Fabien Farge, l’urgentiste qui a rêvé Helper, le drone sauveteur

Médecin urgentiste depuis 15 ans, Fabien Farge a eu l’idée de mettre au point un drone sauveteur pour faciliter et accélérer l’intervention des secours en mer. Véritable couteau suisse avec les multiples fonctionnalités développées par ses quatre concepteurs, ce drone primé lors du dernier Concours Lépine, baptisé Helper, entre en phase de pré-industrialisation.
Fabien Farge, Anthony et David Gavend, Gérald Dumartin, les créateurs du drone Helper

Il voulait gagner du temps. Parce qu'il est médecin urgentiste en off-shore sur des plateformes pétrolières de Total en Angola et travaille l'été sur la plage landaise de Biscarrosse, Fabien Farge a eu l'idée de mettre au point un drone permettant d'accélérer les interventions des sauveteurs en situation d'urgence.

"Cette notion de sécurité est très importante sur les plateformes, avec une problématique, celle de l'homme à la mer, explique Fabien Farge. On s'entraîne régulièrement même je n'en ai jamais fait l'expérience. Dans le sauvetage côtier, c'est la même problématique. Dans les deux cas, il faut intervenir rapidement, c'est l'enjeu de l'urgence. Il fallait une réponse primaire : à utiliser tout de suite, sans jet ski ou bateau. C'est comme ça qu'est venue l'idée du drone sauveteur."

Ainsi naît Helper, 3,9 Kg, capable d'assister une opération de sauvetage même en cas de vent (50 km/h), avec une vitesse au sol réglementaire de 55 km/h et des pointes à 80 km/h.

A 47 ans, Fabien Farge n'en est pas à son coup d'essai. En 2015 il a reçu le Prix du Président d'honneur du Concours interne Best Innovators de Total pour son projet MOB "Man Over Board" : une planche de sauvetage permettant d'extraire rapidement une personne tombée en mer tout en maintenant son axe tête/cou/tronc. Avec cette technique, en seulement 5 minutes, 3 sauveteurs non expérimentés ont réussi à extraire un plongeur mimant l'inconscience, avec son gilet gonflé, soit le pire des scénarios.

Tests concluants

"Comme je suis gourmand, j'ai à nouveau tenté ma chance avec le drone Helper, développé avec un ami pompier, pilote et constructeur de drone, Gérald Dumartin (directeur commercial de la société Terra Drone à Monfort-en-Chalosse dans les Landes, NDLR). Et parce que j'interviens sur les plateformes off-shore, j'ai travaillé avec des équipes de Total spécialistes en sûreté, sécurité et anti-pollution. Nous l'avons présenté au concours alors que tout n'était pas au point, notamment au niveau administratif car il nous manquait l'agrément de la DGAC. Mais nous sommes allés jusqu'en demi-finale."

Cette nouvelle tentative aurait pu prendre fin aux portes de la finale. Mais notre aventurier, qui a parcouru l'Amérique du sud par les fleuves, exploré l'Amazonie brésilienne en zodiac, fait le tour de l'Afrique de l'ouest en moto, parcouru l'Antarctique sur 3.000 km... ne peut se résoudre à l'abandon. Il décide de mener le projet plus avant avec deux informaticiens landais, David et Anthony Gavend, cofondateurs du bureau d'études MyWebTeam, à Hinx dans les Landes. La validation de la DGAC arrive. Le drone est testé au cours de l'été dernier pendant sept semaines depuis le poste de secours nord de la plage de Biscarrosse. La société Helper-Drone est née.

"Ça a été super de la part de la mairie de nous permettre ce test en conditions réelles, c'est la première fois au monde qu'on mettait ce drone en activité professionnelle, rappelle Fabien Farge. Donc je repars voir Total avec ça et l'idée les a intéressé : ça a été une grande première de pouvoir le mettre une semaine sur une plateforme pétrolière, avec 21 essais."

Nouvelles applications

Helper ne va pas convaincre que Total : il remporte en septembre le Prix du Premier ministre au Concours Lépine européen.

"Ce n'est pas vraiment le drone en lui-même qui a été distingué, mais toutes ses fonctionnalités : la bouée auto-gonflable brevetée, équipée d'une radio pour permettre la communication entre la victime et le sauveteur, d'une balise GPS pour localiser et envoyer un hélicoptère sur site, d'une bouteille d'oxygène pour intervenir au plus vite auprès de la victime déjà en situation de noyade. Il peut également larguer un défibrillateur semi-automatique, voire larguer un kit de secours de première urgence. Ensuite Anthony et David ont mis au point du système d'information géographique dynamique qui permet des missions de sauvetage quasiment en vol automatique, avec une localisation précise, une carte mise à jour quasiment en instantané : c'est ce système de cartographie aussi qui a été primé."

Pas peu fier de son bébé, Fabien Farge égrène ses multiples possibilités.

"Ce qui plait, c'est qu'il fait plusieurs choses : il sauve des vies, il largue une bouée, participe à la recherche de l'homme à la mer, il couvre 8 km2 en 10 minutes, est équipé d'une caméra thermique. Mais il participe aussi à la protection de l'environnement parce qu'il y a des risques sur tous les sites industriels, avec par exemple des fuites accidentelles. Sa caméra thermique permet de distinguer les couches épaisses des irisations, donc d'adapter les moyens et là aussi la vitesse rend plus efficace. Enfin le drone participe à des missions de sûreté : certains sites industriels sensibles sont interdits d'accès aux personnes non autorisées. Or il arrive que des bateaux de pêcheurs dérivent et se rapprochent, on peut aussi craindre des bateaux malveillants dans le contexte international actuel : le drone va voir ce qu'il se passe sur le bateau et dépose une radio pour nous permettre d'entrer en contact avec le navire."

Helper est revenu mi-novembre en mer pour 1 jour d'exercice de grande ampleur sur un site de Total en offshore. Les 43 sorties cet été à Biscarrosse ont permis 3 sauvetages réels, dans une saison calme avec 20 jours de drapeau vert.

"Mais on a vu qu'au quotidien, il permettait aussi de lever des doutes, notamment par exemple à 15 heures, lorsque qu'une tache solaire se forme sur la mer. On a découvert à l'usage cet emploi quotidien en fond de baignade qui permet d'éviter d'envoyer un maître-nageur sauveteur. La législation sur les drones a évolué grâce à nous, et désormais on réfléchit à d'autres applications. On en est au stade de la pré-industrialisation. Le but désormais est de préciser avec les professionnels, Total ou Biscarrosse pour l'instant, comment s'adapter au mieux à leurs process."

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Cet article a initialement été publié dans l'Edition Bordeaux de La Tribune, en kiosque le 8 décembre 2016.

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Commentaire 1
à écrit le 24/01/2017 à 9:22
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C'est dommage que ce soit une copie du drône Hollandais de Drôneexpert et de la société française drône logistique qui a conçu ce drône il y a 4 ans !!!! La seule différence c'est qu'il n'ont pas de docteur pour en parler dans les médias.

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