Starlink souhaite lancer, grâce à son projet SpaceX, 42.000 satellites de 225 kg chacun en orbite basse, afin de déployer internet dans des zones blanches du monde, où son accès est aujourd'hui limité. Pour l'instant, 1.200 d'entre eux ont été lancés, et le processus se poursuit, celui d'installer des antennes relais dans des endroits stratégiques. C'est le cas des trois villes françaises retenues, Villenave d'Ornon, Gravelines et Saint-Senier-de-Beuvron. Mais si sur le papier ces installations pourraient sembler être une simple formalité pour Starlink, elle a suscité l'émoi dans deux de ces trois municipalités. En cause, le manque d'informations dévolues au projet. Les édiles, méfiants, préfèrent pour l'instant refuser le projet dans l'attente d'éléments complémentaires.
Internet accessible partout
Lancé en 2019, les satellites américains de SpaceX ont pu être observés par certains dans le ciel étoilé. Le projet d'Elon Musk est d'offrir, grâce à ses antennes relais, un accès à internet dans 100 % de la planète. En France, l'Arcep (l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes) a donné son feu vert pour l'implantation de stations au sol sur son territoire. Une proposition qui a séduit la municipalité de Villenave d'Ornon, qui, après avoir étudié les règles d'urbanisme de la commune, puis, suite au retour du service sanitaire de Bordeaux métropole, a donné son feu vert au permis de construire, pour l'installation sur le terrain privé demandé.
Les antennes de Starlink, déployées à Villenave-d'Ornon (crédits : Agence APPA).
"On nous a répondu qu'au vu des éléments, il n'y avait pas de champ électromagnétique pour les riverains, avec un signal pointé vers le ciel qui sert à guider les satellites dans la stratosphère", explique Laurent Grasset, conseiller municipal délégué à l'urbanisme et au développement durable, à l'aménagement de la ville pour la commune de Villenave d'Ornon (36.000 hab.). "Nous avons mené d'autres investigations de personnes indépendantes disant qu'on est sur une technologie équivalente à de la réception satellite, on ne fait pas l'amalgame comme ça a pu être le cas avec la 5G, ça n'a strictement rien à voir. Forts de ces éléments là et étant rassurés, nous avons accepté l'autorisation de l'urbanisme" conclut-il. A Villenave d'Ornon, précise-t-il, l'installation de la station désormais finalisée a peu suscité l'émoi de ses concitoyens. Seul un élu de son opposition, Yannick Boutot (parti radical de gauche) a émis des réserves en conseil municipal.
Un problème démocratique ?
Ce que pointe Yannick Boutot, c'est l'absence de débats sur le sujet. "Je n'ai pas forcément de doutes sur les ondes, sachant qu'en plus l'Arcep et l'Etat sont censés encadrer les choses. Pour moi, le problème est plutôt démocratique dans le sens où ce sont des installations qui se confondent avec certaines données scientifiques sans débat local, de communication particulière de la mairie, de la métropole", poursuit le conseiller municipal. A Gravelines (12.000 hab.), le maire Bertrand Ringot appuie le fait qu'il ne s'oppose pas à une avancée technologique, mais dénonce également que ce projet d'envergure n'ai donné lieu à aucun débat au Sénat ou à l'Assemblée nationale. Il a donc décidé de ne pas signer le permis de construire demandé par le sous-traitant du projet dans le Nord, Lumen Technologies, et de demander une concertation départementale au préfet, qui va désormais prendre le relai du dossier.
A Saint-Senier-de-Beuvron, l'édile de ce village de 357 âmes va également devoir se référer au préfet. Il a refusé la demande préalable et n'a, pour l'heure, reçu aucune demande de permis de construire. Là encore, la municipalité se défend "d'être contre le progrès", arguant être dans l'attente du haut débit pour faciliter l'accès à des services comme la télémédecine sur sa commune. "Je n'ai pas du tout envie que ma commune serve de cobaye", s'agace Benoît Hamard. "Nous n'avons pas reçu les études d'ondes et de sol demandées. On est dans le périmètre du mont Saint-Michel, je veux protéger mes habitants et les animaux. Il me faut des garanties, des certitudes, on va rester vigilants jusqu'au bout", poursuit-il.
Outre les municipalités concernées, le projet inquiète également certains astrophysiciens, qui pointent du doigt la pollution visuelle que pourraient engendrer ces satellites lors d'observations. En juillet dernier, la constellation de Starlink a en effet empêché la photographie de la comète Neowise.
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