Face aux vents contraires, l'agriculture voit dans le stockage de carbone une source de revenus

Sécheresse et aléas climatiques, grippe aviaire, hausse des coûts de production : les exploitations agricoles sont dans la tourmente. Dans ce contexte, la Chambre d'agriculture de Nouvelle-Aquitaine mise notamment sur la captation de carbone, avec Acclena, une association dédiée, pour retrouver une dose d'optimisme et d'équilibre économique. L'agrivoltaïsme peut aussi être une piste... à certaines conditions.
(Crédits : CC Pixabay by photosbygreenwood)

« Comme beaucoup d'autres secteurs, l'agriculture a été assez chahutée en 2022 », euphémise Luc Servant, le président de la Chambre régionale d'agriculture de Nouvelle-Aquitaine, à l'orée de 2023. Il égraine ainsi « une année exceptionnellement sèche et chaude du 1er au dernier jour, la flambée du coût de l'énergie et des matières premières, dont les engrais, et l'épidémie d'influenza aviaire ». D'autant qu'en plus de ces aléas qui touchent l'offre, la demande est, elle aussi, frappée par l'inflation qui a tendance à détourner les consommateurs des productions haut de gamme sur lesquelles la région est bien positionnée. « Le bio comme les produits sous signe de qualité souffrent plus que les autres parce que les consommateurs se tournent vers les produits les moins chers et le plus souvent importés », pointe ainsi Luc Servant. La filière laitière et celle des volailles, notamment les canards touchés par la grippe aviaire, sont particulièrement en difficultés.

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« Une forte demande d'accompagnement »

Et bien que l'on ne connaisse pas encore les contours climatiques ni géopolitiques de 2023, certaines tendances devraient se confirmer telles que le manque d'eau, le développement de l'agro-écologie et la reconquête d'une forme de souveraineté alimentaire. Des éléments qui se traduisent par l'entrée en vigueur au 1er janvier 2023 de la nouvelle Politique agricole commune, davantage régionalisée, et la perspective d'un projet de loi d'orientation agricole qui doit être présenté avant l'été par le gouvernement.

« Sur tous ces sujets, ce qui nous remonte du terrain c'est une forte demande d'accompagnement. Il faut faire du cas par cas parce que les situations et les solutions sont très différentes d'une exploitation à l'autre », observe Marie-Hélène Cazaubon, la présidente de la chambre landaise, qui milite pour « une simplification des démarches administratives face à des projets qui mettent des années à se concrétiser ». Le tout sur fond de vieillissement et de grande précarité de la profession puisqu'environ « un tiers des exploitations agricoles girondines sont ainsi en déficit structurel tandis que près des deux tiers des exploitants génèrent moins de 16.000 euros de revenus annuels »,  rappelle Jean-Louis Dubourg, son homologue girondin.

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Identifier des compléments de revenus

Et parmi les solutions envisagées pour augmenter le revenu agricole et redonner du même coup de l'attractivité au métier d'agriculteur, la piste de la valorisation de la séquestration d'émissions carbone est sérieusement explorée dans la grande région.

« Le stockage de carbone doit être l'un des éléments du revenu agricole. L'idée étant d'aider les exploitations à identifier, quantifier et certifier leur potentiel de captation sur plusieurs années pour ensuite leur permettre d'aller chercher des crédits carbone sur le marché volontaire auprès des entreprises, collectivités ou citoyens qui souhaitent les valoriser localement », explique Olivier Degos, le directeur de la chambre régionale.

Cela peut, par exemple, se traduire par des plantations d'arbres ou de haires, le pivot vers des cultures moins polluantes, la rénovation du système énergétique ou hydraulique, etc.

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Concrètement, une association ad hoc est mise sur pied : l'Acclena - pour Association carbone climat environnement Nouvelle-Aquitaine - prend la suite d'Aquitaine carbone qui avait été créée au lendemain de la tempête Klaus de 2009. L'objectif est d'accompagner les exploitations pour répondre aux appels à projets identifiés par le label national Bas Carbone.

« Les premières évaluations permettent d'envisager en moyenne 500 à 600 euros de revenu supplémentaire par an mais ça peut être bien davantage pour l'élevage où l'on est plutôt autour de 5.000 euros par an. Sachant qu'il faut soustraire de cela le coût de l'investissement mais qu'il est raisonnable de tabler un hausse du prix des crédits carbone », précise Olivier Degos.

Enfin, la piste de l'agrivoltaïsme - le fait de combiner activité agricole et production d'énergie renouvelable - est également envisagée par la Chambre régionale d'agriculture mais avec des pincettes. « Oui, ça peut être un complément de revenu contribuant à pérenniser un certain nombre d'exploitations et à limiter, dans certains cas, les effets de la grêle et de la chaleur mais la notion de production agricole doit rester primordiale et demeurer dans le temps. On privilégie plutôt les projets collectifs que purement individuels », synthétise Marie-Hélène Cazaubon alors qu'un projet de loi sur le sujet est actuellement discuté au Parlement.

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