Pour la première fois depuis des lustres les salariés de l'usine Getrag Ford Transmissions (GFT), à Blanquefort (Gironde/Bordeaux Métropole), qui fabrique des boîtes de vitesses, devaient organiser ce vendredi 12 juin une réunion intersyndicale FO-CFDT-CFTC-CFE/CGC et CGT. Les salariés de GFT, ils étaient au total un peu plus de 1.000 en 2019, ont tous repris le travail le 5 mai dernier dans cette usine qui fabrique depuis 2017 des boîtes de vitesses manuelles MX65. Modulables en cinq ou six vitesses, ces dernières sont destinées au marché européen où elles équipent des Ford Fiesta.

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GFT Bordeaux fabrique en moyenne 550.000 de ces boîtes de vitesses par an. Depuis le rachat en 2015 de l'équipementier allemand Getrag par le groupe canadien Magna, deuxième équipementier automobile au monde, Getrag est devenu une coentreprise commune à Ford et Magna. La CGT essaie depuis plusieurs mois de tirer la sonnette d'alarme sur l'avenir de cette usine dont le seul client est Ford, constructeur automobile américain qui a déjà annoncé qu'il comptait ne plus produire en Europe.

L'usine GFT sera-t-elle à l'équilibre financier en 2021 ?

Avec la fermeture, le 30 septembre 2019, de son usine sœur, Ford Aquitaine Industries, qui fabriquait à Blanquefort des boîtes de vitesses automatiques, la situation de GFT ne s'est pas améliorée puisque les deux établissements géraient en commun certaines dépenses. Le groupe Magna est bien conscient du caractère actuellement déficitaire de l'activité de GFT Bordeaux, qui a enregistré une perte de 54 M€ en 2017 et 28 M€ en 2018, et a déjà averti que l'usine devait absolument revenir à l'équilibre financier d'ici 2021, sans quoi elle serait fermée.

Autant d'éléments qui ont commencé à inquiéter la CGT, qui a commandé en 2019 une étude sur GFT à « un cabinet indépendant », qui n'a fait que confirmer la réalité des problèmes. Avec notamment le rappel de l'existence d'une usine jumelle de GFT Bordeaux en Chine, qui produit 1,2 million de boîtes de vitesses avec une équipe, et qui pourrait absorber la production bordelaise avec une seule autre équipe ; les volumes du business plan qui montreraient une chute de près de la moitié de la demande client Ford à partir de 2021, ou encore l'acquisition de l'usine de Kechnec (Slovaquie) à 100% par Magna en vue d'y développer la transmission double embrayage DCT, pour véhicules hybrides.

Le contrat entre Magna et Ford pourrait être rompu

Ces menaces déjà lourdes n'ont cessé de gagner en épaisseur, ne serait-ce qu'à cause de la crise déclenchée par la pandémie de coronavirus. A commencer par le fait que, selon FO, le groupe Magna ne serait pas disposé à renouveler, comme prévu en 2021, le contrat le liant à Ford. D'autre part, toujours selon la même centrale syndicale, les commandes de boîtes de vitesses passées par Ford ne correspondraient pas à la réalité du marché. L'usine de Ford à Craiova (Roumanie) fabriquerait ainsi 660 véhicules par jour alors que GFT Bordeaux y expédie quotidiennement 1.110 transmissions. FO n'est pas plus explicite à ce sujet qui semble être lié à la crise du Covid-19.

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Et puis, toujours selon FO, Getrag viendrait de proposer à Ford Europe une transmission de son catalogue pour remplacer la MX65. Il s'agit d'une transmission automatique hybride boostée avec un e-moteur 380 volts, qui permet de réduire les émissions de dioxyde de carbone, avec une capacité à démarrer le moteur et à charger la batterie à l'arrêt. FO voudrait donc savoir ce qu'il en est pour Bordeaux étant donné que la fabrication de la MX65 va s'arrêter en 2024, en fait plutôt fin 2023. Sachant qu'il faut deux ans pour lancer un nouveau projet industriel dans ce type d'activité, l'heure de la décision ne va pas tarder à tomber.

Les salariés de GFT ne voudraient pas se retrouver dans la situation de ceux de Ford Aquitaine Industries en 2018, quand le groupe Ford laissait encore miroiter le lancement d'un nouveau projet, alors que le choix de fermer avait visiblement déjà été arrêté. D'une manière générale les syndicats demandent à la direction de GFT Bordeaux de s'exprimer sur tous ces sujets et ont tendance à penser que les dirigeants du groupe n'ont pour le moment aucune envie de jouer carte sur table avec les salariés.