Artificialisation, incendie : les risques liés à l'usine de Flying Whales à Laruscade (2/3)

Le site de 75 hectares envisagé pour accueillir les dirigeables de Flying Whales, à 50 km au nord de Bordeaux, est pour l'instant une zone naturelle et forestière. Son aménagement constituera l'une des plus vastes opérations d'artificialisation des sols de ces dernières années en Gironde accroissant la pression sur la biodiversité locale alors que la zone a déjà été sinistrée par un incendie. À l'occasion de la concertation publique sur cette implantation industrielle hors normes, qui se tient jusqu'au 15 mars, La Tribune explore dans ce deuxième volet les impacts en termes d'artificialisation et de risque incendie.
Le site abrite des parcelles forestières et des landes humides, bordées par une rivière.
Le site abrite des parcelles forestières et des landes humides, bordées par une rivière. (Crédits : MG)

Sens interdit. À quelques kilomètres au nord du bourg de Laruscade, à la frontière entre Gironde et Charente-Maritime, il est fortement conseillé de faire demi-tour. A l'entrée du site où doit s'implanter l'usine de Flying Whales, un chemin blanc défoncé. Un arrêté municipal pris en juillet restreint la circulation sur cette chaussée vicinale. Il n'y a rien à voir qui relève d'une activité industrielle pour le moment. Seuls les cheptels forestiers de quelques sylviculteurs. C'est bien ici que doivent être construits les plus grands dirigeables du monde à partir de 2025.

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Dans les airs, pas encore d'aéronef mais quelques oiseaux et leurs cris couverts par la circulation de la Nationale 10 entre Bordeaux et Angoulême à un kilomètre de là. Un accès routier direct qui fait l'intérêt du site. La zone doit se transformer en un pôle d'activités économiques doté d'entrepôts de 70 mètres de haut, d'une piste d'envol et de bâtiments logistiques qui abriteront 300 emplois. Il faut encore se projeter.

Le dossier de concertation, à l'image des discours des élus, évite soigneusement de mentionner le terme d'artificialisation des sols. C'est pourtant bien de cela dont il est question à Laruscade. Entre les bâtiments, hangars, voiries et aires d'envol, plus de 50 hectares de terres vont être directement mobilisés pour les activités économiques du constructeur. Au-delà, l'emprise totale du site s'étend sur 25 hectares supplémentaires.

La Gironde, première sur l'artificialisation

Les porteurs publics du projet d'aménagement foncier - la Région Nouvelle-Aquitaine et la Communauté de communes Latitude Nord Gironde - n'ignorent pourtant pas les enjeux pour le milieu naturel. « Il y a une vraie préoccupation et des réflexions sur la consommation foncière et l'impact environnemental », engage Lise Bourdon, chargée de mission au développement économique pour l'intercommunalité. Mais surtout des obligations légales.

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En vertu du code de l'environnement, les projets d'artificialisation de zones naturelles doivent prévoir une compensation environnementale d'une superficie trois fois supérieure aux terres impactées. « En terme de faune, flore et zones humides, nous seront à 196 hectares de compensation. Au titre du défrichement des terrains forestiers, nous serons à 185 hectares au plus près du site », informe-t-elle. A priori, pas d'obstacle pour trouver des terres où les habitats naturels seront recréés. Nouvelle heureuse pour les promoteurs du projet. D'autant plus quand on connaît la difficulté croissante à réunir ce contingent à cause de la compensation intensive qui préempte les terres sur certains territoires, comme la Gironde.

Pour entrer dans les clous de la trajectoire nationale Zéro artificialisation nette, qui prévoit la diminution par deux de la consommation foncière des collectivités d'ici 2030, les 75 hectares absorbés par Flying Whales seront intégrés au quota de la Région Nouvelle-Aquitaine.

Laruscade Flying Whales réunion publique 28/02/2023

Responsables de FlyingWhales et élus ont répondu aux interrogations, notamment environnementales, lors d'une réunion publique le 28 février. (Crédits : MG / La Tribune)

Trois espèces vont être particulièrement impactées : la loutre d'Europe, la fauvette Pitchou et le Fadet des Laîches, un papillon qui avait déjà contraint l'aménageur de la LGV Bordeaux-Paris Lisea à constituer des espaces de compensation en Gironde. La majorité des espaces naturels à recréer le seront sur le bassin versant de la Saye, cette rivière qui longe le futur site de dirigeables.

Le projet de Flying Whales illustre l'appétit des entreprises et aménageurs à développer des projets de grande ampleur foncière sur le territoire girondin. Le département est en effet celui où le taux d'artificialisation des terres a été le plus élevé en Nouvelle-Aquitaine entre 2009 et 2019.

Débroussaillage

Le site de Laruscade a déjà connu une dégradation environnementale. Le 12 septembre 2016, un incendie a détruit plus de la moitié des milieux naturels de la zone. Les feux de forêts sont courants dans cette micro-région très forestière entre le Blayais et le sud des Charentes. Pour autant, la commune de Laruscade ne dispose pas de plan de prévention spécifique pour faire face au risque incendie.

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Le cadre légal contraint en revanche l'aménageur de façon stricte. « Nous avons des obligations légales de débroussaillement qui vont au-delà de ce qui pourrait nous être imposé par le code forestier, compte tenu de l'ampleur du projet, explique Lise Bourdon. Une première bande de 50 mètres de largeur sera débroussaillée autour des bâtiments et une seconde bande de même taille sera défrichée. » De quoi augmenter la surface impactée de sept hectares.

Les responsables de Flying Whales disent prendre la mesure de cette problématique incendie et rappellent que la présence d'hélium sur le site, utilisé pour la mobilité des dirigeables, n'implique pas de risque d'explosion ou de combustion. Le site relèvera en effet de la règlementation relative aux ICPE (installations classées pour la protection de l'environnement) mais ne sera pas classée Seveso qui réunit les sites industriels présentant des risques d'accidents majeurs.

Cet article est le premier volet d'une série de trois épisodes sur le projet d'usine de dirigeables de Flying Whales, à Laruscade, au nord de la Gironde, publiés du 6 au 8 mars 2023 dans La Tribune :

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Commentaire 1
à écrit le 07/03/2023 à 8:56
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Tout ça pour que les petits riches tuent leur pathologique ennuie, parce que vu le prix des vols en montgolfières cela reste une activité de riches hein. Et plus ils sont riches et plus ils ont le droit de tout détruire en oligarchie.

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