Le financement des TPE victime d’une faille de la loi LME

La directrice générale de la Fédération bancaire française déplore la mauvaise application de la loi de modernisation de l’économie et appelle les chefs d’entreprise à profiter des exceptionnelles conditions de crédit pour profiter de la croissance.
900 milliards d'euros de paiements non acquittés seraient dans la nature.

"Investissez, car c'est aujourd'hui très facile de rentabiliser un investissement" : c'est en substance le message délivré ce mercredi matin à Bordeaux par Marie-Anne Barbat-Layani, directrice générale de la Fédération bancaire française (FBF), venue dans le port de la Lune à la rencontre de plusieurs représentants du monde économique et social néo-aquitain, qu'il s'agisse du Medef, de la Fédération française du bâtiment, de la Banque de France ou encore du Conseil départemental de la Gironde.

"Je suis là aussi pour écouter et faire remonter les attentes des acteurs économiques du terrain" a éclairé la directrice générale, qui a été accueillie par Pascale Ribault, directrice générale du CIC Sud-Ouest et première femme à avoir accédé en mars dernier à la présidence du Comité régional des banques d'Aquitaine.

La France championne d'Europe du crédit

Si le Comité régional n'a pas encore fait le grand bond pour se caler au format Nouvelle-Aquitaine, des chiffres à cette échelle sont disponibles et les établissements bancaires néo-aquitains emploient 22.000 salariés dans la région. Comme l'a souligné Pascale Ribault, la progression de l'encours de crédit sur un an est de +5,8 % en Nouvelle-Aquitaine, mais de +6 à +6,5 % dans l'ancienne région d'Aquitaine. Marie-Anne Barbat-Layani a dressé un portrait qui pourrait sembler idyllique du financement des entreprises, soulignant que le crédit connaît un fort dynamisme pour le financement de l'économie.

"La France est le champion du financement des entreprises dans la zone euro, avec un encours de 1.500 Md€ (+7 % par an), dont 60 % en crédit. Nous avons aussi les taux les plus bas d'Europe à 1,77 % pour les PME réalisant moins d'un million d'euros de chiffre d'affaires, à échéance à moins d'un an. Je précise que ces chiffres ne sont pas ceux de la FBF mais émanent d'organismes indépendants" a tenu à rassurer la représentante de la fédération.

Marie-Anne Barbat-Layani enfonce le clou de la bonne orientation financière du pays.

LME : 12 Md€ de trésorerie manquante

"A 94 % le taux d'accès au crédit d'investissement est en France le plus élevé de la zone euro, c'est pareil pour la trésorerie avec un taux d'accès de l'ordre de 80 %" se félicite la directrice générale. Alors d'où vient l'impression que le compte n'y est pas vraiment, en particulier pour les TPE, ces très petites entreprises classées dans les microentreprises qui emploient, selon la nomenclature de l'Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), jusqu'à 9 salariés.

"Les TPE se situent environ 10 points au-dessous des PME, avec un taux d'acceptation des demandes en crédit d'investissement de 80 % et de 70 % pour le crédit en trésorerie" illustre la DG pour qui le problème financier des TPE ne vient pas des banques mais d'une mauvaise application de la loi sur la modernisation de l'économie (LME) de 2008.

"Ce qui pèse sur les TPE et les PME c'est la non application de la loi LME, avec des délais de règlements inter-entreprises qui ne sont pas respectés. Les sous-traitants souffrent d'importants retards de paiement. Si la loi LME était appliquée il y aurait 12 Md€ de plus dans la trésorerie des PME. Il y a une faille et certaines sources estiment à 900 Md€ le montant des paiements en attente" décortique l'émissaire de la FBF, qui ne veut surtout pas que l'on puisse croire que sa fédération donne dans l'autosatisfaction.

Les Américains débusqués au Comité de Bâle

Marie-Anne Barbat-Lyani a ensuite expliqué pourquoi les banques françaises, comme européennes, étaient vent debout face à la nouvelle mouture des Accords de Bâle. Ces accords, qui visent à stabiliser le fonctionnement des banques, ont obligé les banques à augmenter le niveau de leurs fonds propres. Mais alors qu'en France et en Europe l'évaluation de la bonne santé des banques porte sur leur sensibilité au risque, aux Etats-Unis c'est sur la taille du bilan qu'elle repose...

Aux Etats-Unis les crédits immobiliers ne figurent pas aux bilans des banques, ce qui réduit d'autant leurs tailles et le risque représenté par ces dettes. Tandis que les crédits immobiliers sont non seulement comptabilisés dans le bilan des banques en France et en Europe mais y font l'objet d'un impitoyable contrôle. Les différences d'approche entre l'Europe et les Etats-Unis font que la notion de bilan, photographie de la situation financière d'une entreprise pour une période donnée, est littéralement antagoniste entre les deux régions. Et que le comité de Bâle, pour la version 3.5 ou 4 des accords qui portent son nom, a adopté, sans le dire, comme référence le modèle bancaire américain... pour établir les nouvelles règles qui s'appliqueront aux banques européennes.

"L'étude sur ces nouveaux accords de Bâle est sortie en juin 2016. Les accords devaient devenir applicables en septembre de la même année mais presque un an plus tard, rien n'est fait. Parce qu'en prenant connaissance de l'étude, en juin 2016, les régulateurs ont vu ce que le Comité de Bâle avait fait, comment il avait enfumé les Européens ! Tout le monde est furieux aujourd'hui", lâche la directrice générale de la FBF en précisant que dans ce litige qui l'oppose aux Etats-Unis, l'Europe est appuyée par la Chine, également inquiète.

La question de la stabilité bancaire est vraiment conflictuelle.

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