Véhicules électriques : Retrofuture veut faire de Bordeaux le tremplin du retrofit

Spécialisée dans le retrofit, la conversion à la motorisation électrique de véhicules thermiques, la startup Retrofuture s'installera sur 400 m2 à Darwin en septembre 2020. Outre un Fablab et un showroom, elle prévoit d'y créer dix emplois d'ici fin 2021. Retrofuture prépare également une levée de fonds conséquente pour faire de Bordeaux une place forte de cette activité émergente en y investissant trois millions d'euros. Explications avec son fondateur Arnaud Pigounides.
Autorisée en France depuis avril 2020, le retrofit consiste à remplacer le moteur thermique d'un véhicule de plus de cinq ans par une motorisation électrique.
Autorisée en France depuis avril 2020, le retrofit consiste à remplacer le moteur thermique d'un véhicule de plus de cinq ans par une motorisation électrique. (Crédits : Retrofuture)

Le retrofit, qui consiste à remplacer le moteur thermique d'un véhicule de plus de cinq ans par une propulsion 100 % électrique, est une activité encore toute jeune puisqu'elle n'est autorisée en France que depuis la publication d'un arrêté le 3 avril dernier. Alors que cette activité est autorisée dans plus de 50 pays au monde dont les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l'Italie ou l'Allemagne, ce feu vert français était réclamé activement par Arnaud Pigounides, fondateur de la startup Retrofuture et co-président d'Aire (l'association des acteurs de l'industrie du rétrofit électrique). Ce lobby réunit les onze entreprises déjà présentes sur ce nouveau marché qui s'étend des deux-roues aux bus en passant par les voitures particulières, les utilitaires et les camions. Pour les voitures particulières, l'autonomie dépassera cependant rarement les 150 km. "Ce texte très attendu est arrivé en avril 2020 en pleine crise sanitaire et économique ce qui n'a pas facilité les choses mais le marché est prometteur et nous arriverons donc à Bordeaux en septembre 2020 avant d'y installer le siège social de l'entreprise en janvier 2021", indique à La Tribune Arnaud Pigounides.

Lire aussi : Automobile: le retrofit, un lifting économique pour les vieux véhicules ?

400 m2 de locaux à Darwin

Créée en 2018 par cet ancien directeur d'agences de publicité et Marc Tison, un ancien cadre dirigeant du groupe PSA et expert en mobilité électrique, Retrofuture est spécialisée dans le segment des véhicules particuliers anciens. La startup propose des opérations de retrofit pour onze modèles de collection dont la Fiat 500, la Porsche 911, la Peugeot 504 ou encore le combi VW. La jeune pousse comptera cinq salariés en septembre prochain et s'installera sur 400 m2 au de l'écosystème Darwin dans l'ancienne caserne Niel sur la rive droite de Bordeaux. "Nous y installerons un Fablab et un showroom qui réuniront notre intelligence, notre R&D et notre marketing mais il n'y aura pas de fabrication sur place. Les opérations de retrofit se feront d'abord dans des usines partenaires dans le Nord et, probablement, entre Toulouse et Albi", précise le dirigeant qui annonce une dizaine de recrutements en local sur des fonctions de direction, administratives et de marketing notamment.

"Bordeaux et Darwin ont fait l'unanimité au sein de notre petite équipe puisqu'on s'inscrit dans une logique de transformation de la mobilité et d'économie circulaire en remettant à niveau des véhicules existants. Et être à Bordeaux nous permet de nous rapprocher de certains de nos partenaires en matière de batteries électriques tels que Néogy à Mérignac par exemple", poursuit Arnaud Pigounides. D'autant que la région bordelaise a pris le train des batteries en marche avec notamment la dynamique autour du projet d'Airbus des batteries lancé en début d'année par Emmanuel Macron à Nersac, en Charente, ou encore le parc d'activités dédié à la batterie électrique à Pessac avec Serma Group.

