Jocus, nouvelle victime de la "chasse au pitch" de Brioche Pasquier

La petite maison d'édition de jeux Jocus, installée à Bordeaux, fait face à un problème de taille. Ce dernier prend la forme du n°1 français de la viennoiserie, 3.200 salariés, 658 M€ de chiffre d'affaires. Le groupe Brioche Pasquier fait effectivement la chasse depuis quelques semaines à toutes les structures utilisant le mot "pitch", arguant qu'elles portent préjudice à sa célèbre marque de brioche fourrée. Si bien que la sortie du nouveau jeu de Jocus, baptisé Pitchout, est bloquée pour le moment.
(Crédits : Jocus)

On ne sait pas ce que prennent au goûter les 3 salariés de Jocus, mais on a des raisons de douter qu'il s'agisse des célébrissimes brioches fourrées Pitch. Le groupe familial agroalimentaire Brioche Pasquier, détenteur de la marque après l'avoir déposée auprès de l'Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) pour plusieurs secteurs d'activité, est en effet une grosse épine dans le pied de la petite société bordelaise. Pasquier a engagé depuis plusieurs semaines une vigoureuse "chasse au pitch", sommant toutes les structures françaises qui utilisent le terme dans leur nom ou dans leur produit de le retirer. Problème : pitch est un terme en passe de devenir parfaitement courant dans le vocabulaire des startups et au-delà, puisqu'il désigne un exercice de présentation très précis dans un temps restreint. Si bien que l'écosystème numérique est depuis vent debout contre le groupe Brioche Pasquier. Un hashtag dédié, #pitchgate, a ainsi été créé sur Twitter. De son côté Pasquier n'a pas réagi dans les médias mais l'a fait sur Twitter :

Jusqu'à présent, on pensait les actions du groupe Pasquier orientées en direction du monde des startups mais le cas de Jocus, qui n'a rien à voir avec cet univers, semble indiquer que ce n'est pas le cas. Jocus n'est pas une startup et n'est pas non plus un acteur de l'agroalimentaire : c'est un éditeur de jeux créé à Bordeaux et qui emploie 3 personnes, plus quelques stagiaires et temps partiels. L'entreprise, fondée en juillet 2015, s'est fait connaître avec Sbires, son premier jeu de société et de cartes stratégique, inspiré de l'univers médiéval. Deux campagnes de financement participatif, la première sur la plateforme Ulule (72.000 €), en France, puis la 2e sur Kickstarter au plan mondial (plus de 100.000 $), avaient mis Sbires sur les rails avec des montants récoltés très importants pour ce type de projets alors même que Jocus était inconnue. Depuis, Sbires a été vendu à plus de 15.000 exemplaires dans 16 pays, et est distribué plus spécifiquement en France, en Espagne et en Amérique du Sud, ainsi qu'en Angleterre et peut-être bientôt en Russie.

Lire aussi : Made in Bordeaux, le jeu Sbires séduit les USA

Pichenettes, baseball et anglicismes

Jocus prépare son second bébé : Pitchout, imaginé par l'auteur bordelais Adrien Charles. "Ce jeu d'adresse et de tactique oppose deux joueurs, chacun devant venir à bout de l'équipe adverse à grands coups de pichenettes, le même geste que l'on utilise quand on joue aux billes, explique Mickaël Trividic, de Jocus. Chaque pion, que l'on appelle pitcher, dispose d'un pouvoir spécifique pour sortir les autres de l'aire de jeu."

Après avoir testé le jeu de manière informelle, Jocus s'apprête à présenter Pitchout à Cannes, lors du Festival international des jeux qui s'y tiendra du 23 au 25 février, où elle espère mobiliser autour de son souci. Car elle aussi est victime du "pitchgate".

"En juillet dernier, nous avons déposé une demande auprès de l'INPI pour Pitch Out, en deux mots, résume Mickaël Trividic. Brioche Pasquier s'est opposé à cette demande et nous a adressé un courrier stipulant que ce nom portait préjudice à sa marque et nous laissait le choix entre un retrait de la demande ou des poursuites. Sur le coup, on a cru à une blague ! Après avoir consulté notre avocate, nous avons déposé une nouvelle demande en un seul mot cette fois, Pitchout. Brioche Pasquier a de nouveau fait opposition. Nous avons fait plusieurs tentatives pour en discuter avec eux. C'est au moment de la vague #pitchgate que nous nous sommes aperçus que nous n'étions pas les seuls dans ce cas et qu'aucune discussion n'était possible."

La société bordelaise plaide la bonne foi :

"Ce nom n'est pas sorti de nulle part, reprend Mickaël Trividic. Le fondateur de Jocus, Jean-Pierre Nicolas, est fan d'un vieux jeu qui s'appelle Pitchcar, nous voulions l'inscrire dans cette lignée. Mais surtout, c'est un terme anglophone qui définit l'action de sortir quelque chose de quelque part. Nous avons choisi ce nom car il reflète le geste de sortir un pion adversaire, un pitcher dans notre univers, en dehors de l'aire de jeu afin de l'éliminer. C'est la principale action de notre jeu, donc la cohérence est totale. Pitchout est par ailleurs un terme utilisé notamment dans le baseball et définit une action bien spécifique."

Jocus se donne un mois pour trouver une solution. Elle espère à cette échéance lancer une campagne de financement participatif sur Kickstarter. Sous quel nom ? Mystère. "Nous pouvons sortir malgré tout le jeu sous celui de Pitchout mais la marque ne nous appartiendra pas, avec tout ce que ça implique", précise Mickaël Trividic.

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Commentaires 6
à écrit le 27/02/2018 à 8:59
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Seconde raison pour boycotter Pasquier : l'utilisation d'huile de palme !!!

à écrit le 27/02/2018 à 8:55
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Scandaleux qu'une marque puisse s'accaparer des mots ou expressions : c'est ni plus ni moins qu'une privatisation de l'expression !

à écrit le 22/02/2018 à 18:19
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Il y a une dizaine d'année, l'acharnement mesquin et ignoble de Kraft-foods contre une modeste couturière de 58 ans dont le tort était de se prénommer Milka et d'avoir recu en cadeau de la part de ses enfants un site nommé milka.fr pour promouvoir sa...

à écrit le 22/02/2018 à 17:32
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Ridicules et contreproductifs évitez d'acheter

à écrit le 22/02/2018 à 17:28
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Boycottons cette entreprise médiévale et vous verrez ils arrêterons très vite ! Et la santé de nos enfants en sera probablement améliorée

le 27/02/2018 à 8:56
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Bonne idée : je participe !

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