Jacques Mangon, le centriste qui aimait les fleurs

Le nouvel homme fort de l’urbanisme de la métropole bordelaise a gagné ses galons de maire en lançant ses troupes centristes à l’assaut d’un projet immobilier socialiste programmé dans une zone naturelle. Sa victoire marque un changement de philosophie urbaine dans la métropole.
Jacques Mangon au balcon de la mairie de Saint-Médard-en-Jalles
Jacques Mangon au balcon de la mairie de Saint-Médard-en-Jalles (Crédits : Agence Appa)

Cet article a été publié dans le N° 226 du magazine trimestriel La Tribune -Objectif Aquitaine daté de septembre 2015.

Les premières Assises de la qualité urbaine, organisées par Bordeaux Métropole, se sont tenues une semaine avant l'adoption, le 10 juillet dernier, du nouveau plan local d'urbanisme (PLU) métropolitain. Une manifestation lancée à l'initiative de Jacques Mangon, élu maire de Saint-Médard-en-Jalles lors des municipales de 2014, et nommé depuis au poste clé de vice-président de la métropole en charge de l'urbanisme réglementaire et de la stratégie foncière.

"Le plan local d'urbanisme (PLU) qui a été adopté le 10 juillet par la métropole est orienté sur un urbanisme négocié, avec plus d'outils et moins de règles. Bordeaux est un modèle d'urbanisme de qualité et ces Premières assises ont jeté les bases d'une conférence permanente sur le concept de qualité environnementale, résidentielle, paysagère, patrimoniale...", expose Jacques Mangon.

La bataille du Bourdieu

Le nouveau maire centriste doit une grande partie de sa victoire aux municipales à l'impeccable campagne environnementaliste qu'il a menée tambour battant contre le projet de construction de logements au parc du Bourdieu. Dans cette enclave verte de 28 hectares de Saint-Médard, dont l'intégrité a été défendue en 2013 par les élus d'Europe Ecologie Les Verts (EELV), le maire sortant, le socialiste Serge Lamaison, aux commandes de la ville depuis 31 ans, voulait construire des logements. Pharmacien à Saint-Médard-en-Jalles, Jacques Mangon a bénéficié de l'appui très marqué du patron de la coalition Communauté d'avenir (UMP -Modem -UDI), Alain Juppé, maire de Bordeaux, dans le cadre d'une lutte sans merci pour renverser la majorité socialiste à la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB).

Mais Jacques Magon a séduit aussi des électeurs d'EELV. Il a ainsi cristallisé une réticence de plus en plus manifeste des habitants de la métropole bordelaise vis-à-vis d'une politique placée sous le signe d'une densification de l'habitat et de l'atteinte du million d'habitants d'ici 2030. Objectif porté comme un étendard par le jeune président sortant de la communauté urbaine, le socialiste Vincent Feltesse.

Exit le million d'habitants

En plus de l'usure du pouvoir, pour certains, et du coup de bambou de mi-mandat rituellement asséné par les électeurs au camp du président de la République, les municipales de 2014 ont confirmé l'émergence dans la CUB d'une forme d'inquiétude urbaine dans l'électorat. Ce concept de métropole au million d'habitants, Jacques Mangon l'a rayé de son vocabulaire. "Le Plan local d'urbanisme est à un moment charnière. La métropole doit accueillir 100.000 nouveaux habitants en 20 ans. Mais de quelle façon, uniquement sur des bases quantitatives ?".

Bordeaux travaux

Le cap du million d'habitants semble inquiéter les Bordelais (Appa).

Avec une population de 735.000 personnes aujourd'hui, la métropole n'arrivera jamais au million d'habitants en 2035 en gagnant 100.000 arrivants de plus. Une manière élégante pour Jacques Mangon de clore ce dossier millionnaire.

