14 M€ investis dans une usine de méthanisation agricole en Nouvelle-Aquitaine

Les associés de la SAS Gazteam Energie se sont pliés à un exercice de présentation de leur projet à l’occasion du salon ExpoBiogaz de Bordeaux. Ils prévoient la mise en service d’une unité de méthanisation agricole à Combrand dans les Deux-Sèvres. L’objectif est d’obtenir du biogaz grâce aux matières organiques collectées dans les exploitations environnantes et de l’injecter ensuite directement dans le réseau de gaz naturel.
De gauche à droite : Hervé Devanne, Alain Caillaud et Fabrice Gabard, les 3 associés initiaux, tous agriculteurs.

La Nouvelle-Aquitaine est la première région de France pour la méthanisation avec 60 unités de méthanisation en exploitation ou construction et 34 projets d'injection en cours de développement représentant une production potentielle de 825 GWh/an. Un projet a fait particulièrement parler de lui à l'occasion de la sixième édition du salon ExpoBiogaz qui s'est tenu à Bordeaux les 31 mai et 1er juin : Gazteam.

Créée en février 2014, la SAS Gazteam Energie prévoit la mise en service de l'une des plus grandes unités de méthanisation agricole de France à Combrand, dans les Deux-Sèvres (79). L'unité permettra de valoriser les effluents d'élevages, fumiers et pailles de trois groupements d'agriculteurs afin de produire chaque année plus de 2,5 millions de m3 de biométhane, soit l'équivalent de la consommation annuelle de 3.000 foyers.

Cette unité de méthanisation a été imaginée dès 2012 par Alain Caillaud, agriculteur (élevage bovin et céréales).

"C'est né d'une envie de diversification et d'innovation. Après le photovoltaïque, je me suis tourné vers la méthanisation tout simplement parce qu'une canalisation de gaz traversait mes parcelles et qu'il était possible d'injecter du biogaz directement dans le tuyau. J'ai parlé de ce projet à deux agriculteurs voisins qui m'ont tout de suite suivi."

Des économies pour l'agriculteur

Les 3 agriculteurs, soucieux de valoriser les effluents d'élevages de leurs exploitations et d'avoir un impact positif dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, ont donc développé ce projet collectif en partenariat avec 18 exploitations représentant une trentaine d'agriculteurs. "Nous devrions traiter 46.000 tonnes chaque année. Pour 1.000 tonnes de fumier exportées, chaque agriculteur réalisera 3.700 euros d'économie et de valorisation par an", précise Alain Caillaud.

"Ce projet a beaucoup de sens pour les agriculteurs qui y contribuent, dans la mesure où il permet de diminuer les nuisances liées au stockage des effluents d'élevage, et de les dégager de tous les transports aux champs, améliorant ainsi les revenus. Il s'agit d'un projet de territoire, soutenu par les élus locaux, qui participe au dynamisme des exploitations agricoles partenaires, des entreprises œuvrant sur le site et des commerçants locaux. La création de trois emplois sur le site participera également à la dynamique locale", explique Alain Caillaud.

S'il existe plusieurs procédés de méthanisation, Gazteam Energie fait appel à la méthanisation par voie sèche. Concrètement, les déchets agricoles seront déversés dans une trémie mélangeuse-peseuse et poussés dans le digesteur horizontal par une pompe. Le mélange des intrants restera ensuite pendant vingt jours dans le digesteur chauffé, où il sera périodiquement brassé afin de libérer progressivement du gaz. Le biogaz extrait sera épuré, produisant finalement un biométhane répondant aux normes d'injection dans le réseau.

Outre la valorisation en biométhane, les 39.000 tonnes de digestat (produit résidu de la méthanisation) seront utilisées par les agriculteurs pour fertiliser leurs terres. Le solde sera acheminé sur une plateforme de compostage, afin d'être transformé en compost normé.

Un investissement de 14 millions d'euros

Sur le plan financier, le projet Gazteam Energie représente un investissement global de plus de 14 millions d'euros. Cap Vert Energie, producteur indépendant d'énergies renouvelables, et le fonds régional d'investissement Terra Energies sont entrés au capital de la SAS en 2016 et détiennent ensemble 20 %. "Nous, associés initiaux, sommes donc à 80 %. Nous souhaitions garder la main sur le projet. C'est le cas", explique Alain Caillaud.

"Nous avons mis en place une gouvernance fluide et porteuse pour le projet. Notre alliance a d'ailleurs permis de rassurer les banquiers", complète Pierre de Froidefond, associé fondateur de Cap Vert Energie.

"Il faut en effet savoir que la filière biogaz encore jeune est l'une des plus difficiles à financer en raison d'un degré d'incertitude important et d'un risque élevé. Nous ne sommes pas dans cette configuration-là dans l'éolien ou le solaire par exemple. La méthanisation implique un process industriel complexe et si certains petits projets fonctionnent bien en France, les plus gros projets toussent", reconnait Virginie Quideau, chargée de mission financement pour Terra Energies.

Le fonds régional d'investissement dans les projets d'énergie renouvelable créé en avril 2016 à l'initiative de la Région Nouvelle-Aquitaine n'a toutefois pas hésité à soutenir Gazteam. Il s'agit d'ailleurs du tout premier investissement de Terra Energies. "C'est vraiment le rôle du fonds d'être un levier pour les porteurs de projets de territoires dans tout type d'énergie renouvelable", indique Virginie Quideau.

Besoin d'un coup de pouce pour la filière biométhane

Reste que la filière aurait besoin d'un coup de pouce selon Pierre de Froidefond.

"C'est paradoxal. Il y a d'un côté l'appel du marché avec le biogaz pour les véhicules, les obligations de traitement des déchets pour les collectivités et les industriels qui tirent la filière et de l'autre, des obstacles avec notamment un processus administratif complexe. Cela prend environ 5 ans pour développer ce type de projet. Les autres points de blocage sont le financement et les autorisations."

Mais pas de quoi baisser les bras pour Cap Vert Energie qui vient d'acquérir un projet de méthanisation en région Ile-de-France et confirme sa volonté d'être un acteur engagé dans l'émergence de la filière biométhane en France

Alain Caillaud lui aussi croit dur comme fer à son projet. "Bien sûr qu'il fonctionnera. Les agriculteurs qui fourniront de la matière organique sont d'ailleurs pressés. Mais si je pouvais apporter un conseil aux porteurs de projet. Il faut savoir rester humble et s'entourer."

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