Que risque vraiment le PPP du Nouveau stade de Bordeaux ?

Actuellement examiné par le Conseil d'Etat, le partenariat public-privé (PPP) du Nouveau stade de Bordeaux, le Matmut Atlantique, est-il vraiment menacé ? Le contrat liant la ville au consortium Vinci-Fayat peut-il être cassé ? Gaële Chamming's, avocate au Barreau de Bordeaux, docteur en droit public et spécialiste des PPP, explore les trois possibilités qui se présentent.

Un rappel des faits s'impose avant d'aller plus loin. Le partenariat public-privé pour la construction et l'exploitation du Matmut Atlantique, signé par Alain Juppé pour la mairie de Bordeaux d'un côté et les groupes Vinci et Fayat de l'autre, se retrouve actuellement devant le Conseil d'Etat. Le conseiller socialiste d'opposition Matthieu Rouveyre se bat depuis des années contre ce PPP, poussant donc le dossier jusqu'à la plus haute juridiction administrative de France après avoir perdu en première instance et en appel. Son postulat :

"Dans la délibération présentée aux élus et dans la communication publique du maire, le coût global du Grand stade est foncièrement sous-estimé notamment parce qu'il ne prend pas en compte la subvention de la Ville ni les impôts dus par SBA (Société Bordeaux Atlantique composée de Vinci et Fayat) et curieusement remboursés par la Ville de Bordeaux. Alain Juppé prétendait ainsi que le coût global annuel du stade s'élevait à de 3,583 millions d'euros alors qu'une fois qu'on y intègre toutes les sommes, la dépense annuelle s'élève à 6,870 millions d'euros", indique Matthieu Rouveyre.

Voilà pour la procédure. Il y a quelques jours, le rapporteur public préconisait devant le Conseil d'Etat l'annulation de la délibération municipale autorisant Alain Juppé à signer le contrat avec Vinci et Fayat. Et maintenant, se disent les administrés ?

Une seule voie pour casser le contrat

Avocate au Barreau de Bordeaux, docteur en droit public, Me Gaël Chamming's est également chargée d'enseignement en Master II des Universités de droit (Bordeaux, Montpellier, Toulouse et Saint Louis du Sénégal) et Sciences Po Bordeaux. Elle intervient régulièrement au sein de la Chaire des PPP de la Fondation Bordeaux Université. Sa thèse, publiée en 2011, portait sur "Le droit français de la commande publique à l'épreuve du contrat de partenariat : du partage des risques à la Réforme de l'Etat". Non partie prenante dans cette aventure, elle précise bien qu'elle n'a pas toutes les pièces du dossier en sa possession. Mais voici son analyse :

"Avant tout, dans ce contentieux nous sommes dans le cadre d'un recours en excès de pouvoir et pas dans celui d'un recours dit « au fond ». Dans ses conclusions présentées au Conseil d'Etat, le rapporteur public suggère d'enjoindre la Ville de Bordeaux à voter sous 4 mois une nouvelle délibération autorisant Alain Juppé à signer le PPP, afin d'éclairer parfaitement les élus sur le contrat et les montants en jeu. Mais il n'a pas relevé que les éléments évoqués par le requérant sont susceptibles de constituer une erreur d'une particulière gravité qui nécessiterait de casser le contrat de PPP."

Pas question pour Me Chamming's de préjuger si le Conseil d'Etat suivra, ou non, l'avis du rapporteur public. D'autant plus dans un contexte où de nouveaux textes de loi relatifs aux partenariats publics-privés viennent de sortir, rebattant complètement ce qui était jusqu'alors tenu pour acquis. Mais les hypothèses sont les suivantes :

  •  Le juge ne suit pas l'avis du rapporteur public : fin de la procédure.
  • Le juge suit l'avis du rapporteur public : "La Ville a quatre mois pour voter une nouvelle délibération, mais cela ne remet aucunement en cause le contrat qui est actuellement conclu entre les parties", indique Gaël Chamming's.
  • Le juge va au-delà des préconisations du rapporteur public : "S'il va plus loin, il faut savoir si le requérant a demandé la résiliation du contrat. Si c'est le cas, le juge peut s'en saisir." Vérification faite auprès de Matthieu Rouveyre, ce dernier a bien sollicité dès le début de la procédure l'annulation du PPP. En clair : c'est la seule voie possible pour que le contrat soit cassé, ouvrant de fait de nouvelles négociations entre la mairie, Vinci et Fayat.

Réponse sous 10 à 15 jours maximum.

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