La création de la future grande région Aquitaine, Limoges, Poitou-Charentes (ALPC), déclenche des réactions hostiles dans les rangs de l'Insee (l'Institut national de la statistique et des études économiques) d'Aquitaine. Dans un communiqué envoyé à la presse hier en fin de journée, les agents de cet institut, qui réalisent des études de fonds sur la structure économique (démographie, secteurs d'activité, création de richesses...) et son évolution, en France comme dans les régions, annoncent la création du Collectif Insee Bordeaux (CIB). Dans le schéma de la fusion à trois régions, la future direction régionale de l'Insee ne sera plus à Bordeaux mais à Poitiers.
Des effets néfastes
"Si nous avons créé ce collectif ,c'est parce que nous ne sommes pas contre le fait de faire des économies. Nous ne nous opposons pas à la réforme en tant que telle, comme ont tendance à le faire les syndicats, avec lesquels nous nous sentons complémentaires. Ce que nous voulons faire, c'est sensibiliser nos partenaires et les citoyens aux effets très négatifs que va entraîner cette réforme sur la qualité de notre travail. Parce que tout est fait dans une très grande précipitation" expose ce membre du collectif qui souhaite conserver l'anonymat.
Le CIB n'apprécie pas tout d'abord que la direction régionale de l'Insee soit, dans la future région, implantée à Poitiers. Une implantation qui pose de nombreux problèmes et s'avère plus complexe qu'il n'y paraît.
Le spectre de la désorganisation
Il faut savoir qu'une direction régionale de l'Insee gère globalement trois types de fonctions : l'action régionale (réalisation notamment d'études à la demande d'acteurs régionaux), la collecte et la production (et la diffusion) de données démographiques, économiques... et la gestion interne, particulièrement celle des ressources humaines. Or, ce que dénonce le CIB, c'est une désorganisation fondamentale de ces fonctions.
"Le service d'étude et diffusion serait regroupé à Bordeaux, pour limiter les effets néfastes de l'implantation à Poitiers mais le directeur régional (à Poitiers) se trouverait alors éloigné de son équipe d'action régionale, et il n'y aurait plus d'action régionale ni à Poitiers ni à Limoges" souligne le collectif.
Autrement dit, le directeur de l'Insee serait à Poitiers mais son plus gros service (étude et diffusion) se verrait centralisé à Bordeaux.
Trop loin de l'Aquitaine
"Nous ne pouvons pas accepter que les régions Limousin et Poitou-Charentes perdent ce service d'étude et de diffusion, ce qui va les couper de leur proximité avec le terrain économique. Nous ne pouvons pas accepter non plus que la direction régionale soit décentrée à Poitiers, au nord de la future plus grande région de France, loin de l'Aquitaine, qui constitue l'ensemble économique le plus puissant des trois régions fusionnées" relève cet autre membre du collectif.
L'Insee emploie 131 agents plus 44 enquêteurs en Aquitaine, 79 agents plus 15 enquêteurs en Limousin, 92 agents plus 21 enquêteurs en Poitou-Charentes.
Près de 60 agents à recycler
"Des efforts nous en avons déjà fait, nous savons ce que c'est. En 2006, l'Insee Aquitaine comptait 181 agents. Il n'y aura pas de mobilité géographique mais des mobilités fonctionnelles. Ceux qui ne bougeront pas changeront de métier, ce qui va représenter de gros investissements en formation et accompagnement des agents. A l'échelle de la future grande région, relève cette adhérente du collectif, une vingtaine de postes devraient disparaître. Mais il va y avoir beaucoup plus d'agents à recycler, poursuit-elle, en particulier dans les ressources humaines, qui seront centralisées à Poitiers. Les RH représentent une vingtaine de postes à Bordeaux, mais il faut compter que Limoges va en perdre autant et Poitiers aussi, avec la disparition du service études et diffusion".
Le CIB ne s'oppose pas à la réforme mais à la précipitation dans laquelle elle se fait. "Pourquoi aller si vite, alors que le changement des structures est calé à l'horizon 2018 ?" s'interroge cet agent.
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