E-commerce : comment Cdiscount entend tripler son activité d'ici 2025

ANALYSE. Après la création d'Octopia le 1er avril, Cdiscount a annoncé le 1er juin une augmentation de capital de 300 millions d'euros. C'est le 2e étage d'une fusée qui doit permettre au champion français du e-commerce de tripler son activité pour atteindre 12 milliards d'euros de volume d'affaires d'ici 2025 avec le BtoB comme principal carburant. Le 1er trimestre 2021 est, lui, encourageant. Explications.
Les entrepôts de Cdiscount, à Cestas, en Gironde.
Les entrepôts de Cdiscount, à Cestas, en Gironde. (Crédits : Cdiscount)

Il ne faut pas sous-estimer le virage stratégique que constitue pour Cdiscount le lancement d'Octopia il y a quelques semaines, tant il concrétise la logique de plateforme numérique globale défendue par son PDG Emmanuel Grenier depuis des années. Le premier trimestre 2021 a été marqué par la place toujours plus importante qu'occupe l'activité de la marketplace (place de marché) dans l'équilibre global de Cdiscount. Avec des ventes en hausse de +34 % et des revenus de +43 % à 49 millions d'euros par rapport au premier trimestre 2020, la marketplace lancée en 2011 pèse désormais 46 % du volume d'affaires total. Elle prend ainsi toujours plus d'importance par rapport aux ventes directes de Cdiscount, moins rentables. L'autre trait marquant de ce début d'année c'est la forte progression des revenus issus du marketing numérique (+43 % sur un an) grâce au lancement d'une nouvelle plateforme dédiée Cdiscount Advertising. Cette dernière a vocation à structurer de manière autonome, y compris en marque blanche, l'offre en matière de publicité en ligne et de marketing ciblé développée par Cdiscount.

Octopia se lance pour jouer les premiers rôles

Au total, le volume d'affaires (*) est en hausse de +12 % sur un an à 1,006 milliard d'euros au premier trimestre 2021 et le chiffre d'affaires de +5 % à 518 millions d'euros. Le tout avec un trafic en hausse de 19 % sur les trois premiers mois de 2021. Mais l'évènement majeur c'est bel et bien l'officialisation de la naissance d'Octopia.

"Notre activité BtoB se développe rapidement grâce à la dynamique du marketing et d'Octopia, notre solution de marketplace clef en main. De plus en plus de vendeurs et de fournisseurs utilisent notre plateforme de marketing digital pour accroître leurs ventes. La montée en puissance d'Octopia s'accélère avec plus de 500 sites connectés à travers l'Europe et un premier client majeur", salue Emmanuel Grenier, le PDG de Cnova, maison-mère de Cdiscount elle-même détenue à 68 % par le groupe Casino.

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Octopia c'est le nom de la nouvelle filiale BtoB de Cdiscount lancée le 1er avril dernier et dédiée à la commercialisation auprès des entreprises et distributeurs d'une solution de marketplace intégrée et clef en main : technologie, visiteurs, vendeurs et logistique. Elle réunit plus de 250 salariés du groupe. "Cette nouvelle offre est une étape au moins aussi importante pour nous que le lancement de notre propre marketplace en 2011. C'est potentiellement autant transformant pour notre modèle en permettant à nos vendeurs d'aller vendre dans des centaines de sites en Europe et à travers le monde et à bientôt des centaines et des milliers de distributeurs, en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient", expliquait à La Tribune en mars dernier Thomas Metivier, directeur de la marketplace, de l'international, de la stratégie et de l'innovation.

300 millions d'euros pour muscler le jeu

Au regard de l'enjeu, Cdiscount veut mettre les moyens pour déployer cette offre stratégique. Le champion tricolore a donc annoncé début juin le placement d'actions nouvelles pour un montant d'environ 300 millions d'euros d'ici la fin de l'année 2021 "sous réserve des conditions de marché" et envisage, ensuite une augmentation du flottant à la Bourse de Paris (actuellement de 1 %). Dans tous les cas, le groupe Casino entend demeurer l'actionnaire majoritaire de la société. Ces montants conséquents serviront à accélérer la croissance à l'international, notamment en Afrique et au Moyen-Orient, et tout particulièrement celle d'Octopia, pour atteindre 12 milliards d'euros de volume d'affaires à l'horizon 2025. Cela revient tout simplement à tripler l'activité qui atteignait 4,1 milliards d'euros de volume d'affaires en 2020 ! "Notre ambition est de devenir le premier leader mondial de l'écosystème des marketplaces !", résume Emmanuel Grenier. Octopia représenterait entre un tiers et la moitié de ces 12 milliards d'euros en 2025 et génèrerait un Ebitda du même niveau que celui de la marketplace dès 2023.

