
"En raison des conditions de marché actuelles et malgré l'intérêt évoqué par des investisseurs potentiels, nous pensons que l'augmentation de capital de Cnova [maison mère de Cdiscount] ne peut pas être menée dans des conditions satisfaisantes et elle est donc reportée", indiquait sobrement Cdiscount début octobre, quatre mois après l'annonce de sa volonté de lever 300 millions d'euros d'ici fin 2021. L'entreprise envisageait un placement privé d'actions nouvelles pour financer son déploiement international et ses capacités technologiques. Sachant que le groupe Casino souhaitait rester l'actionnaire majoritaire de la société.
"Nous considérons que les conditions de marché du e-commerce ne sont pas réunies actuellement puisque les résultats des ventes en ligne des principaux opérateurs sont globalement en retrait par rapport aux prévisions", précisait Cdiscount à La Tribune il y a quelques jours.
Le leader français du e-commerce attend donc de voir comment les ventes en ligne et les ventes en magasin vont réagir au Black Friday et aux fêtes de fin d'année, deux périodes clefs, avant de relancer son projet d'augmentation de capital. L'édition 2020 du Black Friday était présenté comme une année record par Cdiscount au micro de BFM TV avec "plus de 9 millions de visiteurs sur la seule journée du vendredi et une croissance des commandes à deux chiffres". Mais les chiffres du 3e trimestre 2021 ont contraint Cnova a abandonner ses prévisions annuelles : "Au vu de la faiblesse de la demande au troisième trimestre et de la nécessité d'investir dans les prix, Cnova n'est plus en mesure de confirmer ses objectifs financiers", indique l'entreprise. Pour 2021, Cdiscount prévoyait un Ebitda (*) de 160 millions d'euros, en croissance de +20 % sur un an, et visait un volume d'affaires et un chiffre d'affaires respectivement de 4,5 milliards d'euros (+9,8 %) et 2,3 milliards d'euros (+4,5 %). Des prévisions désormais obsolètes.
Un volume d'affaires de +8% au 3e trimestre
Le marché français du e-commerce est pourtant loin d'être sinistré avec un chiffre d'affaires global de 32,4 milliards d'euros au 2e trimestre 2021, en hausse de 25 % sur un an, et de 31 % par rapport au 2e trimestre 2019, selon le dernier bilan de la Fevad (Fédération du e-commerce et de la vente à distance). Avec les bouleversements des habitudes liés aux confinement sanitaires, les acteurs du e-commerce s'attendaient à des chiffres encore plus favorables pour cette année 2021. Mais la réouverture des commerces est passée par là, attirant à nouveau les clients dans les rues et les magasins en les éloignant, temporairement, de leur smartphone.
Dans ce contexte, Cdiscount affiche quand même un volume d'affaires en hausse de +7,5 % sur un an au troisième trimestre 2021 et un chiffre d'affaires en hausse de +9 %. La marketplace, habituel moteur de croissance, marque le pas avec un gain de seulement +2 % sur un an contre +6 % pour les ventes directes par Cdiscount. La part de la marketplace dans les ventes du groupe se stabilise ainsi à 43 %.
La stratégie de la marguerite
Parallèlement, conformément à sa stratégie de la marguerite qui consiste à valoriser ses savoir-faire individuellement, les activités BtoB de Ciscount bondissent de +54 % sur un an, notamment les revenus du marketing digital (solutions de publicité en ligne) qui affichent une croissance de +31 %. La plateforme publicitaire à destination des vendeurs et fournisseurs, baptisée Cars (Cdiscount ads retail solution), compte ainsi 6.670 clients tandis que Clogistics, la filiale logistique créée début 2019, revendique 25 clients et ambitionne de "devenir un acteur majeur de la logistique e-commerce en Europe".
Mais la filiale la plus récente, et celle sur laquelle Emmanuel Grenier, le PDG de Cdiscount, mise le plus, c'est Octopia. Créée officiellement au printemps dernier, cette nouvelle entité commercialise une solution de Marketplace clé en main pour les distributeurs et les e-commerçants. Octopia affiche une croissance de +15,4 % au 3e trimestre et de +41,1 % depuis le 1er janvier. Selon Cdiscount, cinq contrats ont été signés au 3e trimestre ce qui porte à sept le total sur 2021. La plateforme est désormais disponible en anglais et en espagnol.
Un nouveau patron des finances
A noter également, la nomination le 17 novembre dernier de Luc Péligry au poste de directeur administratif et financier de Cnova et de directeur général adjoint des finances de Cdiscount. Agé de 56 ans, cet expert-comptable agréé est diplômé de l'Essca et de l'Insead et est notamment passé par IMS Networks, CGX Aero, le Castres Olympique et, depuis 2018, Europcar au poste de directeur financier.
(*) Ebitda : résultat opérationnel courant avant charges d'amortissement et dépréciation.
(**) Le volume d'affaires ou GMV pour "gross merchandise volume" est un indicateur utilisé par les entreprises de vente en ligne. Il comprend les ventes de marchandises, les autres revenus et le volume d'affaire de la marketplace sur la base des commandes validées et expédiées TTC. Mais il n'inclut pas les réductions, les coûts de livraison et les retours de produits, ce qui explique notamment la différence avec le chiffre d'affaires (4,1 milliards d'euros Vs 2,2 milliards d'euros pour Cdiscount en 2020).
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