Crowdfunding : Philippe Gaborieau interpelle les candidats à la présidentielle

Fondateur de la plateforme de crowdfunding Happy Capital, le Bordelais Philippe Gaborieau vient de publier un livre blanc dans lequel il développe six propositions pour améliorer la fiscalité des investisseurs en crowdfunding. Alain Juppé en a écrit la préface.
Philippe Gaborieau, président fondateur de la plateforme Happy Capital

"Il faut favoriser le crowdfunding pour que les investisseurs privés financent l'économie réelle. Pour les entreprises ça continue d'être le parcours du combattant. Avec la présidentielle on va essayer de faire bouger les lignes."

En écoutant les candidats et le retour de la suppression de l'ISF, Philippe Gaborieau, fondateur à Bordeaux d'Happy Capital, a décidé d'écrire ce "Livre Blanc de la défiscalisation des investissements dans les PME avec le financement participatif" pour proposer des mesures concrètes et rappeler l'incidence directe entre défiscalisation et investissement.

Pour lui, une éventuelle suppression de l'ISF devra obligatoirement s'accompagner d'une refonte du dispositif de déduction au titre de l'IR avec une revalorisation du taux de déduction, pour ne pas voir disparaitre cette source de financement des PME françaises que représente le crowdfunding.

"Pour les gens qui sont assujettis à l'ISF, la défiscalisation, c'est une belle incitation à investir. Si on perd cette tranche d'investisseurs, ça va devenir très compliqué, on perd 50 % de nos investisseurs donc il faut des déductions qui donnent envie d'investir."

Démocratiser le financement par les particuliers

"Emmanuel Macron a fait beaucoup d'annonces positives, mais il manque le moteur, c'est-à-dire une loi plus favorable. Ce n'est pas encore assez incitatif", estime Philippe Gaborieau.

Rappelant que la fiscalité est le premier frein, il publie 6 propositions :
- Favoriser les investissements au capital des PME en harmonisant le taux de réduction de l'IR sur celui de l'ISF, soit 50 % des montants investis.  
- Harmoniser le plafond maximal de l'avantage fiscal du dispositif IR sur celui de l'ISF, soit 45.000 euros de déduction.
- Diminuer le délai de détention des titres à 3 ans contre 5 ans actuellement pour bénéficier de l'avantage fiscal.
- Offrir à l'investisseur une exonération de l'impôt sur les plus-values de cession en contrepartie de la conservation des parts de la société pendant au moins 3 ans (défiscalisation à l'entrée et exonération des plus-values à la sortie)
- Offrir la possibilité aux entreprises cotées ou non cotées d'investir directement dans des jeunes entreprises de moins de sept ans en déduction d'une quotité de leurs impôts sur les bénéfices.
- Offrir la possibilité au contribuable investisseur de déduire les moins-values de cession directement de la base imposable de son impôt sur le revenu.

Objectif : "démocratiser vraiment le financement des entreprises par les particuliers", insiste le fondateur d'Happy Capital qui rappelle ce deuxième frein à l'investissement : le questionnaire très poussé imposé aux particuliers qui souhaitent investir, même pour de petites sommes.

"Ce questionnaire n'a pas de sens pour quelques centaines d'euros. Il faut le supprimer en dessous d'un certain montant car on constate un taux de déperdition très fort sur cette étape", explique le fondateur de la plateforme qui est par ailleurs l'un des partenaires de Bordeaux Gironde Funding, portail de crowdfunding lancé par la CCI de Bordeaux. "J'ai beaucoup de retours par rapport à ça de porteurs de projets, de dirigeants ou d'investisseurs. Ça ne marchera jamais avec ce système rédhibitoire."

"L'Etat s'y retrouvera"

Autre constat :

"Qu'est ce qui fait que les Anglo-Saxons récoltent 15 fois plus de fonds que nous ? Nous n'avons le même système de retraite certes, mais surtout nous n'avons pas le même système fiscal. Un Anglo-Saxon défiscalise beaucoup plus et peut même déduire les pertes de ses revenus. Les entreprises bénéficient de déductions fiscales quand elles investissent dans d'autres entreprises en crowdfunding. L'Etat s'y retrouvera, on ne lui demande pas de faire de cadeaux. Les entreprises investiront, créeront des emplois, c'est un cercle vertueux."

Message reçu apparemment par Alain Juppé, candidat aux primaires des Républicains pour l'élection présidentielle, qui est favorable à la suppression de l'ISF. Le maire de Bordeaux reconnaît dans la préface de ce livre blanc :

"Les Français épargnent beaucoup, mais une part infime de cette épargne finance les entreprises. Or l'investissement c'est l'emploi. (...). Mais la France est en retrait par rapport aux pays voisins les plus dynamiques, comme l'Allemagne ou le Royaume-Uni, qui encouragent davantage l'investissement productif. Donner à nos entrepreneurs des marges de manœuvre pour se développer grâce à une fiscalité plus favorable aux investissements est un impératif. C'est une de mes priorités."

Selon une note de l'Esma, autorité européenne des marchés financiers, en Europe les banques financent 80 % de l'économie ; aux Etats-Unis c'est l'inverse : ce sont les business angels, les fonds d'investissements, etc. qui financent l'économie. "Il faudrait arriver en Europe à un rapport 50/50. Mais il faudra du temps...", admet dans un sourire Philippe Gaborieau, qui vient de prendre la présidence de l'Afip (Association française de l'investissement participatif), et annonce pour la fin de la semaine une prise de position commune sur le sujet.

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