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Le groupe, né à Bordeaux en 1998 avant d'être racheté par Casino au début des années 2000, veut ainsi désormais s'émanciper clairement de sa seule activité de e-commerçant :

"Cnova affirme son ambition de devenir un leader global en tant que e-commerçant et fournisseur mondial de premier plan de solutions technologiques pour l'écosystème des marketplaces en s'appuyant sur ses atouts stratégiques développés au cours des dix dernières années : ses capacités de marketplace, son expertise en marketing numérique, sa logistique différenciante et son réel savoir-faire technologique. [...] Octopia permettra d'accroître massivement le potentiel de croissance de Cnova ainsi que sa rentabilité", détaille le groupe.

La stratégie de la marguerite

Après Clogistics, qui réunit les activités logistiques et a généré 400 millions d'euros de revenus en 2020, et Cdiscount Advertising, qui rassemble sous une même marque les offres de publicités BtoB, le champion français du e-commerce cherche avec Octopia à valoriser son savoir-faire en matière de place de marchés. Il déploie ainsi une stratégie de la marguerite dont la marketplace grand public, peu ou pas rentable, constitue le cœur et le produit d'appel pour générer du trafic et du volume. Parallèlement, chacun des trois pétales (Clogistics, Cdiscount Advertising et Octopia) a vocation à être valorisé séparément en BtoB pour générer cette précieuse rentabilité qui fait défaut à Cdiscount depuis tant d'années.

Une stratégie qui semble donc autant choisie que subie, selon Jean-Paul Crenn, le président de Vuca Strategy. S'il estime que le modèle des places de marché est condamné à terme, le pari de la filiale du groupe Casino peut fonctionner à condition de se déployer très vite :

"Le pari de Cdiscount c'est que ce marché des marketplaces va continuer à croître de manière organique dans les années qui viennent. Leur objectif est d'être parmi les premiers à se positionner pour prendre suffisamment de parts de marché pour verrouiller ce marché. Il y a une prime aux premiers entrants ! Ils se positionnent clairement avec Octopia sur l'Europe, le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord et l'Afrique et c'est intelligent parce qu'ils y anticipent à raison une très forte croissance du e-commerce."

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Pour 2021, Cdiscount prévoit un Ebitda (résultat opérationnel courant avant charges d'amortissement et dépréciation) de 160 millions d'euros après 133 millions d'euros réalisés en 2020, 82 millions d'euros en 2019 et 48 millions d'euros en 2018. Les prévisions présentées début juin 2021 tablent également sur plus de 50.000 marchands référencés chez Cdiscount en 2025 contre 14.000 en 2021 et sur la moitié du volume d'affaires générée par l'abonnement "Cdiscount à volonté" contre un tiers actuellement. L'entreprise va aussi intensifier ses propres dépenses de marketing et publicité qui ne pèsent que 2,1 % de son volume d'affaires contre respectivement 4,5 % et 6 % chez Amazon et Zalando. Ajoutés aux inévitables investissements technologiques, ces dépenses publicitaires risquent à nouveau de creuser les pertes à court terme. Malgré sa position de numéro deux du commerce en ligne en France, Cdiscount a encore affiché en 2020 une perte nette de -21,4 millions d'euros, soit une amélioration sensible par rapport aux -65,3 millions d'euros de pertes de 2019.

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(*) Le volume d'affaires ou GMV pour "gross merchandise volume" est un indicateur utilisé par les entreprises de vente en ligne. Il comprend les ventes de marchandises, les autres revenus et le volume d'affaire de la marketplace sur la base des commandes validées et expédiées TTC. Mais il n'inclut pas les réductions, les coûts de livraison et les retours de produits, ce qui explique notamment la différence avec le chiffre d'affaires (4,1 milliards d'euros Vs 2,2 milliards d'euros pour Cdiscount en 2020).

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Commentaires 2
à écrit le 02/07/2021 à 10:34
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En faisant payer les gens qui ne le savent pas, une tendance haussière sur internet d'ailleurs où l'empire des faibles.

à écrit le 02/07/2021 à 9:36
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Je leur ai acheté une petite babiole a 11 euros port compris il y a pas longtemps, ça m'a fortement déplu de recevoir après de la retape téléphonique, votre achat vous donne droit a une nouvelle offre énergétique.... D'abord sur le portable (j'aime p...

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