Suite logique de sa prise en charge de l'urbanisme réglementaire et de la stratégie foncière à la métropole, le nouveau maire de Saint-Médard-en-Jalles siège désormais en tant que vice-président au sein de la très influente Agence d'urbanisme Bordeaux Métropole Aquitaine (A'urba) et a été nommé PDG de la société publique locale (SPL) "La Fab" (La fabrique métropolitaine) en charge depuis le début de l'année du projet "50.000 logements nouveaux autour des axes de déplacement".

Rassurer les promoteurs

Titulaire d'un doctorat en pharmacie, Jacques Mangon, également diplômé de Sciences Po, s'est en quelques mois imposé au plus haut niveau de la politique urbaine de la métropole sans faire de bruit. Devenu la discrète figure de proue de cette nouvelle majorité métropolitaine, qui a submergé les positions du PS en pilonnant avec efficacité de nombreux programmes de constructions de logements, il a fait peur aux promoteurs bordelais. A commencer par Alain Ferrasse, président de la Fédération de la promotion immobilière d'Aquitaine et Poitou-Charentes (FPIAPC), qui a dénoncé le danger que représentait selon lui cette nouvelle coalition du centre et de droite pour le marché de la construction. Jacques Mangon a depuis fait une intervention apaisante en avril dernier lors de la remise par la FPIAPC des prix des Pyramides d'argent aux meilleurs projets immobiliers régionaux.

"Les 50.000 logements on est en plein dedans et je suis président de la Fab. Il s'agit d'orienter le développement de l'agglomération autour des axes de transports en commun. Le projet est lancé. La concertation va se faire commune par commune, la métropole et la Fab sont partie prenante. Il faut faire travailler tout le monde. Avec les promoteurs la confiance est revenue, leur souhait est que ça avance. Nous sommes dans l'entre-deux, le temps que les équipes se mettent en place", temporise le patron de la Fab.

Sa vision urbaine et immobilière implique en tout cas une vraie fluidité des relations au sein de la métropole.

Consulter les habitants

"Un maire doit pouvoir décider de protéger son patrimoine. Il faut rester dans la qualité, quoi qu'il en soit, et ne pas poser de constructions n'importe comment, pour ne pas nuire à la qualité urbaine et à l'environnement " éclaire Jacques Mangon.

Bordeaux nuit

Pas question transiger avec la qualité du patrimoine (Agence Appa)

Une philosophie de l'action qui alimente une autre inquiétude, exprimée jusque dans les rangs de l'ex-UMP, celle de voir cette quête d'autonomie locale favoriser l'entre-soi et enrayer un brassage social par le logement dans lequel la métropole n'est pas en avance.

"Ce risque de l'entre-soi je ne le vois pas. Notre objectif est de faire une ville belle et heureuse. Je vous rappelle que le projet des 50.000 logements prévoit la construction de 40 % de logements sociaux, ce qui n'est pas rien. Nous sommes sur une ville ouverte, mais il faut changer de paradigme, réintroduire l'individu qui avait été un peu oublié jusqu'ici, et faire tout ça dans une ville apaisée", rétorque Jacques Mangon.

Si les Premières assises de la qualité urbaine, qui avaient lieu au Rocher de Palmer, à Cenon, ne se sont pas tenues à guichets fermés, elles ont permis au nouvel homme fort de l'urbanisme métropolitain de faire entendre sa petite musique. Un air en résonance avec celui entendu au 45e congrès de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), qui se tenait cette année à Bordeaux, où la nécessité de consulter les habitants avant de lancer un grand programme immobilier s'est imposé dans des débats parfois très contradictoires.

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Commentaires 2
à écrit le 02/02/2017 à 16:10
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EELV, Christine Moebs en tête, n'aurait servi à rien ? Etonnant de la part d'une "militante acharnée". Qui travaille où au fait ? (entre deux clopes)

à écrit le 16/11/2015 à 19:20
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Très intéressant cet article! Quant au rôle de EELV par rapport au domaine du Bourdieu site INSCRIT ce qu'on se garde de dire ou d'écrire voici ce que Naturjalles avait constaté Certains arrivent après la bataille avec des larmes de crocodile! EELV ...

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