"Le projet territoire zéro chômeur ne doit pas résumer la politique de l'emploi à Bordeaux"

Alors que la ville de Bordeaux candidate officiellement à l'expérimentation Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD), Catherine Fabre, députée LREM de Gironde et conseillère municipale d'opposition, explique à La Tribune pourquoi elle soutient le projet mais aussi quelles en sont les limites pratiques. "Ce n'est pas une politique de l'emploi de grande échelle. Au mieux, cela concernera entre 60 et 80 bénéficiaires dans un quartier bien précis de Bordeaux et d'ici 18 mois à deux ans", rappelle-t-elle.
Catherine Fabre est députée LREM de Gironde depuis 2017 et conseillère municipale de Bordeaux depuis l'été dernier.
Catherine Fabre est députée LREM de Gironde depuis 2017 et conseillère municipale de Bordeaux depuis l'été dernier. (Crédits : Assemblée nationale)

LA TRIBUNE - Le groupe Renouveau Bordeaux, auquel vous appartenez, et le groupe Bordeaux Ensemble soutiennent le projet de la majorité municipale d'une candidature de Bordeaux pour expérimenter le dispositif TZCLD dans le quartier du Grand Parc. Vous avez aussi voté la proposition de loi à l'Assemblée nationale.  Pourquoi ?

CATHERINE FABRE - Parce que c'est un beau dispositif qui se donne pour promesse d'arriver à mettre en relation les besoins d'un territoire et les personnes qui y vivent. Ce sont souvent des services pas rentables, et où il n'y a donc pas d'offre dans le secteur marchand, mais qui apportent néanmoins une valeur ajoutée à la société : services à la personne et de proximité, arrosage et entretien, sensibilisation à l'environnement, etc. Ce que propose l'expérimentation c'est de financer ces services et d'embaucher en CDI des demandeurs d'emploi de longue durée. C'est un projet de territoire gagnant-gagnant qui a démontré sa pertinence mais qui n'a pas encore fait ses preuves autour d'un modèle économique pérenne. C'est pour cela qu'il faut poursuivre les expérimentations.

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Quelles sont les conditions de réussite de la candidature bordelaise ?

La première condition c'est de réunir et fédérer l'ensemble des acteurs économiques, politiques et associatifs du territoire et cela prend du temps ! Il faut travailler sur le fond du projet, identifier les besoins et les activités non concurrentielles, associer les chômeurs de longue durée, etc. Ce qui me laisse penser que pour construire une candidature crédible l'horizon de six à sept mois annoncé par la mairie est vraiment très ambitieux. Au regard des projets qui existent ailleurs, notamment à Castillon-la-Bataille, cela prendra probablement plus que six à sept mois pour aboutir à un projet mature.

Par ailleurs, la candidature bordelaise devra démontrer sa spécificité et sa pertinence dans une zone urbaine. Quelles sont les activités non concurrentielles dans une ville comme Bordeaux ? Pour gagner du temps, il faudra, comme l'a compris la mairie, s'appuyer sur une structure ou une entreprise déjà opérationnelle dans le quartier pour porter le projet d'entreprise à but d'emploi (EBE). Et celle-ci devra ensuite trouver un moyen de s'autofinancer parce que les personnes qui seront embauchées en CDI n'auront pas vocation à entrer sur le marché du travail classique. Il y a donc beaucoup de travail à mener dans les prochains et le fait qu'une personne à la mairie soit nommée à plein temps sur ce projet est, de ce point de vue, une très bonne chose.

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Quel sera l'impact réel de cette expérimentation et à quelle échéance ?

Le Territoire zéro chômeur de longue durée est un projet qui se fait nécessairement dans la dentelle pour trouver un projet professionnel adapté à chaque demandeur d'emplois et au territoire. C'est du quasi sur-mesure, ce n'est donc pas une politique de l'emploi de grande échelle ! Au mieux, cela concernera entre 60 et 80 bénéficiaires dans un quartier bien précis de Bordeaux et d'ici 18 mois à deux ans. C'est une très bonne chose mais ce n'est pas ce dispositif qui permettra de résoudre le chômage des jeunes, ni les problèmes d'emploi dans les autres quartiers de la ville. Donc ce dispositif, même s'il est très prometteur, ne doit pas résumer la politique de l'emploi à Bordeaux

Que préconisez-vous en complément ?

La majorité municipale veut soutenir fortement l'économie sociale et solidaire (ESS), c'est bien mais il faut qu'elle utilise pleinement les moyens du plan de relance qui ciblent ce secteur. Et la priorité est de trouver et d'assurer des débouchés aux entreprises de l'ESS en utilisant la commande publique et en sensibilisant les entreprises du secteur marchand à cette question. C'est comme cela qu'elles pourront créer des emplois.

Il faut aussi solliciter le plan de relance en matière d'insertion par l'activité économique, de garantie pour l'emploi des jeunes, d'aides à l'apprentissage, etc. Il faut mobiliser la mission locale pour aller chercher les jeunes en décrochage professionnel. Enfin, l'axe essentiel pour l'emploi et l'activité économique, c'est la vision portée par les acteurs politiques du territoire pour prioriser la transition écologique, le numérique, la robotique, l'IA, l'e-commerce de proximité, etc. Sur tous ces sujets, il faut aller rapidement se positionner sur les appels à projet du plan de relance pour décrocher les financements de l'Etat !

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