2 millions d'euros en 2020, 28 millions en 2023 ?

Forte d'une soixantaine de commandes prévendues en 2020, Retrofuture table sur deux millions d'euros de chiffre d'affaires cette année. Ensuite la croissance de la startup est appelée à devenir exponentielle : 100 véhicules en 2021 puis 340 en 2022 pour 10 millions d'euros de chiffre d'affaires et 1.100 véhicules pour 28 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2023. "Plus de 80 % des commandes viendront de particuliers souhaitant modifier la motorisation de leur voiture et les 20 % restants seront des véhicules vendus déjà retrofités par nos soins comme ce que nous faisons aujourd'hui pour lancer l'activité", précise le dirigeant.

Retrofuture

Un véhicule équipé d'un moteur électrique à l'issue d'une opération de retrofit par Retrofuture (crédits : Retrofuture).

Au sein de l'association Aire, les professionnels évaluent à 40 millions d'unités le nombre de véhicules transformables, toutes catégories confondues, et espèrent convertir 65.000 véhicules en cinq ans puis 1 % du parc d'ici dix ans : "Cela paraît peu mais ça représente déjà 400.000 véhicules transformés soit un potentiel de cinq milliards d'euros de chiffre d'affaires et le maintien ou la création de 42.000 emplois directs ou indirects un peu partout sur le territoire et notamment chez les garagistes." D'autant que le lobby a obtenu dans le cadre du plan de relance du secteur automobile annoncé en mai dernier une prime spécifique de 2.500 à 5.000 € pour les opérations de retrofit. "Nous sommes très très satisfaits de cette prime qui, pour la 1ere fois, nous met à égal avec les autres véhicules. C'est une prime à la reconversion dédiée au retrofit qui n'implique pas une destruction du véhicule mais juste sa réhabilitation", salue Arnaud Pigounides. Mais globalement, c'est bien le segment des véhicules utilitaires, des flottes d'entreprises et des transports en commun qui seront les plus gros marchés en volume. L'Aire s'attend ainsi à ce qu'une dizaine de nouvelles sociétés se lancent sur le marché du retrofit à court terme.

3 M€ pour faire de Bordeaux un tremplin du retrofit

La région bordelaise pourrait-elle jouer un rôle de premier plan dans cette nouvelle filière ? C'est en tous cas la conviction du dirigeant de Retrofuture qui souhaite travailler en réseau avec les acteurs locaux, annonçant en particulier vouloir investir trois millions d'euros dans le territoire notamment pour financer "un village du retrofit et des mobilités vertes pour créer et accompagner de nouvelles startups, faire de la formation et de la R&D". Des sujets déjà abordés avec la Région Nouvelle-Aquitaine et Bordeaux Métropole assure Arnaud Pigounides qui financera ces projets par une levée de fonds actuellement en préparation :

"On travaille sur plusieurs options pour boucler une augmentation de capital de 6,5 millions d'euros en novembre prochain soit par un seul gros fonds d'investissement national ou régional, soit par des family office et des business angels avec des tickets de 200 à 400.000 euros", précise le chef d'entreprise. "De quoi financer pour moitié nos programmes de R&D puisque l'adaptation de chaque système moteur et électronique est plus ou moins propre à chaque modèle de véhicule donc cela coûte cher."

L'autre moitié de la levée de fonds doit notamment permettre de développer la filière locale dans la région bordelaise via ce village des startups et d'autres partenariats. Retrofuture ambitionne par exemple de "soutenir la mise en place d'appels à projets ciblés" sur le retrofit de certaines filières (artisans, transports de personnes, foodtrucks, navires, agriculteurs / viticulteurs, etc) et de "créer un fonds retrofit avec des institutionnels, Bpifrance, les banques locales et des grandes entreprises".

A long terme, Arnaud Pigounides rêve même de travailler à la motorisation hydrogène et de "créer à Bordeaux une usine qui permet de dépolluer la mobilité tout en créant des emplois dans la ville".

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