Ce qui fait très mal au secteur aéronautique et spatial aujourd'hui, c'est l'érosion du carnet de commandes. Safran Helicopter Engines, dont le siège est situé à Bordes dans les Pyrénées-Atlantiques, a ainsi dû faire face à la baisse brutale de l'activité de ses clients et de ses fournisseurs, avec plus de 10 % d'annulations de commandes sur l'année 2020. Il s'agit d'un exemple parmi d'autres. De très nombreuses entreprises de la filière sont touchées, même si certaines s'en sortent mieux que d'autres.
"Arianegroup est dans une situation difficile mais moins que ses actionnaires Airbus et Safran. Il faut qu'Ariane 6 soit livrée, donc le travail continue, mais notre chance, c'est surtout que 40 % du chiffre d'affaires du groupe dépend de la stratégie militaire, précisément du missile M51 dont l'activité a été maintenue. La direction générale de l'armement (DGA) continue à nous solliciter pour qu'il n'y ait pas de retard dans les livraisons", explique Philippe Géry, délégué syndical central CFE- CGC d'ArianeGroup.
Même discours du côté de chez Potez Aéronautique, spécialiste de la fabrication d'éléments d'aérostructures dans les Landes : "Si l'activité composites a été touchée par la crise, nous n'avons pas vécu d'érosion sur la partie militaire qui représente entre 40 et 45 % de notre chiffre d'affaires", précise Antoine Potez, directeur général de Potez Aéronautique qui livre notamment les empennages de l'E-2D, un avion de surveillance aérienne et de commandement aéroporté. En revanche, pas de commentaire sur l'activité réalisée pour Dassault Aviation. Le groupe lui-même ne communique pas à ce stade : "Concernant le plan de charge, il est encore trop tôt", précisait fin mai le groupe implanté à Mérignac où travaillent 1.700 personnes.
En attendant, quoiqu'il arrive, la production a repris sur le site de la métropole bordelaise en particulier pour pouvoir livrer les trois Rafales commandés par les Indiens et ainsi éviter toute pénalité de retard. Quinze appareils doivent, en tout, être livrés cette année. La production s'est également poursuivie sur les Falcon 2000, 7X et 8X pour donner de la charge au site de Little Rock dans l'Arkansas aux Etats-Unis, spécialisé dans la finition, la peinture et l'intérieur.
+20 % de temps de production
Mais comme partout, malgré la reprise, l'activité tourne au ralenti. "Pour la production du Rafale, une dizaine de personnes étaient mobilisées en avril, contre une quarantaine fin mai pour un effectif total qui avoisine les 90 salariés", précise Romain Fougerolles, délégué syndical CGT chez Dassault à Mérignac. Du côté d'ArianeGroup, après une inactivité totale à la mi-mars, le pourcentage est tombé à 15 %. "Le plan de déconfinement est robuste, en revanche, à l'image d'autres sociétés, les mesures qui ont été prises ont entrainé une baisse de l'efficacité, une augmentation des temps de production de 20 % en moyenne, ce qui n'est pas sans conséquence sur les délais et les coûts", explique Philippe Géry. "Désormais nous rentrons dans l'étape deux qui va consister à traiter les conséquences opérationnelles et économiques pour ArianeGroup."
"Bataille économique"
De son côté, Stelia Aerospace précise "se concentrer et coordonner les forces de l'entreprise dans la bataille économique, avec pour enjeu immédiat la préservation de l'entreprise et de son écosystème." "L'enjeu pour 2020 et 2021 est la préservation de l'emploi avec trois objectifs : réussir le démarrage industriel de l'entreprise, regarnir le carnet de commandes et préserver la compétitivité", commente, pour sa part, la direction de Safran Helicopter Engines qui rappelle que l'industrie de l'hélicoptère était toujours en phase de rémission suite à la crise du segment du transport offshore. "Et quid du marché spatial ? Comment va évoluer le besoin ?", ajoute Philippe Géry pour ArianeGroup. Le voile de l'incertitude à court et moyen terme est loin d'être levé pour le secteur.
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