La commercialisation par CBRE des 50 hectares de Ford Aquitaine Industries fait grincer à Bordeaux

Lancée par CBRE, la première phase de commercialisation des 50 hectares de foncier industriel détenus par Ford Aquitaine Industries, à Blanquefort, sera clôturée dans les prochains jours. Un processus mené tambours battants qui suscite des crispations au niveau local, tant cet actif est stratégique aux yeux de Bordeaux Métropole.
Les 50 hectares possédés par Ford Aquitaine Industries viennent d'être mis en vente par CBRE pour aboutir fin 2022 tandis que leur dépollution doit s'achever début 2025.
Les 50 hectares possédés par Ford Aquitaine Industries viennent d'être mis en vente par CBRE pour aboutir fin 2022 tandis que leur dépollution doit s'achever début 2025. (Crédits : CBRE)

C'est une brochure commerciale d'une trentaine de pages, rédigée intégralement en anglais, qui a été largement diffusée par CBRE en France et à l'étranger. Mandatée par Ford Aquitaine Industries (FAI), la branche parisienne du cabinet de conseil en immobilier d'entreprise a donc lancé officiellement en mars dernier le premier round de commercialisation des vastes terrains détenus par le constructeur automobile à Blanquefort, au nord de la métropole bordelaise. Ces 50 hectares de foncier, proches du cœur de la métropole, constituent un actif aussi rare que précieux en Gironde et suscitent logiquement un vif intérêt de nombreux promoteurs et investisseurs. Ce qui n'empêche pas Ford d'opter pour un calendrier express.

Un calendrier resserré...

Les acheteurs potentiels intéressés par tout ou partie des sept parcelles répertoriées avaient en effet jusqu'au vendredi 29 avril pour se manifester auprès de CBRE et de son vendeur. Mais, selon nos informations, ce délai a finalement été rallongé de quelques semaines jusqu'à fin mai. L'analyse des offres pour arrêter une première sélection interviendra en suivant avant un deuxième round de négociations avec les candidats retenus prévu cet été. L'objectif étant de sélectionner un ou plusieurs projets partenaires au mois de septembre 2022 pour potentiellement initier ensuite une forme de dialogue compétitif. Les offres retenues par CBRE et FAI doivent notamment s'engager à rencontrer les services de Bordeaux Métropole pour détailler leur vision et leur projet.

Car, après des années de négociations difficiles avec Ford menant à la fermeture définitive du site, les élus métropolitains et les services de l'État entendent en effet garder un œil extrêmement vigilant sur l'avenir de ce site qui, compte-tenu de sa surface et de son emplacement, constitue un dossier aussi convoité que complexe à piloter.

50 précieux hectares


  • L'usine de Ford Aquitaine Industries, consacrée à la fabrication de boîtes de vitesses automatiques haut de gamme, a été mise en service en 1970, inaugurée en 1973 et fermée en 2019. Pendant des dizaines d'années, elle a été la seule usine Ford au monde à fabriquer depuis l'étranger des pièces automobiles pour le marché américain. Elle a employé 3.600 salariés à son apogée au tournant des années 2000 et y possède plus de 50 hectares de foncier. Situé au sein des parcs d'activité de Blanquefort et Bruges, le site est proche du cœur d'agglomération et de la rocade bordelaise et dispose également de deux dessertes ferroviaires et d'alimentation en eau, électricité et gaz pour des activités industrielles. Il est divisé en sept parcelles allant de 5,8 hectares pour la plus petite à 35,7 hectares pour la plus grande. 50 hectares c'est à la fois très vaste mais en même temps insuffisant pour, par exemple, accueillir des méga-usines de batteries électriques. Plusieurs opérateurs, dont Verkor, ont regardé le terrain avant d'y renoncer parce qu'ils recherchent entre 100 et 150 hectares de surface.

Mais le lancement de cette commercialisation en pleine campagne présidentielle et le calendrier très resserré imposé par Ford et CBRE ne manquent pas d'interpeller les acteurs locaux. Un dossier d'une telle importance aura en effet bien du mal à se dénouer aussi rapidement sur le plan politique. D'autant que rien ne presse puisqu'à après la démolition du bâti, qui est achevée, les travaux de dépollution et de remise en état des terrains doivent durer jusqu'au début de l'année 2025.

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... qui fait grincer des dents

Or, avec un processus de commercialisation aussi rapide, certains craignent que Ford ne cherche à vendre au plus offrant, à un investisseur hors sol, sans s'entraver de considérations ni de concertations locales.

"Sur la dernière période, Ford Blanquefort et l'usine sœur de Magna pesaient 2.000 à 3.000 emplois industriels sur le territoire. L'objectif politique affirmé par la Métropole c'est de recréer au moins autant d'emplois et ce n'est certainement pas avec des projets logistiques qu'on pourra y arriver", prévient un observateur local. "Le délai prévu par CBRE et FAI semble donc très court compte-tenu de l'ampleur du dossier, de sa complexité et de son impact pour le territoire et l'économie locale."

La candidature d'Amazon, un temps avancée, a justement été retoquée par les élus métropolitains en 2019, tout comme un vaste projet logistique autour du vin en 2021 sur le terrain voisin des circuits. Les élus métropolitains tiennent, d'une part, à la dimension industrielle, R&D et innovation des futurs emplois et, d'autre part, à y ajouter une coloration environnementale et circulaire. C'est ainsi l'entreprise Hydrogène de France qui a tiré son épingle du jeu et qui occupera une partie des 12,7 hectares des terrains des circuits qui appartiennent, eux, à la Métropole.

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Vers un nouveau bras de fer ?

Mais si les 50 autres hectares de terrains appartiennent formellement à Ford Aquitaine Industries, la Métropole conserve d'importants leviers de négociations voire un considérable pouvoir de nuisance si le profil de l'acheteur ne lui convenait pas. Outre la possibilité d'une préemption et la délivrance des permis de construire, les élus ont instauré fin 2020 sur l'ensemble de la zone un périmètre de prise en considération (PPC) lui permettant légalement de suspendre l'octroi des permis de construire. Cela permet concrètement à la métropole d'interdire temporairement au pétitionnaire le droit de réaliser le projet pour lequel il a fait une demande.

Sauf à aller frontalement au bras de fer, ce qui n'est pas à exclure compte tenu du passif, Ford et le futur acheteur ne pourront donc probablement pas tirer un trait sur des discussions approfondies avec les élus locaux et les services de l'État. D'autant que l'hypothèse d'une préemption est toujours possible même si elle coûterait cher à la collectivité et risquerait de retarder de plusieurs années supplémentaires le réaménagement de la zone où l'usine voisine de Magna Powertrain, également installée sur des terrains détenus par Ford, est aussi en difficultés.

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Sollicités par La Tribune, ni la Métropole ni CBRE n'ont souhaité prendre la parole.

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Commentaire 1
à écrit le 06/05/2022 à 8:27
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comment se fait il que la france n(est pas confisquer ces terrains apres la fermeture des usines ford ou tans de subvention leur ont servi a des fin inutile a l'entreprise n'est pas russe

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