Les projets sidérurgiques se déploient aux Pays basques

Ils y croient et investissent lourdement : les industriels de la sidérurgie consacrent en ce moment des budgets conséquents à des installations de laminage de l'acier, tant qu'à Bilbao qu'à Bayonne. Points communs, tous sont de nationalité espagnole (basque, galicien ou catalan) et sont stimulés par la reprise des marchés de l'acier, notamment pour l'automobile.
Le port de Bayonne dispose d'atouts logistiques indéniables

Sidenor à Bilbao. Pas moins de 40 millions d'euros et 45 autres en pointillés en 2018 ont permis au groupe sidérurgique basque Sidenor de mettre en route le 20 novembre dernier un train de laminage et un four supplémentaire à Basauri. Ce site de la banlieue de Bilbao offre une capacité de 1,06 million de tonnes d'acier destinées à l'industrie automobile, mais pas seulement : ses 900 salariés usinent aussi des pièces pour la machine-outil, les éoliennes et les chantiers navals.

L'heure est donc à renforcer les capacités de production car la demande des constructeurs de véhicules est vigoureuse, souligne José-Antonio Jainaga. Pour le président de Sidenor, la conjoncture actuelle est à l'optimisme, même si la concurrence est rude. Et de déplorer le coût élevé de l'énergie électrique en Euskadi, un facteur qui a poussé certains de ses confrères à franchir les Pyrénées.

Pour autant, ce nouvel investissement affirme Sidenor comme l'une des locomotives d'un secteur industriel traditionnellement fort dans la Communauté autonome d'Euskadi. Il y a cinquante ans, l'entreprise produisait 90.000 tonnes par an, avant qu'elle ne permette en 2006 au brésilien Gerdau de prendre pied en Europe via un chèque de 444 millions d'euros versé aux entrepreneurs basques alors propriétaires.

Cependant, au fil des soubresauts du marché mondial, Gerdau s'est désengagé et, le 20 mai 2016, a cédé pour 155 millions d'euros Sidenor à sa direction locale. Restait à ces entrepreneurs basques à améliorer performance et rentabilité : c'est chose faite dans un contexte sensiblement plus favorable. Par exemple, en confectionnant via ses laminoirs des aciers plus résistants pour les moteurs de voitures et en exportant au-delà des 19 pays déjà touchés.

L'aciérie Celsa de Boucau. De laminoir il en est également question dans l'estuaire de l'Adour, et plutôt deux fois qu'une. A côté de l'Aciérie (électrique) de l'Atlantique (ADA), le projet est de compléter l'installation entamée en 1995 bord à quai dans le port de Bayonne par le laminoir qui lui a toujours fait défaut. Cette fois, la Compañia Española de Laminación (Celsa) veut doter sa filiale française de deux laminoirs, l'un à chaud, l'autre à froid, un projet chiffré en 2015 à 200 millions d'euros. Un engagement qui prend forme avec le quasi-bouclage ce mois de novembre du tour de table financier.

La famille catalane Rubiralta a pris sur ce site la succession de plusieurs sociétés ibériques, dont Marcial Ucín qui y avait réalisé la première coulée d'acier le 28 octobre 1996. D'une capacité théorique supérieure à 1 million de tonnes, l'installation, à cheval sur les communes de Boucau (Pyrénées-Atlantiques) et de Tarnos (Landes), sort des billettes d'acier grâce à un four électrique nourri essentiellement de ferrailles importées par voie de mer. Coût de l'énergie intéressant et accès maritime avaient d'ailleurs été les principales motivations à cet investissement qui, clin d'œil de l'histoire, prenait place sur les terrains occupés jusque dans les années cinquante par les Forges de l'Adour.

Mais Ucin, Aceralia ou Arcelor, ces billettes d'acier manquaient au laminoir qui donnerait plus de valeur à ce produit sidérurgique, au-delà des ronds à béton actuels. Le paysage mondial de l'acier s'améliorant, le tour de table financier avec des établissements bancaires essentiellement espagnols est devenu plus fluide. Avec le renfort de Bpifrance et de la Caisse des dépôts française, l'accord vient de se faire sur une enveloppe de 60 millions d'euros.

Cette étape permettra à Celsa, leader des produits sidérurgiques longs, d'édifier deux laminoirs d'une capacité de 500.000 tonnes, générant 220 postes de travail, bienvenus pour la commune de Tarnos et le département des Landes. Mais aussi pour le port de Bayonne dont Celsa assure déjà le tiers du trafic : ferrailles à l'arrivée et billettes d'acier à l'exportation.

Le laminoir des Landes à Tarnos. Autre projet qui se faisait désirer depuis longtemps, mais cette fois-ci parait la bonne : le bâtiment massif à proximité du port de Bayonne s'agite déjà sur Tarnos, car décembre sera le mois des essais. L'outil est aujourd'hui aux mains de Añon Atlantic, une filiale d'un groupe familial galicien établi à Laracha, près de A Coruña (La Corogne).

Le laminoir des Landes comprend un train de laminage pour la tôle forte (8 mm), 18.000 m² offrant des aires de stockage et une unité de traitement de tôle haut de gamme sur 5.000 m². L'acier plat sortira ici sous forme de bobines, à raison (à terme) de 500.000 tonnes par an avec une centaine d'emplois à la clef. 60 millions d'euros ont été mis sur la table, d'abord par l'italien Beltrame qui a du différer le démarrage faute d'un soutien suffisant des banques, avant qu'Añon ne prenne le relais.

Bien sûr, tous ces tonnages intéressent fortement la CCI de Bayonne-Pays basque, gestionnaire du port, et la région Aquitaine : propriétaire des installations depuis 2006, elle soutient financièrement la naissance de ces laminoirs. Et le trafic maritime dans l'estuaire de l'Adour devrait retrouver d'ici cinq ans les 3 millions de tonnes.

Au final, qu'est-ce qui fait courir tous ces sidérurgistes ? A l'évidence, une reprise économique indéniable qui stimule une demande automobile gourmande de tôles, la construction de logements ou les travaux publics consommateurs d'armatures. Autre facteur, la qualité des sites disponibles et, surtout, les capacités logistiques : un port facile d'accès fait la différence. Enfin, la facture électrique est un élément décisif, et la France est là mieux placée que ses voisins. Sans compter que la crise vécue dans la Péninsule ibérique il y a dix ans a fait mettre en sommeil nombre de sites basques anciens (Zumarraga chez Arcelor ou Azpeitia chez Gallardo). Or après une phase de purge, les capacités de production font défaut. Et autant construire du neuf pour ceux qui croient au fer.

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Commentaire 1
à écrit le 28/11/2017 à 9:41
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La sidérurgie n'est pas un métier foutu, apparemment. Encore un lieu commun à sortir de la tête du public. Bref : les drames à la Zola, c'est terminé. Dieu merci.

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