Sokoa ou le pari gagnant du militantisme économique au Pays basque

Depuis sa création en 1971, à Hendaye, Sokoa, le leader national de la fabrication de sièges de bureaux et de solutions d'assises, a la particularité de soutenir d'autres entreprises, associations et institutions basques.
L'usine de Sokoa au Pays basque.
L'usine de Sokoa au Pays basque. (Crédits : Sokoa)

Qui a crû que le flexoffice et le télétravail sonneraient le glas du siège de bureau ? Pas Sokoa en tout cas. « De plus en plus de personnes auront même désormais non pas un, mais deux sièges giratoires. Au bureau et chez eux », explique Timothée Acheritogaray, son directeur général depuis le siège social de Sokoa, installé dans une bâtisse à l'imposante façade néobasque à Hendaye, ornée du chêne de Gernika, symbole du peuple basque. Pour lui, il s'agit d'une nouvelle évolution du marché de l'équipement de bureaux dont sa société s'est fait une spécialité.

« Notre produit phare est toujours le siège, mais notre gamme s'est beaucoup élargie ces quinze dernières années avec des fauteuils, des poufs et des chauffeuses qu'on retrouve désormais en open space ou encore dans les halls d'accueil. Ils sont déclinés dans de nombreuses couleurs et intègrent de plus en plus des matériaux recyclés, comme le pouf Emeki (« doucement » en basque), que nous sortons cette année », détaille le dirigeant. Sokoa, qui a meublé le Connecteur à Biarritz ou encore Station F et le Tribunal de Grande Instance à Paris, sort même cinq produits, garantis cinq ans, contre un ou deux par an habituellement.

Sokoa

Timothée Acheritogaray, le directeur général de Sokoa (crédits : Sokoa).

Lire aussiTertio Recycle choisit la Gironde pour reconditionner les sièges de bureau

« Même si nous avons été durement touchés durant la crise sanitaire, avec quatre mois d'entrées de commandes en retrait de 20 % à 25 %, nous avons maintenu nos investissements dans les nouveaux produits, car ils nécessitent deux voire trois ans de développement », souligne Timothée Acheritogaray. Et il a vu juste, car l'an dernier, les ventes ont progressé de près de 9 % à 54 millions d'euros sur un marché très mature et mondialisé avec des concurrents polonais, suédois, chinois, américains et allemands. « Nous avons ouvert une nouvelle usine en août dernier, toujours dans la zone des Joncaux où se trouvent nos trois autres ateliers de production. Surtout, nous avons pu maintenir tous les emplois », ajoute le directeur général. Car créer des emplois locaux c'est la raison même de la création de Sokoa en 1971.

Pays basque Nord et Sud

Alors que taux de chômage au Pays basque était très élevé à l'époque, Patxi Noblia accompagné de 24 associés fonda l'entreprise pour éviter aux Basques de s'exiler. Et avec cette particularité qu'elle soit financée par des particuliers, Sokoa comptant aujourd'hui encore 1.150 actionnaires et même une liste d'attente. « Depuis le début, les salariés sont aussi associés et les 270 actuels plus les ex-salariés détiennent actuellement 48 % du capital », précise Timothée Acheritogaray.

Ces règles fondamentales d'un militantisme économique assumé n'ont pas changé en un peu plus de cinquante ans pour la société qui avait commencé dans la vente de meubles produits dans le Pays basque espagnol. « L'idée était de créer une complémentarité entre le Pays basque Sud, bien plus industriel, et la capacité commerciale du Pays basque Nord. Mais dès 1979, nous avons commencé à produire nous-mêmes, puis nous avons racheté des entreprises, en France et en Espagne, pour mieux maitriser la chaîne de valeur », retrace le directeur général de Sokoa, dont le logo représente la réunion d'Iparralde (pays basque français) et Hegoalde (pays basque espagnol).

Lire aussiImmobilier d'entreprise : le plan du Pays basque pour calmer le marché et booster les rénovations

110 millions d'euros

Le groupe Sokoa est en effet deux fois plus gros que Sokoa et a réalisé un chiffre d'affaires consolidé de 110 millions d'euros l'an dernier. Le fabricant a des participations dans pas moins de quinze sociétés, allant de 2 % pour le fabricant de linge basque Jean Vier à 100 % pour Sorec Solutions et Soréc Métal à La Charité sur Loire (Nièvre) ou encore Sellex, à Irun. « Chacune a sa spécialité. Eurosit, dans la Nièvre également, travaille pour les grands comptes comme la RATP et Safran. Genexco en Touraine fabrique des accessoires pour les bureaux, des portemanteaux, des corbeilles ou encore des tableaux. Ita Solutions, implantée en 2020 sur une friche industrielle dans les Landes, est spécialisée dans la mousse... », énumère le directeur général.

Sokoa

Un aménagement réalisé par Sokoa (crédits : Sokoa).

Ainsi, l'entreprise arrive à se fournir à 40 % à moins de 200 kilomètres et à 90 % en Europe, les 10 % restants représentant des pièces introuvables en Europe et venant d'Asie. Sokoa, qui exporte dans une soixantaine de pays (entre 15 % et 20 % des ventes) d'Europe, du Proche-Orient et d'Afrique a également deux filiales à l'étranger, au Nigéria et au Mali. « La situation est complexe dans ces deux pays. Nous sommes toutefois convaincus qu'il faut faire de la production locale en Afrique et si nous trouvons des partenaires en Afrique du Nord, nous ouvrirons d'autres usines », annonce Timothée Acheritogaray.

Estia, eusko et euskara

Les projets ne manquent pas, dans et hors de l'entreprise, car Sokoa est depuis ses débuts très investi dans le tissu local, économique, mais pas seulement. Patxi Noblia a également été à l'origine du fonds d'investissement régional Herrikoa (« ce qui provient du pays ou du peuple »), fondé en 1980, dont Sokoa détient 8%. Au fil des ans, le fabricant a ainsi soutenu la création et le développement d'entreprises dans de multiples secteurs. Et il a poussé, en parallèle, des projets d'autres types fidèles à ses valeurs, telle que la création de la chambre d'agriculture basque et de l'association Lurzaindia, la fondation d'entreprises de l'Estia à Bidart ou encore des producteurs et fournisseurs d'énergies renouvelables I-Ener et Enargia, mais aussi le développement de l'enseignement de la langue basque euskara et de la monnaie locale Eusko.

Lire aussiPays basque Industries : « Nous avons tous intérêt à partager ! »

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.