d'énergie solaire sera multiplié par quatre et celle d'éolien terrestre par deux par rapport à 2020", a recadré Philippe Belet.

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Il a ensuite évoqué le Sraddet (Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires) de Nouvelle-Aquitaine, élaboré par la Région, qui prévoit que, pendant la même période, la production d'énergie éolienne doit passer de 100 à 300 MW dans la région, et celle d'énergie solaire (photovoltaïque) de 200 à 500 MW. La mise en service -courant 2021-, des centrales photovoltaïques d'Ambès (Bordeaux Métropole/ 10 MW), Artix (Pyrénées-Atlantiques/4 MW) et du Grand Guéret (16 MW) fait partie de ce mouvement.

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Quatre leviers à activer pour assurer un rebond stratégique

Aux manettes de la vie commerciale, Olivier Roland, directeur EDF commerce Sud-Ouest, a rappelé que cette agence régionale vend de l'électricité aux particuliers et aux collectivités. Si la principauté d'Andorre lui achète beaucoup de son électricité, auprès du volet Occitanie de l'agence régionale, en Nouvelle-Aquitaine, EDF fournit 2,8 millions de clients, a souligné Olivier Roland.

"Il s'agit des particuliers. Mais nous fournissons aussi 170.000 entreprises et collectivités en Nouvelle-Aquitaine. Au final les particuliers pèsent autant dans la balance que les entreprises et collectivités, avec 50 % de chaque côté. Avec le premier confinement notre activité commerciale a reculé d'environ 30 %. En 2020, les clients nous les avons eu en direct, et nous avons pu nous rendre compte de l'impact de la crise sur les entreprises. Aujourd'hui, en ce début 2021, ce que nous voyons c'est la montée des problèmes chez les particuliers, avec des retards de paiements", observe Olivier Roland.

Ce qui implique que les quatre leviers que compte bien activer EDF Sud-Ouest pour réussir son rebond en tiendront compte. Ces leviers sont l'efficacité énergétique, l'autoconsommation, la mobilité électrique et l'hydrogène. Dernière spécialité dans la quelle EDF compte développer de nouveaux usages, en particulier pour assurer les transports lourds, qui se font en train, en bus, en camions... Partant du principe qu'EDF ne veut produire que de l'hydrogène vert, et même utiliser la production d'hydrogène pour stocker de l'énergie.

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