"Je suis pour interdire les vols de nuit et pour une régulation des low cost [...] L'aéroport doit comprendre qu'on a changé de monde", affirmait le maire socialiste de Mérignac, Alain Anziani, au lendemain de son élection à la présidence de Bordeaux Métropole en juin 2020. "Faut-il continuer à accueillir des compagnies low cost ? Faut-il continuer à payer 27 euros pour aller à Amsterdam en avion ?", interrogeait l'écologiste Pierre Hurmic, quelques semaines avant d'être élu maire de Bordeaux. Des déclarations à replacer, certes, dans le contexte de la pandémie de Covid-19 mais qui ont bien du mal à résister à l'épreuve des faits tant le monde d'après à l'aéroport de Bordeaux Mérignac ressemble à s'y méprendre au monde d'avant.
La dynamique de Ryanair
La compagnie low cost Ryanair, qui avait affiché de grandes ambitions pour Bordeaux dès le printemps dernier avec 33 destinations estivales dont trois inédites, remet le couvert pour l'hiver 2021/2022. Elle proposera dès le mois de novembre 22 destinations au départ de Bordeaux dont deux nouvelles vers l'Espagne : Madrid (deux vols par semaine) et Fuerteventura, sur les îles Canaries (un vol par semaine). Le tout pour seulement quelques dizaines d'euros. "Nous revenons à 100 % de notre capacité d'avant le Covid-19 sur tout le réseau français", assure ainsi Jason McGuinness, le directeur commercial de Ryanair, de passage en France, à Bordeaux et Paris, ce 16 septembre. Preuve de l'importance donnée à l'aéroport girondin où Ryanair a installé l'une de ses quatre bases françaises et 60 salariés.
"Les résultats de l'été 2021 ont été très bons même si ça reste un pari de faire revenir les passagers dans les aéroports. Mais je crois que les voyageurs ont compris que le passe sanitaire fonctionne, notamment en Europe. Il faut maintenant leur redonner confiance. C'est un peu plus long pour la clientèle professionnelle", détaille Jason McGuiness.
Preuve en est : Ryanair qui vient d'investir 22 milliards d'euros dans 210 nouveaux Boeing 737-8200 vise désormais 225 millions de voyageurs annuels en 2025.
3 millions de voyageurs à Bordeaux en 2021 ?
Un optimisme qui redonne aussi le sourire à Jean-Luc Poiroux, le directeur du développement de l'aéroport de Bordeaux. "L'été 2021 a été très bon. Nous visions 300.000 voyageurs en août et nous avons frôlé les 500.000. C'est le signe d'un engouement pour le voyage après une longue période contrainte. Ryanair était n° 4 à Bordeaux en nombre de passagers il y a 18 mois et est n°2 aujourd'hui, à quelques centaines de passagers du n° 1 [la compagnie low cost Easyjet]", explique-t-il.
Si bien qu'après un redémarrage très poussif en début d'année, Bordeaux-Mérignac vise désormais la barre des trois millions de voyageurs sur l'ensemble de 2021. Un objectif à comparer aux 2,3 millions de passagers enregistrés en 2020 après plus de 7,1 millions en 2019. Face à cet effondrement du trafic, l'aéroport s'est séparé d'un quart de ses 210 collaborateurs début 2020 dans le cadre d'une rupture conventionnelle collective qui dure jusqu'au 31 décembre 2021.
Le low cost sera déterminant
Et la fin de la navette Air France vers Orly n'a pas arrangé les choses. Mais Jean-Luc Poiroux veut désormais regarder devant : "Les réservations reprennent doucement mais surement pour la Toussaint et le cœur de l'hiver, voire même pour l'été 2022". Et il n'entend pas se priver de la manne que représentent les compagnies low cost, qui pesaient déjà environ 60 % du trafic bordelais en 2019 :
"Au-delà de la question du prix du billet, qui ne dit pas grand-chose en fait, le bilan du low cost est franchement positif sur l'économie locale et le développement de la mobilité. Et le poids du low cost sera plus important dans l'activité de l'aéroport de Bordeaux à l'avenir. Notamment parce que toutes les compagnies classiques tendent vers des tarifications plus basses."
Tandis que Jason McGuiness ne dit pas autre chose, soulignant la résilience des compagnies low cost sur le marché aérien : "Chez Ryanair, nous investissons dans des avions moins consommateurs et dans des recherches sur des carburants moins polluants alors même que les compagnies classiques européennes ont reçu 30 milliards d'aides des Etats sans presque aucunes contreparties environnementales ! C'est une vraie distorsion de concurrence mais ça ne nous empêche pas d'aller de l'avant !"
La compagnie irlandaise revendique un objectif de 12,5 % de carburant durable d'ici 2030, soit plus du double de la cible fixée en juillet dernier par l'Union européenne.
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