
« C'est un ralentissement que je n'avais jamais vu en 30 ans ! », lâche Philippe Petiot, le président de Procivis Nouvelle-Aquitaine, au sujet de la chute des commandes de sa marque IGC, spécialisée dans la construction de maisons individuelles. La filiale, qui revendique le titre de « leader de la construction de maisons individuelles dans le grand Sud-Ouest », a en effet vu son activité commerciale littéralement s'effondrer au second semestre 2022 avec une chute de -42 % des projets de maisons individuelles vendus aux clients (soit environ 800 maisons) tandis que la promotion immobilière enregistrait aussi un repli de -30 %.
Rupture conventionnelle collective
Et ce ne serait pas tant le modèle de la maison individuelle ni l'application du principe de zéro artificialisation nette (ZAN) qui seraient en cause à en croire le dirigeant de Procivis Nouvelle-Aquitaine mais bel et bien la baisse du pouvoir d'achat immobilier des clients :
« Je ne vois pas de rejet de la maison individuelle dans le Sud-Ouest de la part des élus locaux ni des habitants. À l'inverse, il y a une vraie demande pour ce type de bien et il y a du foncier disponible à quelques exceptions près du côté de Bordeaux et du Pays basque. Le ralentissement est d'abord lié aux problématiques de financement des clients sur le niveau d'apport demandé par les banques qui a été multiplié par deux pour un prêt à 20 ans ! »
Mais le second semestre 2022 laissera des traces au sein d'IGC et particulièrement au sein des équipes du bureau d'études et du centre d'appels. La Tribune a appris qu'un accord de rupture conventionnelle collective (RCC) a ainsi été acté en novembre dernier entraînant le départ de 25 des 80 salariés de ces équipes sur un effectif total de 280 personnes au sein d'IGC. Et si, pour l'heure, la RCC est close, Philippe Petiot ne se ferme aucune option en termes de ressources humaines pour 2023 : « Nous sommes hyper-prudents sur le recrutement et hyper-serré sur les charges parce que le marché reste très poussif en ce début d'année. On ne s'interdit pas du tout de réadapter l'emploi par des ajustements mineurs de l'effectif si cela s'avère nécessaire pour assurer la pérennité de l'entreprise ».
Malgré ce fort ralentissement des ventes de futures maisons, IGC continue à livrer des biens achevés à un rythme soutenu : 1.150 maisons livrées en 2021, 1.120 en 2022 et probablement 1200 en 2023. Les équipes dédiées aux travaux n'ont pas été inquiétées mais cela pourrait changer si le contexte actuel se prolonge avec la perspective d'un trou d'air dans l'activité de construction courant 2024.
Qui est Procivis Nouvelle-Aquitaine ? Issue de la fusion en 2021 des Sacicap (Sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété) IGC Gironde et Les Prévoyantes, Procivis Nouvelle-Aquitaine est une société coopérative qui joue un rôle de holding de Cina (Compagnie immobilière de Nouvelle-Aquitaine). Cette dernière rassemble un pôle maisons individuelles (IGC, Ariane constructions, Maisons d'en France, etc.), un pôle promotion-aménagement, un pôle services, un pôle foncier et désormais un pôle habitat social. Présent sur le marché concurrentiel mais cousin du mouvement HLM, Procivis doit, au titre de ses missions sociales qui représentent 65 millions d'euros depuis 2006, faciliter l'accession sociale à la propriété et la rénovation des logements privés, notamment par des prêts et des subventions. Au total, Procivis Nouvelle-Aquitaine emploie 600 salariés pour 266 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022 et 230 millions prévus en 2023. Les missions sociales représentent environ 4 millions d'euros par an.
Le relais de l'habitat social
Il est donc indispensable de trouver des relais de croissance pour le groupe Procivis Nouvelle-Aquitaine qui emploie au total 600 salariés et livre près de 2.000 logements, par an dont 30 % en accession sociale. L'un d'entre eux sera l'habitat social avec la création d'un pôle dédié rassemblant la coopérative HLM l'Abri Familial et le tout récent office foncier solidaire (OFS) dont le groupe s'est doté en propre. Objectif ? Développer le bail réel solidaire (BRS), qui permet de dissocier la propriété du foncier et du bâti et qui est en vogue dans l'agglomération bordelaise. « Nous livrerons quelques maisons en BRS à Saint-Médard-en-Jalles dans quelques mois et nous avons au total une soixantaine de logements en BRS dans les tuyaux, ça se développe assez vite compte tenu des besoins très importants de logements en zones tendues », précise Philippe Petiot. Au total, ce sont 200 logements en BRS, en locatif social ou en location accession qui sont en cours de montage ou de réalisation.
Et le groupe n'écarte pas non plus des hypothèses de croissance externe tant les sollicitations de rapprochement sont nombreuses de la part de petits constructeurs indépendants de maisons individuelles. Mais pour le dirigeant la priorité est d'attendre de voir comment ce marché évolue dans les mois qui viennent. En revanche, des rachats de cabinets de syndics de copropriété ont déjà eu lieu dans les Landes et au Pays basque pour étoffer la gamme de services de Procivis Nouvelle-Aquitaine. Quant aux deux maisons « cradle-to-cradle » développées à Bordeaux, elles seront inaugurées en mars prochain.
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