Il aura fallu un an pour écrire la stratégie de l'aéroport de Bordeaux-Mérignac à cinq ans. Le plan stratégique 2023-2027 a été adopté, ce jeudi 15 décembre, par le conseil de surveillance.
« En termes d'investissement, c'est du jamais vu au cours de ces dernières décennies puisque nous sommes sur 240 millions d'euros. Mais ce que nous actons surtout, c'est un changement de modèle pour l'aéroport », assure Simon Dreschel.
Pour le président du directoire de l'aéroport, le nombre de passagers (5,6 millions en 2022, lire encadré) et la question capacitaire ne doivent pas être les seuls marqueurs d'un aéroport. « Nous sommes à la croisée des chemins avec un aéroport à moderniser et des enjeux à intégrer notamment en matière de transition écologique et énergétique », ajoute-t-il. Sur les 240 millions d'euros d'investissement, 200 seront portés par l'aéroport et 40 millions par des tiers surtout sur le volet énergétique. À titre de comparaison, le précédent plan sur 2019-2023, adopté fin 2019, prévoyait 169 millions d'euros pour rénover et agrandir l'aéroport afin d'accompagner la hausse du trafic, avec seulement 30 millions sur le volet développement durable.
Un aéroport plus vert
La transition écologique et énergétique est donc devenu aujourd'hui un axe important dans le développement stratégique de l'aéroport de Bordeaux-Mérignac. « L'aéroport va devenir un hub de production d'énergie », prévient Simon Dreschel. Il vise 65 % de production minimale d'énergie verte sur l'aéroport par rapport à la consommation totale de 2019. Première étape : des panneaux photovoltaïques seront prochainement installés sur le parking 0, ce qui représentera 4 % de la consommation de l'aéroport.
Il s'est dans le même temps fixé pour objectif de réduire de 25 % la consommation d'énergie au niveau des bâtiments et des infrastructures existants. L'aéroport travaille aussi à court terme sur un projet de géothermie. « Aujourd'hui, 60 % de nos émissions de carbone sont liées au gaz », précise Simon Dreschel. L'aéroport vise 40 % de réduction des émissions de CO2 pour passer de 2.000 tonnes équivalent CO2 à 500 tonnes en 2027. Objectif : obtenir la certification ACA 4 synonyme de neutralité compensée des émissions de l'aéroport, hors prise en compte des vols. Enfin, l'aéroport entend être un acteur de la décarbonation du secteur aérien. Il a commencé à proposer un service de biocarburants aux compagnies.
100 millions d'euros dédiés aux bâtiments
« Mais notre boussole, c'est celle du service ! », insiste Simon Dreschel. En rupture avec la stratégie assumée de croissance portée par le low cost des années 2020, l'aéroport souhaite désormais faire un bond dans la qualité de services proposés. Un projet de bâtiment central pour faire la jonction entre les halls A et B a, en l'occurrence, été acté pour une livraison prévue à la fin du plan, en 2027. « 100 millions d'euros sont dédiés aux bâtiments », souligne Simon Dreschel. Ce bâtiment a pour ambition d'être l'entrée unique vers les avions pour les passagers. Point de passage unique de la sûreté, il proposera également des zones d'attente avec des boutiques. « Ce bâtiment central constitue une clé de voûte de ce projet stratégique. L'objectif est d'améliorer la note de référence ASQ de l'aéroport pour passer de 3 à 4/5 ce qui nous placerait dans le top 10 européen », explique Simon Dreschel.
Le trafic reprend plus vite que prévu Alors que le trafic s'était effondré avec la crise sanitaire passant de plus de 7 millions de passagers en 2019 à seulement 2,3 millions en 2020, la barre des cinq millions n'était pas attendue avant 2025. Mais finalement la reprise du trafic aérien, à Bordeaux comme ailleurs, a été plus dynamique que prévu. Ainsi, après environ trois millions de passagers en 2021, la plateforme bordelaise a vu passer autour de 5,6 millions de personnes sur l'ensemble de l'année 2022. Un niveau qui reste cependant inférieur d'environ 20 % au pic historiquement haut de 2019, avant la pandémie.
Troisième axe stratégique : améliorer l'intégration de l'aéroport sur son territoire. Cela passera par la création d'un hub de mobilité, la réalisation de tests pour l'intégration des futurs drones-taxis. « Ce n'est pas de la science fiction. Les premiers voleront aux JO 2024. Il ne faut pas avoir un train de retard sur le sujet », assure Simon Dreschel. L'aéroport s'engage également à réduire les vols de nuit avec des dispositifs dissuasifs, en l'occurrence une redevance plus chère. Il vise enfin, la réalisation moyenne de deux projets conjoints par an avec les acteurs du territoire en matière de développement économique et social.
De l'innovation dans les projets
En interne, l'aéroport qui emploie 220 personnes, travaille sur les sujets de cybersécurité et le renforcement de la culture sureté mais vient surtout de lancer une cellule dédiée aux activités émergentes et à l'innovation. Composée de deux personnes dont son directeur auparavant coordinateur de la French Tech Bordeaux, elle a vocation a insuffler de l'innovation dans tous les projets de l'aéroport. Objectif : lancer en situation opérationnelle 30 % des expérimentations de la feuille de route innovation.
L'aéroport entend enfin développer de nouvelles sources de revenus. « Les idées ne manquent pas. Nous exerçons un métier de services, donc nous pouvons proposer de nouveaux services. Nous étudions par exemple l'arrêt des files d'attente. L'aéroport a également une carte à jouer sur le sujet de la formation que nous pourrions proposer à d'autres aéroports », avance Simon Dreschel. « Nous avons également du foncier disponible, ce qui est rare et précieux », insiste-t-il. L'aéroport de Bordeaux-Mérignac annonce un chiffre d'affaires à plus de 70 millions d'euros cette année, les sources de revenus principales étant les activités aériennes et les activités de boutiques et parking.
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